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«Il faut avoir l'engagement profond d'être un entrepreneur»
Entretien avec Sadok Bejja, D.G. au Ministère de l'Industrie
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 01 - 2000

Sur les caractéristiques de l'entrepreneur et les différentes étapes du processus entrepreneurial dans le domaine industriel, nous avons interviewé M. Sadok Bejja, D.G. de la Direction générale de promotion des petites et moyennes entreprises auprès du ministère de l'Industrie.
Sa lecture de ce processus nous permet d'identifier les facteurs qui l'influencent et, également, de tirer certains enseignements.
Tout d'abord, que diriez-vous à un jeune futur promoteur sur le processus entrepreneurial ?
Le processus entrepreneurial est un processus assez laborieux, compliqué et toujours miné par beaucoup d'imprévus et de difficultés à ses différents stades. Le futur promoteur doit être réellement conscient, depuis le début, des complications qui peuvent survenir à n'importe quelle phase de ce processus. La création d'une entreprise nécessite beaucoup de patience et surtout beaucoup de persévérance.
Le futur entrepreneur est un acteur agissant dans le processus entrepreneurial. Avec la montée du chômage et afin de le résorber, il y a presque une décennie on a incité les jeunes à entreprendre. Est-ce que toute personne peut réussir le processus entrepreneurial et devenir entrepreneur ?
Ne peut devenir entrepreneur qui veut. L'entrepreneuriat est un métier. Toutefois, on peut affiner nos compétences et améliorer nos qualifications à travers d'éventuelles formations ou des opérations de coaching pour devenir un très bon entrepreneur. L'entrepreneuriat n'est pas un refuge. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas trouvé de travail ou parce qu'on est au chômage depuis longtemps qu'on se lance dans l'entrepreneuriat. C'est l'erreur fatale qu'il faut éviter. Et c'est une désorientation des jeunes lorsqu'on leur transmet cette idée. On a un grand problème au niveau de la promotion de la culture entrepreneuriale. Il faut sensibiliser les jeunes dès le début.
Dans une population de jeunes, il y a ceux qui ont la prédisposition de devenir entrepreneurs et y a d'autres qu'on découvre —après des entretiens avec les structures d'appui— et qui découvrent eux-mêmes qu'ils ne peuvent pas être entrepreneurs.
Le processus entrepreneurial est miné par des imprévus. Chaque éventuel entrepreneur suivra un processus entrepreneurial qui lui est propre, mais il y a un modèle de processus qui se profile des différents processus entrepreneuriaux. Selon vous, quelles seraient les différentes phases de ce modèle de processus entrepreneurial dans le secteur industriel ?
Le processus entrepreneurial peut être scindé en trois grandes phases essentielles et qui se complètent, à savoir : la phase étude qui englobe toute la phase d'élaboration du business plan, la phase recherche de financement et la phase démarrage de l'exécution du projet. Chacune de ces phases est aussi importante que l'autre.
La phase business plan englobe trois composantes : la partie humaine qui se trouve dans la présentation du promoteur et de ses associés et de leurs qualifications, la partie étude de faisabilité et la partie ancrage du projet dans son environnement.
Pour entamer un business plan, il faut tout d'abord avoir l'engagement profond d'être un entrepreneur. Cet engagement doit être inné, mais on peut le développer et cultiver à travers les cycles de formation assurés par les différentes structures d'accompagnement, tels les espaces Entreprendre, les pépinières d'entreprises et les centres d'affaires ou encore à travers des associations de la société civile qui s'intéressent à l'entrepreneuriat et au développement de la culture entrepreneuriale chez les jeunes. Il faut également que le futur entrepreneur prenne un moment d'observation pour arrêter son idée de projet. Cela ne doit pas être fait d'une manière arbitraire, mais dépendant d'un certain nombre de facteurs endogènes et exogènes à l'entrepreneur lui-même. Les facteurs endogènes sont sa qualification et sa connaissance de l'activité dans laquelle il veut se lancer et ses capacités financières. Les facteurs exogènes, ce sont surtout l'environnement de l'entreprise qu'il va créer et l'environnement macroéconomique du pays (les compétences existantes, le marché visé...). L'entrepreneur peut recourir à un coach pour affiner encore plus son idée de projet, mais il doit être un vrai militant pour chercher l'information dont il a besoin (chercher à connaître ses concurrents, la capacité d'absorption du marché, les exigences du consommateur, etc.).
