Au moment où l'île italienne de Lampedusa commençait à être soulagée de la présence envahissante des immigrés clandestins, de nouveau les harragas pointent la proue de leurs barques sur la petite île italienne. En témoigne la macabre découverte de dizaines de corps venant s'échouer au large des côtes de la ville de Ben Guerdane et dont la majorité sont syriens Ces exodes ne sont plus, selon le Forum des droits économiques et sociaux (Ftds), « l'œuvre privilégiée de la pauvreté et des conditions sociales difficiles dans le sud de la Méditerranée, mais reviennent aussi à la fragilité de la situation sécuritaire et aux guerres civiles qui ont prévalu dans de nombreux pays, comme la Syrie et la Libye ». En effet, selon le dernier rapport de l'agence Frontex, le flux migratoire « continue de doubler de nombre en passant de 10 mille en 2012 à 31 mille en 2013 pour dépasser en 2014 le seuil des cinquante mille ». Une telle annonce coïncide avec la commémoration, il y a une semaine, du deuxième anniversaire de la tragédie de Lampione et la disparition mystérieuse de nos enfants. En effet, la souffrance des familles de harragas, restées sans nouvelles depuis que leurs enfants ont mis les voiles vers l'Italie, le 6 septembre 2012, est une « omerta de la part des gouvernements qui se succèdent sans que cela puisse apporter l'appui requis et le soutien convoité afin de faire la lumière sur le sort de leurs enfants », souligne dans un communiqué Abderrahmen Hedhili, président du Ftds, En effet, le mystère reste entier sur cette affaire. C'est pourquoi, le Ftds réitère son appel à créer une « commission d'enquête mixte œuvrant dans le cadre des disparitions des migrants, incluant non seulement des représentants des gouvernements tunisien et italien, mais aussi des représentants des familles des disparus et de la société civile ». Nécessaire collaboration entre gouvernement et société civile Le président de la Ftds, qui appelle également à l'annulation de l'accord entre la Tunisie et l'Union Européenne sur la circulation des Tunisiens et son remplacement par un partenariat « efficace qui respecte la souveraineté des deux pays ainsi que les conventions internationales sur la migration, la liberté de circulation et le droit d'asile », exhorte, dans son communiqué, toutes les parties à intensifier les opérations de sauvetage en mer conformément à l'obligation inaliénable de porter secours aux personnes en danger comme le stipule le droit humanitaire. A titre de rappel, les débarquements des Tunisiens sur l'île italienne ne datent pas d'aujourd'hui. Cependant, les plus spectaculaires de ces débarquements ont eu lieu après l'avènement de la Révolution tunisienne. En effet, profitant d'un relâchement de la surveillance douanière et policière aux frontières, des milliers de jeunes désœuvrés ont pris d'assaut la petite île italienne qui est une halte incontournable dans l'odyssée de milliers de clandestins qui tentent de rejoindre l'Europe. Toutefois, ils n'arriveront pas tous au bout de leur rêve puisque près de mille personnes, en majorité des Tunisiens, seraient morts noyés ou portés disparus dans le canal de Sicile entre le 1er janvier et le 31 mars 2011. C'est pourquoi, les familles de personnes disparues lors d'opérations d'immigration clandestine ne cessent de demander aux autorités la réouverture des dossiers des Tunisiens portés disparus et des immigrés clandestins arrivés en Europe après la révolution tunisienne. C'est d'ailleurs à cet effet que des représentants de la société civile ont appelé les ministères de l'Intérieur et des Affaires étrangères à collaborer davantage avec les associations et les organisations concernées, en leur fournissant toutes les informations disponibles. Ils ont également appelé à la révision des textes juridiques relatifs à la migration et à inscrire les droits des réfugiés dans la Constitution, conformément aux dispositions de la convention internationale relative au statut des réfugiés.