Aujourd'hui, à la salle Amilcar à El Manar, sortent les deux films Action Figuration! de Bilel Bali et 7 vies de Lilia Blaise et Amine Boufaied. Un avant-gout a été donné aux journalistes, avant-hier, lors d'une projection de presse Court-métrage de fiction, Action Figuration! de Bilel Bali a été sélectionné dans la compétition nationale des JCC 2014. D'une durée de 23 minutes, il est le deuxième film du réalisateur, après le long-métrage documentaire 1,2,3,...,5,6,7,.... Le casting compte Feten Chedly dans le rôle principal, Hatem Hazgui, Dhouha Jaziri, Neila Jelassi, et Hamdi Samali. Dans ce film, Feten, une jeune comédienne jusque-là figurante, se bat pour réaliser son rêve d'interpréter un rôle principal. Son rêve va se heurter aux codes sociaux incarnés par son frère et ses voisins. Dans sa note d'intention, Bilel Bali explique l'univers de Feten qui a la vingtaine et qui vit dans un quartier populaire avec sa mère et son frère salafiste. Son parcours dans le film lui fait connaître le monde du cinéma et des spots de publicité, un monde dans lequel évolue le réalisateur lui-même. Ce film, qui porte un message social fort, est donc en même temps, avec son personnage qui se déplace d'un décor à l'autre, un hommage au cinéma et à l'ambiance des plateaux de tournage. Les 7 vies de Ben Ali Lilia Blaise et Amine Boufaied se sont lancés dans l'aventure 7 vies, suite à un constat qu'ils ont fait après deux ans de la révolution. De plus en plus de personnes regrettent Ben Ali et affirment que leurs conditions de vie étaient meilleures avant. Des voix que les médias et les réseaux sociaux ont relayées de manière considérable. Journaliste de formation, Lilia Blaise a travaillé sur la documentation de ce film, dont l'idée originale revient à Amine Boufaied, monteur qui compte à son actif quelques films institutionnels. Les coréalisateurs partent d'un décor réel, celui d'un coiffeur à l'Avenue Habib-Bourguiba, artère principale de la ville. «La figure du coiffeur est reconnue pour être le baromètre des rumeurs de la ville, des ragots ou des tensions populaires. Plus intime que l'espace public où la liberté d'expression est freinée, le salon de coiffure peut être aussi le lieu des confidences et même parfois, de débats politiques», explique le synopsis. Ce documentaire tente d'apporter des éléments de réponses et des éclairages à ce constat qui peut paraître étonnant, voire choquant, après l'avènement d'une révolution. Pour arriver à ces réponses, les coréalisateurs interrogent différents profils: des politiciens, psychologues, acteurs de la société civile et simples citoyens. Par souci d'objectivité et pour présenter les faits sous tous les angles, même les anciens cadres du RDC, parti au pouvoir jusqu'à la chute de Ben Ali, figurent dans le film. On reconnaît là la touche du journaliste. Dans le même temps, 7 vies témoigne d'un effort d'écriture et de structure. Variation d'espaces et mises en scène viennent alléger le rythme. Le chevauchement de témoignages sert en même temps trois grandes parties. Dans la première, on expose la situation et les avis de chacun. Dans la deuxième et la dernière partie, la mosaïque d'avis permet d'expliquer les sources de ce ressentiment de nostalgie, tout en rappelant au spectateur, à travers le témoignage d'anciens détenus, ce que faisait subir le régime aux Tunisiens, physiquement et psychologiquement. La nostalgie du benalisme est d'ailleurs, entre autres explications, une conséquence directe d'années de totalitarisme. Ainsi ressort l'idée principale du film qui est de prévenir du danger du retour du dictateur, d'où l'appellation du film 7 vies. D'abord pour la symbolique du sept, chiffre de la date de prise du pouvoir par Ben Ali après son coup d'Etat médical, le 7 novembre. Et puis 7 vies pour l'idée de la résurrection de ce régime. La dernière image du film, qu'on vous laisse découvrir, vient dans ce sens résumer ce point de vue que le visage de la dictature est à plusieurs facettes. «Du moment qu'il n'y a pas eu de justice transitionnelle et que les bourreaux n'ont pas avoué leurs crimes, il y aura toujours un risque de retour de la dictature. Ce film est un appel à la vigilance», nous a déclaré Amine Boufaied, à l'occasion de la projection de presse. Un film à voir pour comprendre comment se construit l'image du dictateur et comment son règne arrive à perdurer. Après un cycle à Amilcar, Vies et Action Figuration! feront le tour des salles de cinéma et des maisons de la culture en Tunisie.