L'assassinat de deux journalistes français de RFI revendiqué par Aqmi et les menaces persistant sur les intérêts de l'Occident en Tunisie pourraient — si ce n'est déjà fait — pousser des forces étrangères à s'amener dans nos murs «Une enquête a été diligentée avec célérité. Des opérations et des fouilles ont déjà eu lieu, et les investigations progressent», a annoncé le président français, au terme de la réunion du Conseil des ministres tenue mercredi dernier, et Hollande d'ajouter sur un ton plus ferme : «Nous ferons tout pour retrouver ceux qui ont commis ces actes et les sanctionner». Ces propos, qui ont tout d'une déclaration de guerre, survenaient au moment où des policiers français atterrissaient au Mali, pour participer à la recherche des auteurs de ce double assassinat, dans le cadre d'une enquête confiée conjointement à la Dcri (Direction centrale du renseignement intérieur) et à la Sdat (Sous-direction antiterroriste). Jusqu'ici, c'est du déjà-vu dans tout pays secoué par un attentat terroriste. Mais le plus important est de savoir que l'enquête française pourrait, mine de rien, toucher le sol tunisien. Et cela pour, au moins, deux raisons, à savoir : 1- Le double assassinat des journalistes français a été revendiqué par Aqmi (Al Qaïda au Maghreb islamique) de Abdemalek Droukdel dont les ramifications, par groupuscules interposés englobent — on le sait – l'Afrique du Nord dont la Tunisie où, selon une source sécuritaire bien informée, les auteurs de cet assassinat, conduits par un certain Abdelkrim Al-Targui (un proche de Droukdel), pourraient avoir trouvé refuge. 2- L'on sait aussi, de l'aveu même de certains services secrets occidentaux, que les acolytes d'Aqmi, de plus en plus nombreux, sévissent sur le territoire tunisien où ils continuent de bénéficier de renforts (en hommes et en armes) venant d'Algérie, de Libye, du Niger, de Somalie, du Yémen et justement du Mali, sans compter les revenants de Syrie. Par ailleurs, les dernières nouvelles parvenues de Paris font état d'«une très grande détermination française à relever le défi». Qu'on en juge : – Envoi d'équipes d'enquêteurs au Mali – Renforcement de la présence militaire dans la région de Kidal (lieu de l'assassinat des deux journalistes) où pas moins de 150 soldats français seront redéployés. – Renforcement des renseignements avec les pays de la région, dont la Tunisie. De surcroît, les Français ne sont pas sans savoir que les menaces terroristes qui planent sur leur pays sont loin de faiblir, comme en attestent : – Le communiqué de revendication d'Aqmi est tellement virulent et inquiétant qu'on y lit notamment que «la mort des deux journalistes ne constitue qu'une petite partie du prix que François Hollande et le peuple français auront à payer pour l'intervention lancée en janvier au Mali par l'armée française pour stopper la progression des islamistes armés». - L'insurrection islamiste fait encore de la résistance au Mali, en dépit des revers qu'elle avait essuyés. - Les insurgés jihadistes sévissant au Mali continuent de tirer profit de la perméabilité des frontières de ce pays avec la Libye et l'Algérie pour redoubler de navettes capables de les conduire jusqu'en...Tunisie. L'Oncle Sam s'en mêle Pour des médias français, l'assassinat des deux journalistes est venu à point nommé, pour réchauffer la coopération sécuritaire avec les Etats-Unis. Une coopération qui a fait la preuve de son efficacité lors de la dernière intervention militaire de la France au Mali où les drones américains ont été d'une grande utilité. L'Oncle Sam, déjà assez actif aux frontières entre la Tunisie, la Libye et l'Algérie, interviendra-t-il également dans le cadre de la traque lancée contre les assassins des deux journalistes français? Bref, y aura-t-il bruit de bottes occidentales à nos frontières ? Coopération secrète Si les ambassades américaine et française, contactées par nos soins, n'ont pas pipé mot là-dessus, et c'est franchement «excusable» et compréhensible, s'agissant d'une affaire top-secret où la confidentialité est stratégique, il n'en demeure pas moins vrai que la coopération sécuritaire avec ces deux pays, les menaces terroristes aidant, s'est nettement renforcée, ces jours-ci, aussi bien avec le FBI, et la CIA, côté américain, qu'avec la Dgse (Direction générale de la sécurité extérieure), la DST (Direction de la surveillance du territoire) et l'Uclat (Unité de coordination de la lutte antiterroriste), côté français.