La Tunisie n'est nullement à l'abri des éventuels impacts de la crise de la dette américaine qui a fait trembler, récemment, l'économie mondiale, a estimé M. Moez Laâbidi, analyste financier et membre du Conseil d'administration de la Banque centrale de Tunisie (BCT). Une crise qui a éclaté à la suite de la décision de l'agence internationale de rating Standard&Poor's d'abaisser la note souveraine des Etats-Unis de "AAA" à "AA+", créant dans la foulée un précédent historique. Les USA n'avaient jamais enregistré une dégradation de leur notation. Outre son endettement, l'économie américaine souffre de problèmes structurels, liés au ralentissement de son activité industrielle, à la perte de compétitivité et à l'accroissement de ses disparités sociales. Dans un contexte de mondialisation et de globalisation économique, dès que l'économie américaine tousse, ce sont toutes les économies du monde qui attrapent la grippe. Cette crise impactera "directement" le secteur financier tunisien, estime M.Laâbidi, dans la mesure où la Tunisie, à l'instar de la plupart des pays, a investi dans des bons du Trésor américains en raison de la confiance dont bénéficiait le dollar, en tant que devise de référence. D'autre part, il est probable que les politiques d'austérité qui seront adoptées par les pays européens du fait de cette crise vont générer un recul des exportations tunisiennes, une baisse des recettes du tourisme et même une réduction des transferts des Tunisiens résidents à l'étranger. Ce ne sont pas là les seuls effets de la crise sur l'économie tunisienne. Selon M.Laâbidi, la crise touchera les investissements provenant des pays du Golfe. Les Fonds souverains de ces pays sont largement investis en bons du Trésor américains qui ne manqueront pas de subir une décote conséquente du fait de la crise de la dette du pays de l'Oncle Sam. En revanche, il est également probable, estime Moez Laâbidi, que la Tunisie profite du ralentissement de l'activité économique mondiale, par le biais de la baisse prévue des cours des hydrocarbures, en rapport avec la diminution de la demande et la réduction du volume de sa dette libellée en dollars suite à une baisse de son taux de change. Pour le membre du Conseil d'administration de la BCT, la crise ne s'aplanira pas de sitôt, mais perdurera durant les prochaines années. Une situation qui devrait amener la Tunisie à ne plus se suffire des débouchés du marché européen et à élargir ses sphères de partenariat économique vers les pays asiatiques qui affichent des taux de croissance annuels de plus de 5%. Pour ce qui concerne l'inconstance des bourses mondiales, M.Laâbidi précise que la crise de la dette souveraine américaine s'est rapidement répercutée sur les marchés boursiers de certains pays asiatiques à l'instar de la Chine et des pays du Golfe, les plus grands détenteurs de bons du trésor américain, enregistrant un net fléchissement de leurs indices boursiers. Relation de cause à effet, c'est la crise de confiance dans les marchés financiers en général et dans le dollar en particulier qui a amené les investisseurs à se tourner vers d'autres marchés, comme celui de l'or.