«Sans tomber dans la précipitation et sans plus tarder, nous allons propulser le processus de la justice transitionnelle», relève le président de l'ANC Pas de transition démocratique sans justice transitionnelle. Deux ans après avoir ratifié le traité de Rome, qui vise à mettre un terme à l'impunité en traduisant les responsables de certains crimes devant la Cour pénale internationale (CPI), le processus de la justice transitionnelle demeure bloqué. Faute de texte de loi, selon certains, et de consensus, selon d'autres. Dans cette perspective d'adaptation des textes de loi nationaux aux standards internationaux, une conférence internationale intitulée «La justice transitionnelle et la justice internationale dans le monde arabe: le traité de Rome et la Cour pénale internationale (CPI)» a été tenue, hier, à Tunis. Mme Fatou Bensouda, la procureure générale de la CPI, a été l'invitée de cette journée organisée par le centre Al Kawakibi et l'organisation «No Peace without Justice». Le ministre des Droits de l'Homme et de la Justice transitionnelle, M. Samir Dilou, s'est excusé de ne pas pouvoir assister à cette conférence en raison de sa participation aux débats portant sur la loi de la justice transitionnelle, à l'ANC. «L'ère de l'impunité est finie», a prévenu la procureure générale qui effectue sa première visite en Tunisie. La justice, explique-t-elle, est la résultante des efforts de la société civile, des partis politiques, de l'armée... «Tout le monde a un rôle à jouer», souligne-t-elle. Dans cette lignée, la CPI n'est que l'un des opérateurs de la chaîne de la justice internationale «qui a son rôle à jouer et qu'on ne doit pas harceler», rappelle-t-elle. Sur un autre plan, elle s'est attardée longuement sur les contraintes et les difficultés qui freinent les travaux des équipes de la CPI, à l'instar de la mission pour le District de Darfour. Le manque de réactivité et l'impunité, a-t-elle avancé, ont favorisé l'accentuation du rythme des crimes contre les civils. Dans ce cadre, elle a appelé à renforcer la coopération entre la CPI et l'ensemble des pays. A cet égard, elle s'est félicité de l'engagement du gouvernement libyen dans la modernisation de son cadre juridique. Pour sa part, M. Mustapha Ben Jaâfar, président de l'ANC, a rappelé que la justice transitionnelle ne se réduit pas à un texte de loi. Selon le président de l'ANC, la justice transitionnelle est un ensemble de mesures et de mécanismes judiciaires et autres qui vise à dédommager les victimes, et assure la non-reproduction de ces crimes. Dans ce cadre, les victimes ont le plein droit à prendre part des faits et de voir les auteurs des crimes traduits devant le justice. Par ailleurs, il précise que la justice transitionnelle est un moyen privilégié pour l'édifice d'un nouveau régime démocratique basé sur la justice et la primauté de la loi. «Sans tomber dans la précipitation et sans tarder, nous allons propulser le processus de la justice transitionnelle», rassure-t-il. Et d'ajouter : «La haute instance pour les élections serait fonctionnelle avant la fin du mois et les votes sur les lois de la constitution, une à une, seraient entamés au mois de juillet». A son tour, le fondateur du centre El Kawakibi, M. Mohsen Marzouk, a insisté sur le fait que la justice internationale ne se substitue pas à la justice nationale. «Mais les recoupements et les échanges d'expertises sont souhaitables», ajoute-t-il. Le processus de la justice transitionnelle, rappelle-t-il, se compose de la reconnaissance des faits, la reddition des comptes, le dédommagement ainsi que les réformes sur tous les plans, éducatif, policier... Et pour ce faire, la société civile est appelée à s'engager à apporter des propositions techniques et de mettre à contribution son expertise.