Finie la politique budgétaire expansionniste A défaut d'un plan quinquennal qui trace la stratégie économique et sociale du pays à moyen terme et d'un espace de dialogue qui remplace l'ancien Conseil économique et social, il serait miraculeux pour un gouvernement de transition et démissionnaire de confectionner une loi de finances dans les délais et au goût de tous les agents économiques. En effet, l'actuel projet de de loi de finances 2014 est loin de faire l'unanimité. Les répercussions des mesures prévues dans cette première version sur l'activité des entreprises ont motivé la Conect à organiser une conférence pour lancer un débat entre les entrepreneurs, d'une part, et, de l'autre, les autorités financières représentées par Elyes Fakhfakh, ministre des Finances, et Chedly Ayari, gouverneur de la BCT. Selon Tarak Chérif, président de la Conect : « La recherche de l'alimentation des recettes budgétaires par des mesures fiscales ne fait que compliquer davantage le système fiscal et augmenter la pression sur les entreprises; ce qui pourrait encourager l'évasion fiscale et motiver certaines entreprises à s'orienter vers les circuits parallèles ». De même, certaines mesures, à l'instar de l'imposition des bénéfices des entreprises exportatrices et des dividendes sont de nature à dissuader les investisseurs, étrangers et domestiques. Vers l'augmentation des prix du carburant A cet égard, le ministre des Finances a déploré la faible contribution des entreprises dans les recettes budgétaires. « Seulement 20% des entreprises payent l'impôt sur les sociétés », déclare-t-il. 40% des sociétés se déclarent déficitaires et 40% relèvent du régime off shore. Et pour les entreprises qui payent, « 60% payent le minimum d'impôts », rappelle-t-il. Et d'ajouter : « C'est pour cela qu'on a prévu la révision à la hausse du minimum d'impôt, qui avoisinerait 0,3% du chiffre d'affaires ». Sans parler des activités qui échappent à toute imposition, notamment le secteur informel, estimé entre 30 et 50% de l'activité économique. Le gap des recettes se traduit nécessairement par des dérapages au niveau du déficit budgétaire et le taux d'endettement. Pour la maîtrise de ce déficit qui n'a cessé d'évoluer depuis la révolution, le projet de loi prévoit des mesures pour comprimer les dépenses de fonctionnement de 1,3% contre une révision à la hausse des dépenses de développement de 16,5%. Pour la première famille des dépenses, une étude a été élaborée pour assister les entreprises énergivores à réaliser leur transition énergétique. De même, « il faut passer d'un système de subvention généralisé à un autre qui cible les couches les plus défavorisées». A ce titre,une taxe sur les automobiles de 50 à 700 dinars, selon la puissance fiscale, est prévue pour 2014. Par ailleurs, « il est obligatoire d'augmenter le prix des carburants », rappelle-t-il. Une mesure nécessaire pour limiter les dépenses de compensation qui ont évolué de 300%, ces dernières années. Pour ce qui est dépenses de développement, la bureaucratie, les problèmes financiers et l'inefficacité des structures régionales ont limité à 11% l'évolution de l'enveloppe allouée à ce titre. En somme, la politique budgétaire expansionniste, adoptée depuis la révolution, a profité principalement aux dépenses de fonctionnement. « L'année 2014 marquera la fin de ce cycle », précise le ministre. En 2014, le budget de l'Etat évoluerait de seulement 2,3%, par rapport à 2013. Pour sa part, Chedly Ayari, gouverneur de la BCT, a souligné que les lois de finances demeurent l'unique outil des autorités pour répondre aux besoins sociaux pressants et faire face aux chocs exogènes, qui pèsent de plus en plus lourd sur le pays. Cet outil, rappelle-t-il, s'inscrit dans le cadre de la réalisation d'un plan quinquennal qui figure lui aussi dans le cadre d'une vision stratégique de long terme. A défaut, les autorités seraient obligées de concevoir les lois de finances sur la base des contraintes et des visées court-termistes. Toute lecture critique de ce projet, selon le gouverneur, devrait évaluer les mesures, selon plusieurs « commandements » qu'il a répertoriés en quatre chapitres : la lutte contre les dérives budgétaires, le rôle de l'entreprise dans ce projet, le bien-être des citoyens et la transparence.