Que savons-nous de la valse ? A vrai dire, et comme pour toute musique ancrée dans l'usage commun, très peu de choses, juste ce que nous en écoutons et en ressentons : un rythme simple, à trois temps, et une danse à tempo variable, qui va du «pas enfantin», à l'ondoyance, au «tournoiement». Nous gardons aussi en mémoire des valses chantées et des valses «jouées» devenues arias et mélodies universelles. Le beau danube bleu de Strauss par exemple, mondialement apprécié, partagé et, pour ceux qui ont frayé avec la culture française, la célèbre Valse à mille temps de Brel, ou encore les piquantes javas d'Annie Cordy, et leurs superbes envolées d'accordéon. A l'évidence, tout cela ne va pas loin. Non seulement dans la connaissance d'un genre musical, attribué historiquement à la musique européenne, mais encore pour ce qui en est dans notre musique même. Car on est en droit d'être curieux de la place de la valse dans la chanson arabe. Amina Srarfi, fondatrice et directrice artistique d'«El Azifet», s'est posée la question. Et elle y a répondu en deux temps. D'abord en concoctant un spectacle intitulé «Valses orientales», présenté lors du Ramadan 2010, au festival de la Médina. Ensuite, à travers un recueil de parution récente, ayant pour titre «Les belles valses de la musique arabe». Pour profanes et initiés L'ouvrage, agréablement conçu, de fort belle allure, comble, pour beaucoup, nos lacunes en la matière. Il propose un choix de valses typiques du répertoire arabe, anciennes et actuelles, textes et partitions. Amina Srarfi dit que ces dernières, surtout, ne sont pas toujours disponibles, et qu'ayant eu l'idée de ce livre, elle a décidé de se charger elle-même de l'écriture du solfège. Et ce n'est pas peu, car parmi les chansons choisies, il y a des compositions complexes dont, en particulier, celles de Kassabji, Zakaria Ahmed, Soumbati, Mahmoud Chérif, Mohamed Abdelwahab. Oui! derrière leur apparence «facile», nos «Danubes» à nous contiennent des phrasés et des développements ardus. Wi daret el ayem, pour ne citer qu'elle, a-t-on idée de ce qu'elle exige d'une partition ? Mais Amina Srarfi ne s'en tient pas à ce seul choix de chansons. Elle y ajoute une classification et des explications. En fait, ce dont le lecteur a le plus besoin. On apprend ainsi qu'il y a la valse classique (qui peut correspondre à nos rythmes khitm et darêj), la valse viennoise (esprit du fameux Beau Danube bleu) et (petite surprise), La valse andalouse («vocale et tendant vers le flamenco»). Dans le recueil, l'ordre des chansons répond, du reste, à ces trois catégories. Autre avantage pour le profane, mais peut-être aussi pour les commentateurs et les critiques. Pourquoi non ? Au total un très bon travail de la part de Amina Srarfi, utile, agréable à lire et très pratique, que l'on parcourt avec émotion, car dédié à feu Kaddour Srarfi (le père et maître) et à celui dont la perte demeure un ébranlement pour nous tous, Faycel Karoui (le mari et compagnon d'art). Que Dieu les benisse. Raouaâ Al valse fil mouciqa al arabia, Amina Srarfi (en librairie)