Une fois l'idée arrêtée, il passe à l'élaboration proprement dite du business plan. Généralement, on commence par l'étude de faisabilité. Celle-ci contient trois parties fondamentales : une partie technique, une partie financière et une autre commerciale. Pour la partie technique, le futur promoteur est censé être le mieux à la connaître. Peut-être pourrait-il avoir besoin d'un expert pour affiner avec lui le procédé de fabrication. Peut-être devrait-il commencer à consulter des fournisseurs d'équipements ou des ingénieurs ou encore suivre des cours de technologies s'il n'est pas un technologue. Dans cette partie technique, il commence à se faire une idée sur la capacité de production.
Une fois le procédé de fabrication clair, il va arrêter ses besoins financiers. Si l'on peut faire tout seul la partie technique, il est préférable que l'on fasse appel à un coach pour faire la partie financière. A priori, les structures d'appui peuvent accorder un minimum d'assistance en matière d'élaboration du business plan.
On arrive ensuite à la partie commerciale. Celle-ci est généralement négligée par la plupart des promoteurs au niveau de leurs business plans, alors qu'elle est aussi importante que les deux autres parties. Les futurs entrepreneurs se heurtent souvent à deux points essentiels dans cette partie commerciale : l'identification des besoins en fonds de roulement et la différenciation du produit par rapport à la concurrence. Il vaut mieux pour tout promoteur, même s'il travaille avec un produit classique, essayer de le différencier par rapport à la concurrence, dans le cadre de sa politique commerciale. Il peut le différencier par le prix, l'emballage, la politique d'approvisionnement, la politique du commerce de proximité, etc.
La partie financière permet d'évaluer le schéma de financement du projet (crédit bancaire et fonds propres), alors que la partie commerciale permet d'identifier les besoins en fonds de roulement, la forme finale du produit (design, forme, poids, couleur, etc.) et la campagne de communication à faire.
L'entrepreneur doit travailler les trois parties technique, financière et commerciale en vases communicants. Il va ajuster ces trois parties et les adapter pour trouver l'équilibre entre elles.
De cette étude de faisabilité, on va tirer un certain nombre d'enseignements, dont essentiellement la détermination du schéma de financement permettant d'atteindre le seuil de rentabilité acceptable, le choix du lieu d'implantation du projet (zone de développement régional, à proximité d'une zone urbaine, etc.) et, pour un produit à pénétration difficile, la possibilité de chercher un associé ou un partenaire ou encore de travailler sous licence ou en sous-traitance.
Il est à noter que le business plan est un équilibre fragile d'un certain nombre d'éléments. Il est fragile parce qu'il est lié à un environnement variable (le taux de change et le prix des matières premières, à titre d'exemple, peuvent varier). La compétence du promoteur, un bon financement et un marché maîtrisé sont le trépied de cet équilibre. La plupart des jeunes ont un problème de financement auprès des banques. Ce problème est partagé du côté du promoteur et du côté bancaire. Si le promoteur présente un bon business plan, il n'aura pas de difficulté à avoir le financement de la banque, mais s'il se présente à la banque pas trop convaincu de son idée de projet, s'il se présente avec un business plan n'ayant aucune visibilité, ni commerciale, ni technique, ni financière et s'il se présente en ne connaissant même pas le contenu de son business plan ou avec un projet répétitif, c'est tout à fait normal qu'il aura des difficultés auprès de la banque. On peut améliorer le business plan, mais ce qui constitue un problème, c'est surtout l'engagement du promoteur que va tester le banquier. Le promoteur qui n'a pas cet engagement n'arrive pas à défendre son projet. Et ici, il y a un grand travail qui doit être encore fait par le promoteur et surtout par les structures d'appui. Malheureusement, aucune de ces structures n'essaye d'assurer le rôle qui lui est assigné de la façon la plus idoine qui soit. En ce qui concerne le côté bancaire, malheureusement, les banques, excepté la BFPME qui est dédiée au financement de la PME et une autre banque privée, sont de simples commerçants d'argent. Presque aucune banque en Tunisie ne dispose d'un service pour les nouveaux promoteurs et une cellule pour la PME, excepté les deux banques citées. Auprès de ces banques, le promoteur se dirige à la cellule direction des crédits. Malheureusement, jusqu'à maintenant, la banque en Tunisie ne se considère pas comme un vrai partenaire. Le rôle d'une banque, c'est de financer l'économie, et le pilier de l'économie tunisienne, ce sont les PME. La BFPME ne peut pas financer toutes les PME du pays. Pendant des décennies, ces banques ont travaillé avec un principe de garantie réelle. Elles travaillent avec une culture conservatrice. Pour tout ce qui est projet innovant, cela nécessite des compétences qui peuvent l'évaluer et ces banques ne sont même pas capables d'évaluer un projet innovant. Elles s'orientent sans se rendre compte vers des projets classiques et ayant des garanties réelles. C'est notre problème réel de financement de la PME en Tunisie. Le système bancaire n'a pas essayé d'évoluer dans le sens d'assurer l'opération d'assistance et d'encadrement d'un jeune promoteur et de jouer réellement le rôle de partenaire stratégique de l'économie et surtout de partenaire stratégique pour le promoteur.
