Nous avons reçu la tribune suivante de l'Ambassadrice de l'Union européenne en Tunisie, Mme Laura Baeza, à l'occasion de la Journée internationale des droits de l'Homme Le 10 décembre 1948, au sortir de la Seconde Guerre mondiale et à l'aube de la Guerre froide, l'Assemblée générale des Nations unies adoptait la Déclaration universelle des droits de l'Homme. C'est l'anniversaire de cette déclaration, clé de voûte des démocraties modernes depuis 1945, que nous célébrons aujourd'hui, quelques jours après la disparition de Nelson Mandela, sans tristesse toutefois car sa vie tout entière dédiée à la réalisation d'un monde meilleur et plus égalitaire est un juste combat qui lui survivra. Depuis sa création, l'Union européenne accorde une importance capitale au respect et à la promotion des droits de l'Homme. Dans sa déclaration publiée à l'occasion de cette journée internationale, Mme Catherine Ashton, Haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, réitère avec force la position de l'Union européenne en faveur des droits de l'Homme, de la démocratie et de l'Etat de droit, fil conducteur de la diplomatie de l'UE et de ses relations extérieures. Nous fêtons aussi le 20e anniversaire de la conférence mondiale sur les droits de l'homme de Vienne. Près d'un demi-siècle après l'adoption de la Déclaration universelle, la conférence soulignait que le respect des droits de l'Homme demeurait une exigence pour chacun. Par la «Déclaration et le programme d'action de Vienne», la Conférence opérait une fusion entre les différentes dimensions des droits de l'Homme. Il ne faut ni hiérarchiser, ni artificiellement distinguer les «droits civiques» des droits économiques, sociaux ou culturels, car «tous les droits de l'Homme sont universels, indivisibles, interdépendants et intimement liés». La Déclaration souligne également le lien intangible entre démocratie, droits de l'Homme et développement. En 2012, l'Union européenne a adopté une stratégie pour les droits de l'Homme visant à renforcer l'efficacité et la cohérence de son action. En désignant Stavros Lambrinidis «représentant spécial pour les Droits de l'Homme», l'UE met un visage sur cette politique essentielle. Par-delà les lignes directrices que sont la lutte contre la peine de mort et la torture, l'action de l'UE se concentre aujourd'hui sur la non-discrimination et la protection des libertés, notamment les libertés d'association, de religion, ou encore d'information. En 2011, le Printemps arabe voit les peuples d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient refuser en masse l'arbitraire et la corruption érigés en mode de gouvernance. Cette révolution donne l'occasion historique à l'Union européenne et à la Tunisie de renouveler leur partenariat. Si l'action — essentielle — en faveur de la croissance économique demeure, l'UE est désormais aux côtés de la Tunisie pour l'accompagner dans ses réformes démocratiques et la construction d'un Etat de droit. Trois ans après, en Tunisie et ailleurs, la tâche à accomplir reste immense. Les réformes se mettent lentement, parfois difficilement en place. Mais l'Union européenne continue d'apporter tout son appui afin que cette transition vers la démocratie, qui implique des bouleversements de grande ampleur au sein des sociétés concernées, se passe le mieux possible. Il s'agit, dans le contexte de crise que connaît l'Europe, d'un mouvement remarquable de solidarité envers ses voisins du sud de la Méditerranée. Dans le cadre de cette politique, l'Union européenne et les autorités tunisiennes ont défini ensemble un partenariat privilégié et se sont entendues sur un nouveau plan d'action. Ce plan fixe les axes prioritaires renforçant les relations entre les parties à tous les niveaux : politique, économique, scientifique, social et culturel. Parmi les douze grandes priorités du Plan d'action, la moitié concerne l'Etat de droit, la démocratie et les droits fondamentaux. Mais ces six priorités sont au cœur de l'actualité politique tunisienne ! Mise en place d'un système électoral démocratique par la consolidation de la nouvelle Instance supérieure indépendante pour les élections, indépendance de la justice et amélioration de son efficacité, lutte contre la torture, lutte contre toute forme de discrimination pour promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes, respect de la liberté d'expression, d'association et d'assemblée, renforcement du rôle et des capacités de la société civile. Ce plan d'action est ambitieux, mais il est à la mesure des défis auxquels la Tunisie est confrontée. C'est parce que les droits de l'Homme avaient gagné le cœur des Tunisiens que le Printemps arabe a été possible. Il appartient aujourd'hui à ceux qui ont la lourde responsabilité de finaliser la Constitution qui garantira les droits et les devoirs de chacun, ainsi que les devoirs de l'Etat envers les citoyens, de se montrer à la hauteur de l'enjeu historique et de mettre en phase les convictions des Tunisiens avec la loi fondamentale.