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S pour Shopping (politique) 1/5
Lexique révolutionnaire à l'usage du Premier ministre
Publié dans La Presse de Tunisie le 25 - 08 - 2011


Par Yassine ESSID
Tout prend désormais la forme d'une entreprise et la couleur d'une marchandise
Au vu de l'implosion du paysage politique en Tunisie, il est difficile de ne pas succomber à une certaine facilité en disant qu'on a un peu le sentiment de visiter une sorte d'hypermarché du politique. Car la compétition électorale entre les 105 partis en lice nous inspire inévitablement l'activité ludique d'une jeune femme un samedi après-midi, flânant dans les galeries de ce non-lieu de la consommation postmoderne, laissant traîner son regard désabusé d'une devanture à l'autre sans vraiment savoir quoi acheter.
Le principal attribut de la démocratie suppose la concurrence entre plusieurs partis politiques qui, pour conquérir le pouvoir, cherchent à gagner des électeurs. Ils utilisent pour cela tous les ressorts de la communication moderne pour se faire connaître, diffuser leur programme et promouvoir leur image au regard d'une masse jusque-là indifférente à tout débat, car longtemps exclue de toute participation politique, dont on sollicite subitement et avec forte insistance les précieux suffrages. Au moment où s'annonce la démocratie, s'installe précipitamment la communication, un euphémisme pour propagande, sous ses diverses formes. Des moyens sont mis en œuvre afin d'informer, convaincre ou séduire, qui passent tous par les médias : presse, radio, télévision, affichage et bannières sur les sites internet, réseaux sociaux, bases de données et opérations militantes, parfois massives, de porte à porte dans les quartiers populaires. Il arrive même qu'un parti use du bénévolat ou du volontariat, pour l'entretien des rues par exemple, pour que le public identifie ses lignes de force afin d'en extraire les futurs possibles d'une bonne gouvernance à plus grande échelle. Ces mêmes partis, instrumentalisant d'autres voies, n'hésitent pas à soudoyer des électeurs modestes en s'assurant au passage qu'en contrepartie, les bénéficiaires affichent bien leur allégeance par le port ostensible de la barbe et du foulard. Le soulèvement du 14 janvier a substitué à l'idée d'une transition démocratique pacifique et progressive, telle que prônée sans succès pendant des décennies par les puissances occidentales, celle d'un changement immédiat survenu à la faveur d'un événement historique au cours duquel le régime de Ben Ali et du parti unique furent abolis et la liberté conquise. Un dictateur est chassé du pouvoir et des élections libres décidées dans la foulée sans le préalable d'une culture démocratique du peuple. En effet, on ne semble pas avoir pleinement compris qu'on était rentré dans une ère radicalement inédite, que la société démocratique, à venir, est une société d'une nature radicalement nouvelle parce que les relations entre les hommes y sont profondément différentes ainsi qu'entre les hommes et les institutions de l'Etat. De même qu'on a perdu de vue que la culture démocratique suppose non seulement de proclamer les droits fondamentaux des individus, comme la liberté d'expression, mais aussi de consacrer la primauté de la loi, le rôle crucial de l'éducation; qu'il n'y aura jamais de véritable égalité des chances sans que soient pleinement réalisés les droits sociaux. Or, quelles que soient soit la gravité des questions soulevées et la teneur des débats engagés, la démocratie semble avant tout réduite à une formalité électorale. La démocratie serait donc d'abord et avant tout le scrutin du 23 octobre qui permet de choisir les membres de la Constituante. La démocratie est aussi le droit des Tunisiens à choisir librement leurs représentants, sauf que, selon la configuration du paysage politique actuel, elle n'est nullement une valeur permettant de défendre le bien commun, car déliée de toute référence au progrès social. Dans ces conditions, la politique s'apparente exclusivement à un marché sur lequel s'affrontent des offres concurrentes destinées à satisfaire une demande politique. Le préalable de la culture politique démocratique est désormais consumé sous les impératifs du calcul rationnel et des mesures d'incitation qui s'y rattachent. Aussi, la scène politique est-elle réduite depuis à un ensemble de producteurs, les hommes politiques, ou qui se déclarent tels, et des consommateurs de biens, les électeurs. Les premiers offrent discours, slogans et bien sûr promesses à des électeurs éventuellement intéressés afin de gagner leur confiance et leurs voix. Il s'agit donc d'un marché concurrentiel pour prendre les parts de marché les plus importantes possibles et où les promesses des candidats ne peuvent dès lors s'apprécier qu'au regard de celles des autres candidats. Pour répondre au mieux aux demandes du marché, les politiques sont amenés à se positionner en développant leur style propre ou une image de marque pour occuper tel ou tel créneau commercial. Individus, mouvements et partis sont alors amenés à se spécialiser et à se démarquer, parfois à se regrouper, pour être les plus efficaces. Entre les uns et les autres s'interposent les médias et les sondages d'opinion permettant d'offrir une tribune indirecte aux consommateurs bien plus régulière. Lorsque la démocratie de marché se retrouve ainsi ramenée à une procédure électorale, elle comporte le risque de restreindre le jeu politique à une élite que favorise l'argent principalement, dont on ignore d'ailleurs la provenance, et nullement les idées ou l'expérience. Elle ravale le seuil de passage à la démocratie et détache le progrès démocratique de toute idée de progrès social.
A la veille du 14 janvier, la majorité des Tunisiens, sur des bases essentiellement de justice sociale, voulait la chute du régime de Ben Ali, devenu insupportable. Mais une fois cet objectif atteint, on découvre qu'il n'y avait consensus sur à peu près rien. On s'en rend compte aujourd'hui avec la profusion des discours et des partis. On s'en rendra compte davantage demain, car une fois les représentants à la Constituante désignés, rien n'exclut des trahisons, des perfidies, des travestissements, un retour en arrière, et peut-être l'amer constat que se débarrasser d'un tyran n'impliquait nullement la construction d'une démocratie.


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