Aussitôt la liste des candidats à la direction de l'Instance vérité et dignité révélée, les mécontents se préparent à s'y opposer La commission de sélection des candidats à l'Instance vérité et dignité a fini par livrer, vendredi soir, la liste des 15 membres qui devraient diriger l'instance pour les quatre années à venir, et ce, au cas où ils seraient cooptés par les constituants lors d'une séance plénière et au cas où les oppositions qui seraient introduites contre leurs personnes seraient jugées irrecevables. Et, comme l'on s'y attendait, les associations de la société civile spécialisées dans l'observation du processus de la justice transitionnelle ont fait savoir que la liste publiée sur le site web de l'ANC comprend deux candidats qui ne répondent pas aux conditions prévues dans la loi organique portant création de l'Instance vérité et dignité. Il s'agit en premier lieu de Khemaïs Chamari, dont la candidature a déjà provoqué la polémique. «Au sein du Réseau tunisien pour la justice transitionnelle, nous considérons que la candidature de Khemaïs Chamari devrait être récusée par la commission de tri, pour la simple raison qu'il a occupé au début des années 90 la fonction de député. La loi est là-dessus claire et précise : les députés des divers parlements ayant fonctionné sous Ben Ali ou Bourguiba sont interdits de siéger au sein de l'instance», confie à La Presse le Dr Kamel Gharbi, président du réseau. Il ajoute : «Tout en reconnaissant le passé militant de Khemaïs Chamari, le Rtjt va s'opposer à sa candidature qui est contraire à la loi». Le deuxième candidat retenu et dont le nom suscite la réprobation des mêmes associations est l'avocat Khaled Krichi, président de l'Association tunisienne de soutien aux prisonniers politiques. «Me Krichi a occupé des fonctions de responsabilité au sein du parti Echaâb avant de le quitter. En acceptant sa candidature, la commission de tri a enfreint la loi qui précise que quiconque a assumé une responsabilité au sein d'un quelconque parti politique, avant ou après la révolution, ne peut être en aucun cas membre de l'Instance vérité et dignité», précise une source auprès des associations représentant les victimes de la répression (deux représentants de ces associations sont autorisés, selon la loi, à siéger au sein de l'instance) qui s'apprêtent à s'opposer, auprès de la commission de tri, à la présence de Me Krichi sur la liste des 15. Les procédures à respecter Maintenant que les jeux sont faits et que la commission de tri présidée par Mustapha Ben Jaâfar, président de l'ANC, a fait nes choix, que peuvent faire les mécontents parmi les candidats récusés ou les associations spécialisées ? Une source juridique relève : «Les oppositions sont ouvertes dès la publication de la liste des 15 et durent sept jours. Elles peuvent être introduites par les candidats déboutés, les associations spécialisées et même par les citoyens ordinaires qui considèrent que telle ou telle candidature n'est pas conforme à la loi. La commission de tri dispose d'une semaine pour examiner les oppositions et y statuer. Au cas où l'une des oppositions serait jugée sérieuse, la commission est en droit de récuser le candidat en question et le remplacer par un autre». La même source fait remarquer qu'il faut attendre encore «au moins 15 jours pour qu'on parvienne à une liste de candidats qui seront soumis au vote des constituants lors d'une séance plénière». La liste des 15 La commission de tri des candidatures à l'Instance Vérité et Dignité est parvenue vendredi à un consensus sur la liste définitive des membres. La liste définitive annoncée par Chokri Kastli, membre de la commission de tri, se compose de: – Mohamed Salah Ben Salem, Mohamed Ayadi, Azzouz Chawali, Oulaâ Ben Nejma, Mustapha Baâzaoui, Ali Ghrab, Slaheddine Rached, Noura Borsali, Adel Maïzi, Hayet Ouertani, Khaled Krichi, Zouhaïr Makhlouf, Ibtihel Abdellatif, Sihem Ben Sedrine, Khemaïs Chammari. La liste sera soumise à l'Assemblée nationale constituante (ANC) pour approbation, probablement au cours de la semaine prochaine, a indiqué Kastli.