Sur le plan régional, c'est pour la première fois que le pays passe derrière ses concurrents directs, notamment le Maroc, la Jordanie et la Turquie La Tunisie réintègre le Rapport global sur la compétitivité de Davos 2013/2014, publié hier, après avoir été déclassée l'année dernière et occupé la 40e place en 2011. Avec un score de 4,06 sur 7, la Tunisie figure à la 83ème position sur une liste de 148 économies, soit une régression de 43 places, la plus importante du classement. Une conférence de presse a été tenue hier au siège de l'Institut arabe des chefs d'entreprise (Iace) pour présenter une synthèse de ce rapport de 569 pages. L'économie tunisienne occupe, désormais, le 9e rang au niveau des économies arabes et le 6ème sur le plan africain, derrière le Rwanda. Et sur le plan régional, c'est pour la première fois que le pays passe derrière ses concurrents directs, notamment le Maroc, la Jordanie et la Turquie. Prévisible, cette dégringolade est la conséquence directe, et logique, de la persistance de la crise politique, l'aggravation des fragilités macroéconomiques ainsi que la dégradation du climat social et sécuritaire. En effet, le recul de la note de la Tunisie n'a épargné aucune famille de piliers qui constituent la base du calcul de l'Indice général de la compétitivité, à savoir les piliers de base, les moteurs de développement ainsi que l'innovation et la sophistication du marché financier qui affichent respectivement un recul de 32, 30 et 36 positions. Il est à rappeler que ces trois familles comptent 12 piliers dont les institutions, l'infrastructure, la stabilité macro-économique, la santé et l'enseignement primaire, l'enseignement supérieur et la formation, l'efficience du marché des biens, l'efficience du marché du travail, la sophistication du marché financier, l'aptitude technologique, la taille du marché, la sophistication des affaires et l'innovation. Et ces piliers compilent 114 variables, dont 98 ont enregistré des baisses. Les hausses concernent six variables dont l'impact sur la compétitivité n'est pas direct, tel le taux de mortalité infantile. Analysant les variables les plus touchées, qui ont dépassé le 100e rang, de la première famille «les piliers de base», M. Faycel Derbel, président du Centre tunisien de la gouvernance d'entreprise, a mis l'accent sur le coût du terrorisme sur les affaires qui est passé de la 68e à la 137e position sur une liste de 148 pays. De même, le coût du crime et de la violence ainsi que du crime organisé a dépassé la barre de la centième place. L'infrastructure en recul de 29 points Parallèlement, la variable relative à l'efficacité des conseils d'administration des entreprises a été à la 124e position. «Ceci dévoile le problème de la gouvernance au sein des entreprises tunisiennes», avance le président du Ctge. A vrai dire, ce ne sont pas nécessairement les sit-in et les grèves qui sont à l'origine de la dégradation de la note de la Tunisie. La vague des fléchissements est bien visible sur le deuxième pilier «l'infrastructure», surtout pour la dimension portuaire qui a perdu 29 places. A cet égard, les experts présents ont pointé du doigt les performances du port de Radès qui représente l'une des principales faiblesses de la chaîne logistique. Par ailleurs, c'est le pilier de la stabilité macroéconomique qui a enregistré la plus forte régression de 58 places. La variable explicative de cette évolution est le déficit budgétaire, qui a reculé de 82 positions pour se placer au 117e rang. Inefficience des marchés S'attardant sur les deuxième et troisième familles de piliers, à savoir les moteurs de développement, telles que l'innovation et la sophistication, M. Walid Bel Hadj Amor a rappelé que la dégradation est due principalement aux piliers de base de la première famille, mais les écarts enregistrés au niveau des moteurs de développement sont plus complexes à traiter. Il a fait ressortir en premier lieu la contreperformance de 30 positions constatée au niveau de la variable relative à la qualité du système de l'enseignement, ainsi que les 42 places de perdues au niveau de l'accès à internet au niveau des établissements universitaires. Dans la même lignée de la dégradation des variables de la première famille, notamment le terrorisme et le crime organisé, l'expert montre que la prolifération conséquente de la contrebande et du marché informel ont gravement sanctionné l'efficience du marché domestique des biens qui a régressé de 44 places. Avec la bureaucratie et l'étendue de la taxation, le marché national est de moins en moins attractif pour les investisseurs qui compte s'installer sous nos cieux. Sans aucune surprise et « en attendant des réformes qui ne viennent pas », selon M. Bel Hadj Amor, le marché financier demeure inefficient aux yeux des investisseurs. La variable de sophistication du marché financier a accusé une perte de 34 places. De même, pour le marché de travail, on occupe la 132e place. La problématique de la productivité, ajoute-t-il, pèse encore lourdement sur la qualité et la cadence de la production des entreprises. «Les entreprises trouvent encore du mal à attirer les talons», martèle-t-il. Pour ce qui est de l'aptitude technologique, l'expert rappelle la faible maîtrise des technologies et des process. «L'économie tunisienne est positionnée à un niveau très bas de la chaîne de valeur», conclut-il.