Le ciné-club de Ciné Mad'art — nouvelle salle de cinéma située, comme son nom l'indique, au sein du centre culturel Mad'art à Carthage Dermech — a lieu tous les mardis à 19h00. Pour le 7 de ce mois, le choix a été porté sur le documentaire «Blagues à part» (54 mn, 2010) de la Française Vanessa Rousselot, projeté en partenariat avec Les caravanes documentaires. Dans le titre de ce film, rien n'augure qu'il s'agit de la Palestine, surtout pas le mot «blagues». Qui songerait, en effet, par ces temps, à consacrer une œuvre cinématographique à l'humour palestinien. La journaliste française, convertie cinéaste, l'a fait. Elle a pris son courage et sa caméra pour sillonner une Palestine morcelée et pour demander à ses habitants «connaissez-vous une blague palestinienne?». La première réponse fuse: «C'est notre situation tout entière qui est une blague» ou encore «quand nous serons libres, nous raconterons des blagues». Peu à peu, les langues se délient. Tout un patrimoine semble renaître de ses cendres. Et les blagues sont vraiment drôles. On découvre même ceux qui les archivent: ce vieil homme de Ramallah, gardien d'un humour né au cœur de l'Intifada; une dame âgée vivant seule à Naplouse et classant les blagues par année, sur des cahiers qui lui tiennent compagnie, en l'absence de chaleur humaine. La réalisatrice lui en apporte un peu à sa manière, notamment en prenant des cours d'arabe chez elle. D'ailleurs, «l'un les éléments de réussite de ce documentaire réside dans la volonté de Vanessa Rousselot à s'adresser aux gens dans leur langue», souligne Ikbel Zalila, critique de cinéma et animateur de Ciné Mad'art. Il a expliqué que sa démarche est née d'une bonne connaissance géographique de la Palestine, en plus de sa maîtrise du dialecte local. L'idée de faire un film sur l'humour palestinien ne peut venir, selon lui, que de quelqu'un qui a déjà été en immersion dans cet environnement particulier. C'est le cas de la réalisatrice qui a séjourné en Palestine, quatre ans auparavant. Dans son analyse du film, Zalila a également apprécié le juste équilibre qu'a trouvé Rousselot par rapport à son sujet. Sa position est évidente : ne pas tomber dans l'empathie. Pourtant, les maux des Palestiniens sont bien là dans ce road movie pas comme les autres. Comment faire autrement avec un peuple assiégé, composé à tous les points de vue, colonisation mise à part, d'êtres humains comme les autres.