Quand le président de la fédération place le débat sur un plan politique et ouvre la porte à tous les dangers Commençons d'abord par les faits. L'actuel président de la fédération, Wadii Jery, était un membre influent et important de l'ancienne fédération. Il n'est pas le seul dans l'actuelle. Et tout le monde sait que personne ne pouvait accéder à cette institution sans faire allégeance et sans l'accord de Slim Chiboub. Au sein de l'ancienne fédération, balayée par la révolution, Wadii Jery était le premier responsable de l'équipe nationale. Titres de gloire : double élimination au premier tour de la Coupe d'Afrique des nations et de la phase finale de la Coupe du monde. Démocratiquement élus depuis avec trois autres membres de l'ancien bureau, ils sont confrontés une année après à leur premier grand échec, une seconde élimination consécutive au premier tour de la Coupe d'Afrique des nations. Avec dans la foulée des scandales soigneusement camouflés par une enquête interne de la FTF qui a blanchi tout le monde. Au lieu de placer — enfin — le débat sur le plan footballistique et stratégique, pour une refonte de notre équipe nationale et de notre football en général, le bureau fédéral a jeté en pâture aux journalistes et à l'opinion publique la question de l'entraîneur. Scénario classique à la limite sauf qu'il y a un hic : les jeux étaient faits d'avance et la mise en scène n'a eu pour effet que d'envenimer l'ambiance. Le président de la fédération et ses proches collaborateurs ont placé le débat et la polémique sur un autre plan. Contre les journalistes qui ont fait leur boulot et qui n'ont pas été dupes, et contre le ... ministre qui a le droit d'exprimer un autre avis. De par son statut de bailleur de fonds de la FTF et de l'équipe nationale et sa légitimité d'unique Ballon d'or africain tunisien. Nous précisons bien cela car, à l'arrivée, le président de la FTF a bel et bien intronisé «son» candidat et ce n'est pas le présumé candidat du ministre qui a été imposé. Mais comme les médias n'ont pas lâché le morceau, qu'ils ont exigé et obtenu une enquête du ministère dont les résultats seront probablement publiés demain, et qu'ils n'ont pas apprécié la mise en scène dont ils ont été victimes, Wadii Jery, sans doute conseillé et appuyé par son sélectionneur et quelques autres membres, a voulu contre-attaquer en faisant acte de diversion. «Tant qu'à faire, je vais carrément pourrir l'affaire et la transformer en mauvaise polémique politique». Lettre ouverte à Rached Ghannouchi, président d'Ennahdha pour «dénoncer les pratiques illégales du ministre Tarek Dhiab». Nous voilà en présence d'une véritable pièce de vaudeville, presque tragi-comique... Mais plus sérieusement, nous voilà replongés dans le mauvais jeu de massacre sport-politique que nous avions tant exécré, haï et dénoncé... Pourquoi en est-on arrivés là ? Tout simplement parce que nous sommes revenus au vieux cycle infernal: échec, fuite de ses propres responsabilités, actes de diversion et création de coupables parfaits. Dans toute cette affaire, il y a eu élimination au premier tour de la CAN; départ du sélectionneur national ; purge concernant les joueurs coupables et des responsables fédéraux qui assument mais vont de l'avant. Or, les responsables fédéraux ne veulent pas assumer et, pis encore, veulent jeter leurs propres manquements sur d'autres : ministre et journalistes. A notre humble connaissance, ces derniers n'y sont pour rien dans cette mauvaise gestion. Le premier pour avoir appuyé financièrement et moralement l'équipe nationale; les seconds pour s'être mobilisés en faveur du onze représentatif. De ce fait, faire une diversion aussi sournoise et aussi dangereuse est une première insupportable parce qu'elle met tout le monde dans l'œil du cyclone : ministre, journalistes et même opinion publique. C'est non seulement dangereux pour le football, mais aussi pour tout le pays, déjà secoué par des problèmes autrement plus importants. C'est qu'il y a une question dangereuse qui se pose avec insistance : pourquoi le président de la FTF a adressé une lettre ouverte à Rached Ghannouchi, président d'Ennahdha, et non au chef du gouvernement dont dépend Tarek Dhiab? S'il a personnellement pris l'initiative de cette démarche, il en assume et il en assumera l'entière responsabilité. Mais s'il y a quelqu'un ou une partie derrière, notre équipe nationale (et pas seulement elle) en payera malheureusement le prix!