L'Agence tunisienne d'Internet (ATI) compte faire appel d'un jugement en référé de la justice obligeant l'agence à bloquer les sites pornographiques, a annoncé mardi son président directeur général Moez Chakchouk. Le Tribunal de première instance de Tunis avait sommé le 26 mai 2011 l'ATI de fermer les sites à caractère pornographique suite à une plainte déposée par trois avocats tunisiens à son encontre, lesquels jugeaient que les sites X présentent un danger évident pour les enfants et ne conviennent pas aux valeurs musulmanes de la Tunisie. "Je suis personnellement contre les sites pornographiques...nous sommes dans un pays musulman (...), mais aucun texte de loi ne stipule que le blocage des sites électroniques relève des prérogatives de l'ATI", a déclaré M. Chakchouk lors d'une conférence de presse tenue, hier, à Tunis. Il a ajouté qu'auparavant, le blocage de sites Internet "était effectué d'une manière illégale et non transparente", ajoutant que "l'ex-président signait personnellement les documents commandant le blocage de certains sites en particulier". Le président déchu Zine El Abidine Ben Ali consacrait une enveloppe de 1,2 million de dinars en moyenne au blocage des sites électroniques, a-t-il ajouté, précisant que cette somme était consacrée à l'acquisition des équipements et des logiciels pointus utilisés dans le blocage des sites. Le blocage porte préjudice à la qualité des services rendus aux internautes en Tunisie, a-t-il dit, ajoutant que ces financements auraient dû être consacrés à l'amélioration de la qualité des services dans ce domaine. M.Chakchouk a noté que les ingénieurs et les techniciens de l'ATI "n'ont jamais participé au blocage des sites Internet alors que les équipements utilisés dans ce domaine relèvent de l'agence". D'autres parties "hors de l'agence", a-t-il dit sans les nommer, se chargeaient "du blocage" en contrôlant à distance les équipements réservés à cette tâche et relevant pourtant de l'ATI. A présent, a-t-il noté, il est impossible de contrôler ces équipements à distance, ce qui signifie qu'à l'exception de l'agence, aucune structure n'a les capacités techniques lui permettant de bloquer les sites Internet. La première décision relative à la levée du blocage a été prise par l'ex-président Ben Ali, le 13 janvier dernier. Une deuxième décision de ce genre a été également prise par le gouvernement provisoire le 8 février 2011. Pour Monom Turki, un des trois avocats, qui ont intenté le procès contre l'ATI, le refus de l'agence de bloquer les sites en dépit d'un jugement en référé de la justice constitue une infraction "de non-exécution d'un jugement de la justice" et "un délit d'atteinte aux bonnes mœurs". L'avocat a précisé à l'Agence TAP que le procès intenté contre l'ATI se réfère à l'article 2 du code de protection de l'enfant relatif à la protection contre la "violence sexuelle". Avant le 14 janvier dernier, la Tunisie était souvent critiquée par les Organisations internationales de défense de la liberté d'expression, en raison de la censure quasi systématique de l'Internet.