De son arrivée, pour la première fois en Tunisie, est né son premier croquis au crayon daté du 1er avril 1914 et signé Alexandre Roubtzoff. Et quelques jours avant sa mort, le 25 novembre 1949, il signa le dernier, en date du 10 novembre 1949. Ces deux dessins parmi plusieurs autres de son oeuvre graphique tunisienne, issus de son carnet de route, sont exposés actuellement, et pour la première fois, en Tunisie; ce pays qu'il a tant aimé jusqu'à en faire le coeur de son inspiration. Ainsi, se présente Alexandre Roubtzoff, aux yeux de l'historien de l'art Patrick Dubreucq. Une oeuvre graphique "inédite" Pour ce spécialiste de l'oeuvre de Roubtzoff, cette exposition "inédite" qui se tient du 2 décembre au 2 janvier 2011, à la maison des arts du Belvédère, donne la preuve, 60 ans après, que cet artiste venant du Nord, ne fait pas partie de ces peintres voués à l'oubli, tenant à rappeler l'hommage qui lui a été rendu, en 1950, 1951 et 1952, par le Salon tunisien présidé à l'époque par Alexandre Fichet. Aujourd'hui encore, ses merveilles graphiques -plusieurs sont annotées en arabe-, appartenant à la collection de l'Association des Amis d'Alexandre Roubtzoff, (AAAR) témoignent d'un peintre prolifique à juste titre. En effet, explique-t-il, lors d'une visite commentée, l'exposition est aussi importante que révélatrice car elle montre deux étapes différentes de sa vie en Tunisie. D'une valeur artistique et documentaire, elle retrace l'évolution stylistique d'un dessinateur qui a fait de son coup de crayon magistral, des oeuvres achevées immortalisant des scènes de vie quotidienne, des coutumes, des petits métiers (tissage, filage de laine..) qui risquaient à ses yeux de se perdre. Associant l'aquarelle, "il se place comme un guide qui emporte l'observateur pour une visite virtuelle cherchant à l'introduire dans le champ de son oeuvre". Son amour pour la Tunisie a fait de lui un orientaliste réaliste Cet excellent peintre d'intérieur devint, en voyageant à travers ce pays muni de sa boite au pouce exposée, un excellent peintre de plein air. Son goût extrême pour le détail d'un décor, sa minutie dans le rendu de l'accessoire et des tâches domestiques de ses modèles, cèdent la place au fur et à mesure à l'expression du visage, en quelque sorte à la présence de l'humain dans son modèle. Une évolution visible aussi dans ses toiles exposées au premier étage. Abandonnant les cadrages larges, comme dans son célèbre tableau "Intérieur de style empire", Roubtzoff opta pour des plans plus resserrés, plus rapprochés, pour capter de plus près la profondeur d'un regard, d'un trait. Arrêt sur son portrait préféré "Alia" (huile sur toile). Peinte depuis sa jeunesse jusqu'à sa vieillesse, "Alia" est la preuve irréfutable qu'Alexandre Roubtzoff, emporté par l'émotion, devint plus sensible à la psychologie de son modèle. "Alexandre Roubtzoff, est loin d'appartenir à l'orientalisme mièvre", insiste Dubreucq. C'est un "orientaliste réaliste" qui avait trop aimé la Tunisie, à l'instant même où il avait découvert ce pays, tenant à rappeler, devant l'assistance, la citation sympathique du peintre : "Il y a tellement de choses à reproduire et à peindre ici, à tel point que je n'aurais pas le temps pour me raser".