Sous le régime des ZABA et consorts, nul n'ignorait que l'économie tunisienne était minée par une corruption systémique : les rouages de l'Etat et le monde des affaires étaient dévoyés et pervertis : pratiques illégales, escroquerie, malversation, clientélisme et situations de rente, le tout fait bon ménage dans ce système quasi mafieux et régi par la perversion, la compromission, l'informel et l'abus de pouvoir. En dépit de ce climat, les éloges, satisfecits et les bonnes notes de toutes sortes à l'égard de notre économie étaient sur toutes les lèvres et dans tous les médias nationaux et internationaux faisant croire aux Tunisiens que leur pays réalisait effectivement un miracle économique. Et voilà que la révolution lève le voile, libère l'information, et donc la réalité économique est tout autre : crise économique et chômage et des milliers d'entreprises en difficulté dont le nombre ne cesse d'augmenter depuis et surtout si l'on ajoute toutes celles qui opèrent avec la Libye. Donc, dégâts énormes et chômage en inflation terrible et l'on assiste à des mouvements sociaux sans précédent. Partout dans le pays, et jusqu'à ce jour, des manifestations, sit-in, et revendications de toutes sortes. Le gouvernement provisoire de transition, conscient de la justesse de ces revendications, n'a ménagé aucun effort malgré les contraintes de temps et les difficultés de la situation pour satisfaire autant que possible ces nobles causes. Par-ci, par-là des aides sociales ont été accordées à plus d'un et des mesures urgentes de relance de l'économie ont été aussitôt prises. Pas moins de dix-sept mesures l'ont été par le ministère des Finances et tant d'autres par la Banque centrale pour réactiver les entreprises ayant subi des dégâts et tombées en difficulté à la suite des évènements de la révolution. Dans le même état d'esprit, un projet de décret-loi promulguant l'amnistie pénale pour les délits relatifs à l'émission de chèques sans provisions est venu récemment s'ajouter à ces mesures pour réhabiliter plusieurs opérateurs économiques et leur donner un nouveau souffle afin de remettre autant que possible leurs affaires en marche et participer à la relance de l'économie en travaillant et en créant du travail. Ces mesures sont louables, encourageantes et motivantes. Nous espérons qu'elles ne s'arrêteront pas là et que les autres entreprises anciennement ou récemment touchées par des difficultés structurelles pour une raison ou une autre bénéficient, elles aussi, de mesures identiques. Parce que ces entreprises sont nombreuses et emploient des milliers de familles, il serait digne pour leurs banques dans cette période difficile et exceptionnelle de participer patriotiquement à cet élan national de solidarité et de relance économique en leur accordant soutien et souplesse par un recours au rééchelonnement de leurs dettes bancaires ou à l'abandon total ou partiel (selon les cas) des créances classées et provisionnées ainsi que les intérêts conventionnels ou de retard ou autres frais financiers. Cela serait certainement profitable à toutes les parties. Les entreprises, qui se réactivent avec moins de charges, auront la possibilité de dépasser leurs difficultés et honorer à terme leurs engagements et les banques y gagneront plus au sein d'une nouvelle relation avec de meilleures conditions. Les emplois seront sauvegardés et même, pourquoi pas, augmentés à l'avenir. Devant l'ampleur et la gravité de ce fléau national qui est le chômage, détonateur de la révolution et devenu ennemi public n°1, il est du devoir de tout un chacun de contribuer par tous les moyens possibles à son éradication si on veut assurer à notre pays la stabilité politique, économique et sociale. Le chômage doit appartenir au passé, sinon la dignité que le peuple tunisien a reconquise par sa révolution n'est point garantie.