En se contentant du poste de premier vice-président de l'ARP, le mouvement a fait beaucoup de mécontents dans ses rangs. Serait-ce le début d'une... rébellion ? Finalement, Ennahdha s'est contenté du poste de premier vice-président de l'Assemblée des représentants du peuple (ARP). Si cette «sentence» n'a pas étonné outre mesure les observateurs qui l'ont qualifiée d'«attendue», il n'en est pas de même pour la majorité composant la base de ce parti qui l'a, visiblement, accueillie avec un grincement de dents pour les uns et un froncement de sourcils pour les autres. «Nous sommes hélas loin du compte», déplore un jeune nahdhaoui qui dirige un bureau local du mouvement dans le Grand Tunis. Et d'expliquer : «Nos dirigeants nous ont pourtant promis la présidence de l'ARP pour la course de laquelle étaient lancés deux candidats, en l'occurrence Abdelfattah Mourou et Samir Dilou. Malheureusement, ce poste tant envié est revenu au représentant de Nida Tounès, ce qui constitue, à mon sens, un échec cuisant pour Ennahdha». Pour un autre nahdhaoui, même son de cloche. «On a, s'indique-t-il, complètement raté le coche, en cédant tout à Nida Tounès qui est dès lors bien parti pour un fulgurant cavalier seul, au détriment de toute logique politique, surtout que rien n'indique que Marzouki sera capable de gagner le second tour de la présidentielle». Revenant encore sur les conditions dans lesquelles s'est déroulée, jeudi, l'opération de répartition des tâches à l'ARP, notre interlocuteur n'a pas hésité à lancer bille à la tête des dirigeants d'Ennahdha auxquels il a reproché «laxisme, hésitation et inefficacité durant les tractations de coulisses», tout en exprimant son grand étonnement de «voir Ghannouchi, Mourou et Bhiri saluer le verdict et parler de consensus». Et de conclure, en assurant fatalement que «Ennahdha, ainsi défait et désormais dépourvu de tout pouvoir, n'a plus qu'à rentrer, tête basse, dans les rangs, avec l'espoir, pas tout à fait réalisable d'ailleurs, de former une solide opposition». Que fera le Conseil de la choura? Maintenant que le... mal est fait, quel avenir politique pour Ennahdha ? Fera-t-il éternellement profil bas ? Maîtrisera-t-il le retour en force de son aile dure qui rejette catégoriquement toute tentative de compromis avec Nida Tounès ? Les faucons prendront-ils le dessus sur les colombes, au milieu d'une grogne qui ne cesse de gagner du terrain ? Peut-on déjà parler de «rébellion» au sein d'un mouvement jusque-là conduit et dominé par la philosophie et le charisme de Rached Ghannouchi? Autant de questions auxquelles le Conseil de la choura, autorité suprême du parti, devra apporter des éclaircissements lors de sa réunion prévue ce week-end du côté de Gammarth. Conclave qui pourrait également déterminer le choix des nahdhaouis, à l'occasion du second tour de la présidentielle.