Par Azza FILALI Depuis quelques semaines, l'ancienne Isie et son président, Kamel Jendoubi, font l'objet d'attaques ayant atteint le niveau d'une plainte déposée en justice et émanant du contentieux de l'Etat. Motif allégué ? Mauvaise gestion des fonds alloués à l'instance. En remontant le cours de cette affaire, on découvre une série d'anomalies édifiantes : la plainte a fait suite à la diffusion illégale d'extraits provenant d'observations, adressées à l'Isie par la Cour des comptes. De ces observations, des fragments (détachés de leur contexte) ont servi à confectionner un nouveau document, servant de chef d'accusation. Une accusation qui n'a pas attendu le rapport définitif de la Cour des comptes, lequel n'a pas encore vu le jour : jusqu'à présent, seul un rapport préliminaire a été transmis à l'Isie, le 4 décembre dernier. En somme, l'action menée en justice ne s'est basée sur aucun document officiel; bien plus, elle a utilisé des observations tronquées et divulguées de manière frauduleuse. Dans ce cas, en quoi réside le chef d'inculpation ? Il est important de signaler que l'Isie a fait état de sa gestion financière : en mai dernier, les états financiers de l'instance ont été publiés et soumis à la Cour des comptes. Celle-ci, dans son évaluation, a suivi la procédure en usage à l'égard d'administrations établies, ce qui n'était pas le cas de l'Isie, d'où le décalage entre les modalités habituelles de contrôle et la réalité de l'instance. Faut-il rappeler que l'ancienne Isie, créée dans l'urgence, à partir de rien, a travaillé dans l'urgence, sans infrastructure administrative et financière préétablie ! Son objectif prioritaire était d'organiser les élections et de les mener à bon port. L'objectif a été atteint et malgré erreurs et lacunes, la Tunisie a connu les premières élections démocratiques de son histoire. Pour ce résultat (immense), l'ancienne Isie mérite le respect des Tunisiens : l'exploit d'être parvenus à des élections libres et transparentes représente une fierté pour chacun de nous, un moment fort dans la construction de la Tunisie nouvelle. Pour ceux qui l'ont vécu, le 23 octobre 2011 était un jour de fête, la première fête citoyenne qu'ait connue notre pays. Ceux qui accusent aujourd'hui l'Isie et ses dirigeants ne réalisent pas qu'ils salissent leur propre histoire. Une société doit protéger ses acquis, c'est un devoir civique essentiel... sinon, comment apprendrons-nous à nos enfants à être fiers de leur pays ? Il est troublant de constater que la plainte déposée contre l'ancienne instance s'est accompagnée d'une campagne de dénigrement contre son président Kamel Jendoubi, campagne bien orchestrée dans les médias, et n'hésitant pas à utiliser les griefs les plus oiseux et les attaques les plus mesquines.... Que tout cela ait coïncidé avec le vote par l'Assemblée constituante de la loi créant la nouvelle instance n'est certainement pas le fait du hasard : quoi de plus efficace qu'une action en justice pour discréditer l'ancienne équipe et lui barrer le chemin de la future instance ! Mais, là encore, la citoyenneté en prend un coup : pour atteindre les hommes, voilà qu'on s'en prend aux institutions ! Celles-ci sont allègrement sacrifiées à la course effrénée au pouvoir...Mais les hommes passent, le pouvoir aussi; seule demeure la beauté des actes accomplis, ceux qu'une nation inscrit au registre de la mémoire collective et par lesquels elle fait l'apprentissage lent et laborieux de la démocratie. En vérité, de toutes ces manigances contre l'ancienne Isie et ses dirigeants, l'unique et grand perdant reste la Tunisie.