Supposons que le business plan a été bien élaboré et qu'il a eu la chance de boucler son schéma de financement. Le futur promoteur va commencer la réalisation de son projet. Sur le plan réglementaire et s'il va demander des avantages quelconques que l'on accorde dans le cadre du code d'incitations aux investissements, c'est à travers la Sicar ou la banque que doit être adressée la demande de ces avantages et qu'il doit avoir la décision d'octroi d'avantages. A partir du jour où il a eu cette décision, il peut entamer l'exécution de son projet. Il va commencer par la partie juridique et constituer officiellement sa société (auprès du guichet unique). Dans la phase de réalisation de son projet, le promoteur doit faire attention aux dépassements. La plupart des projets trouvent des difficultés au niveau de deux choses et qui sont liées : les délais et les dépassements du montant de l'investissement. Dans la plupart des cas, le non-respect des délais est dû à une difficulté au niveau de l'acquisition du terrain, au dépassement de l'échéance de la promesse de vente obtenue auprès de l'Agence foncière industrielle (AFI) et à son non-renouvellement, à un terrain non encore disponible au niveau de l'AFI ou encore à un désaccord de dernière minute avec l'associé.
Un bon entrepreneur, qui réussit le processus entrepreneurial, doit être éveillé. Ceci relève de ses compétences et de son profil. Toutefois, la culture entrepreneuriale y a son rôle. Qu'est-ce qui fait défaut à son enracinement en Tunisie ?
La culture entrepreneuriale en Tunisie n'est pas très développée. L'enseignement est resté toujours le bon moyen pour avoir un bon travail que ce soit dans la fonction publique ou dans le secteur privé. Malheureusement, les mécanismes de promotion de la culture entrepreneuriale sont restés très limités et plus évènementiels que structurels. A mon avis, la culture entrepreneuriale est une culture très profonde. Notre système éducatif doit changer. Il faut inculquer auprès des jeunes la culture de la créativité et il faut abandonner la culture de l'apprentissage francophone et s'orienter vers la culture de la créativité anglo-saxonne. Il faut orienter davantage notre système éducatif vers la créativité qui ne peut être qu'à travers l'interactivité et non pas à travers le diktat. C'est une restructuration profonde et un processus de long terme.
Les structures d'appui existantes devraient inculquer cette culture chez les jeunes. Qu'est-ce qui les empêche de jouer pleinement leur rôle ?
Nous sommes en train de multiplier des structures d'appui que ce soit au niveau central (API, APIA, ONTT, AFIPA, etc.) ou au niveau régional (pépinières d'entreprises, centres d'affaires, espaces Entreprendre, offices de développement, etc.), mais on ne leur donne pas les moyens. Les pépinières n'ont pas de budget et elles n'existent même pas dans l'organigramme de l'API. Le centre d'affaires n'a pas de budget et il n'a pas d'organigramme ni de tutelle. C'est une structure hybride, ni publique ni privée. On lui accorde une petite prime, une dotation. Généralement, dans chaque centre, on travaille avec deux cadres, des fois, n'ayant aucune qualification en entrepreneuriat. Il faut faire une refonte profonde de ces structures d'appui et notamment des structures de proximité parce qu'elles ont un rôle très important, un rôle de locomotive, pour développer la culture entrepreneuriale au niveau régional (centres d'affaires, pépinières d'entreprises et espaces Entreprendre). Il faut faire un recadrage profond, un renforcement de moyens humains et matériels et pourquoi pas une fusion pour créer une structure ayant la taille critique suffisante et qui soit capable de mettre en place des programmes et des opérations de coaching.
Au niveau du code de l'investissement, il a été mentionné le principe de la haute instance de l'investissement ayant des représentations régionales (entités régionales représentatives). Serait-ce une fusion entre ces structures ? Est-ce qu'il y aurait une opération de coordination ? Le comment de cette instance sera déterminé suite à une étude.


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