Ce n'est donc ni un écart de langage, ni une déclaration précipitée, le journaliste Zied El Heni ne compte pas se rétracter après ses déclarations fracassantes, vendredi, sur la chaîne privée Nessma. Intervenant sur la chaîne satellitaire, il dit avoir été informé par une source sécuritaire, lors des funérailles de Chokri Belaïd, que «le commanditaire de l'assassinat de Chokri Belaïd n'est autre que Mehrez Zouari, directeur général des renseignements généraux, récemment nommé à ce poste». Zied El Heni, journaliste au quotidien Essahafa Al Yawm, et par ailleurs membre du bureau exécutif du Snjt, a réitéré hier son appel au procureur de la République en vue «d'ouvrir une enquête sur la base de ces propos». «Ma déclaration est mûrement réfléchie. J'ai parlé comme un journaliste responsable de ses propos, et conscient de la gravité de la situation», confie à La Presse M. Zied El Heni, qui s'est présenté hier au Tribunal de première instance de Tunis, conformément à la convocation qui lui a été remise vendredi à sa sortie des plateaux de la chaîne privée. Le juge d'instruction du 13e bureau au Tribunal de première instance de Tunis a décidé de reporter l'audition au lundi 11 février 2013. «Malgré les multiples vices de forme au niveau de la convocation que j'ai reçue, je me suis présenté ce matin au Tribunal de première instance, mais j'ai trouvé les portes du tribunal closes», explique-t-il, sachant que les tribunaux observent une grève de 3 jours suite à l'assassinat de l'avocat et leader politique Chokri Belaïd. La source sécuritaire avait également révélé au journaliste que « Mehrez Zouari a recruté une vingtaine de jeunes, qui ne sont inscrits nulle part sur les bases de données du ministère de l'Intérieur (sans matricule)... et qui suivent un entraînement quotidien en arts martiaux et en tir». Zied El Heni s'est également expliqué sur le choix qu'il a fait de citer des noms en direct à la télévision, sans s'assurer de la véracité des faits, estimant que c'est une question de sécurité personnelle, dans un climat particulièrement tendu que vit la Tunisie. «Si je n'avais pas cité les noms, rien ne me garantissait d'arriver chez moi à ma sortie des plateaux de Nessma. N'oubliez pas que mon nom figure sur la liste des personnes à éliminer qui circulent ici et là», déclare-t-il. Il rappelle également que sa déclaration vient à la suite d'une série d'autres révélations concordantes, faites par un certain nombre de journalistes et de politiciens, et qui font état d'une relation ambiguë entre le parti Ennahdha et le ministère de l'Intérieur. En octobre 2012, le secrétaire général du Parti républicain, Ahmed Néjib Chebbi, avait déjà affirmé disposer «d'informations sûres concernant la présence de responsables du parti Ennahdha dans les salles d'opération du ministère de l'Intérieur et qui participent activement à la prise des décisions sécuritaires». Me Mohamed Laâbidi, avocat de Zied El Héni : « Nous appelons à l'audition de Habib Ellouze, Rached Ghannouchi et Samia Abbou » Me Mohamed Hédi Laâbidi, l'avocat de Zied El Héni, a indiqué que la convocation adressée à Zied El Héni «n'est pas conforme à la loi en vigueur», notant que «celle-ci n'émane pas d'un juge d'instruction, mais d'une direction annexe de la brigade criminelle». L'avocat a affirmé que le juge d'instruction auditionnera Zied El Héni demain à 10h00, «à titre d'information en présence de son avocat et non en tant qu'accusé, contrairement à ce qui a été dit». Et d'ajouter : «Nous, groupe d'avocats, avons invité le juge d'instruction à auditionner certaines parties relevant du mouvement Ennahdha, à la lumière des déclarations faites dans les médias en rapport avec l'affaire en cours, par notamment le constituant Habib Ellouze, le chef du parti, Rached Ghannouchi, le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Khaled Tarrouche, et le directeur général des services spéciaux au sein dudit ministère». «Nous avons, également, appelé le juge d'instruction à auditionner la constituante Samia Abbou pour ses récentes déclarations aux médias, accusant certaines parties d'avoir commis ce crime et susceptibles d'être prises en compte dans l'enquête».