Concerts du duo mexico-français Murcof et Simon Geilfus, et des Allemands Robert Lippok et Byetone, dans le cadre du Festival Echos Sonores de Tunis à l'Acropolium de Carthage. En marge de la septième édition de l'EFEST et dans le cadre des diverses manifestations des cultures numériques qui ont lieu depuis le 8 novembre, trois artistes spécialistes du genre se sont produits successivement jeudi dernier sur la scène de l'Acropolium de Carthage. Complètement méconnaissable, la grande salle de la cathédrale Saint-Louis réservée aux spectacles a désormais pris les allures d'une gigantesque boîte de nuit. Un jeune public passionné, mais peu nombreux, s'est rendu au spectacle des artistes Murcof et Simon Geilfus, Robert Lippok et Byetone. Le tridimensionnel à portée de main Le duo mexico-français Murcof et Simon Geilfus donne le coup d'envoi de la soirée. Echos sonores et projections d'entités lumineuses en perpétuel mouvement et transformation sont les ingrédients d'un univers intrigant. Le travail visuel de Simon Geilfus s'accorde avec les compositions atmosphériques et captivantes de Murcof. Le duo donne à voir une performance éthérée et envoûtante, soutenue par une impressionnante scénographie vidéo, procurant l'illusion d'un cosmos tridimensionnel. Au bout du compte, les deux artistes arrivent à remettre en cause nos certitudes en s'amusant avec notre cerveau, via ce projet hypnotique qui ne manque ni d'inventivité ni d'intelligence. Au-delà du réel... Ensuite, le duo cède la scène à Robert Lippok, artiste visuel et compositeur allemand d'avant-garde, il est aussi un musicien très influent sur la prolifique scène musicale expérimentale berlinoise. Lors de son concert, il nous a présenté sa dernière composition audiovisuelle «daytimeastronomy», inspirée de son autre projet futuriste «Redsuperstructure». Pour mettre sur pied un tel projet, il est évident que Robert Lippok a bénéficié du meilleur matériel disponible. Il en ressort un travail exceptionnel sur le son. En dépouillant au maximum ses morceaux, en tombant dans un minimalisme radical supprimant toute mélodie, Robert peut se concentrer uniquement sur les textures et la densité. Les sons se limitent parfois à de simples apparitions fugaces, n'ayant ni début ni fin. Comme pour mieux illustrer cette recherche sonore, nombre de morceaux semblent obéir à un processus sonore savamment orchestré. En sons et en images... Enfin place à l'artiste allemand Olaf Bender baptisé Byetone qui nous fait vivre une expérience sensorielle réclamant une étroite participation de l'auditeur. Il faut lentement disséquer les morceaux pour se rendre compte que tout se superpose avec sens, que tout se déconstruit avec préméditation et que le moindre son extérieur n'est pas là par hasard. En décrivant sa musique, il affirme : «En premier lieu, ma musique aspire bien sûr à déclencher l'impulsion physique qui incite à danser. Mes visuels ciblent aussi une expérience physique connexe – dirigée vers la rétine – pour stimuler davantage l'impact musical par des changements rythmiques de lumière et d'obscurité. Ainsi, j'essaie d'éviter la complexité en favorisant un inter-échange, en temps réel, compréhensible entre les langages visuel et musical». En effet, cette musique définitivement picturale semble avoir un effet même sur la vision. Les yeux littéralement écarquillés, l'auditeur se laisse happer par les accélérations et les ralentis du défilé. Il y a même à plusieurs moments cette impression singulière que les titres sont joués et peuvent être écoutés à l'envers. Tout simplement intrigant!