«La justice transitionnelle, tout le monde en parle mais personne n'y va. Aujourd'hui et face au silence ou à l'absence de volonté de la part du gouvernement actuel et de l'ensemble des partis politiques, notamment ceux considérés comme les grands partis politiques, nous, représentants de la société civile, prenons l'initiative pour annoncer la création de la Coordination nationale indépendante pour la justice transitionnelle». C'est ce qu'a annoncé, hier, M. Amor Safraoui, membre du groupe des 25 avocats (connu pour avoir intenté des procès contre les symboles de l'ancien régime) lors d'une conférence de presse, tenue au siège du syndicat national des journalistes tunisiens en présence des autres membres fondateurs de la coordination représentant les organisations et les associations de la société civile. Quels sont les objectifs de la coordination et quel est son champ d'intervention? Les auteurs de cette initiative relèvent que «la Coordination constituera une institution nationale indépendante, à durée déterminée, qui aura pour mission de mener des investigations sur les violations des droits de l'Homme et sur les affaires de corruption et de malversation». Son action consistera à recevoir les témoignages sur les abus et les violations de tous genres, à écouter les victimes qui viendront raconter aux membres de la Coordination les violences et les actes de torture dont elles ont fait l'objet durant les 23 années de règne du président déchu. «La commission écoutera également les versions des tortionnaires et des auteurs des violations des droits de l'Homme qui viendront s'excuser auprès de leurs victimes et leur demander pardon». Des comités d'écoute Les fondateurs de la Coordination soulignent qu'elle vise à atteindre d'autres objectifs, à l'instar de la réforme des institutions de l'Etat, en particulier les systèmes judiciaire, sécuritaire, pénitentiaire et d'information et de la mise en place de mécanismes de contrôle des interventions de ces systèmes. Idem pour l'indemnisation totale des victimes au plan matériel et moral ainsi que leur réhabilitation et la présentation d'excuses officielles pour les violations dont ils ont souffert durant de longues années. Les organisateurs de la conférence vont plus loin en appelant à ce que les personnes «parmi les hommes politiques, les responsables et les agents d'exécution soient interdits d'occuper des postes de responsabilité au sein de l'Etat». Ils exhortent, d'autre part, le prochain gouvernement et les membres de l'Assemblée nationale constituante à promulguer, dans les plus brefs délais, un décret-loi portant création d'une instance indépendante pour la justice transitionnelle qui «bénéficiera du soutien logistique et matériel de l'Etat ainsi que l'appui des différentes composantes de la société civile». En attendant, la Coordination annonce la création de comités d'écoute et de réception de témoignages sur la corruption, et la violation des droits de l'Homme au cours de la période du régime déchu. Il est à préciser que l'adhésion à l'initiative relative à la création de la Coordination nationale indépendante pour la justice transitionnelle demeure ouverte à toutes les organisations et associations de la société civile qui partagent les principes sur lesquels est fondée la Coordination et qui désirent apporter leur contribution à la concrétisation de ses nobles objectifs.