Sorties commerciales, stars du grand écran et ciné-complexe ont-ils leurs places en Tunisie? Lors de l'avant-première d'El Ott, le dernier long-métrage du réalisateur égyptien Ibrahim El Batout, l'événement était du côté de la distribution, plus que du film. Avant la projection la semaine dernière, les arrivants au CinéMadart ont été accueillis par un tapis rouge, un effet de lumières et une grande affiche longeant le building. La sortie d'El Ott est, en effet, le premier projet d'une nouvelle société de distribution qui voit d'un autre œil ce volet décisif de l'industrie du cinéma. Sroeen Box a vu le jour il y a deux mois avec deux Tunisiens, Fawzy Djemal et Chawki Knis, et un Egyptien, Ahmed El Arnaouty. Ce dernier a bien voulu répondre à nos questions sur la vision et les objectifs du projet, qui peut sembler étranger du contexte tunisien en matière de cinéma, souvent décrit comme agonisant, vu la disparition des salles, sélectif, vu le peu de films qui y sortent et événementiel, lié à des manifestations ponctuelles comme les JCC. Les réponses de notre interlocuteur Ahmed El Arnaouty sont toutes prêtes et sa détermination sans faille. "Nous sommes passés par une étude de marché pour connaître le nombre de salles, l'affluence du public et ses préférences", nous déclare-t-il. Ouvrir le marché tunisien aux films arabes et internationaux et distribuer les films tunisiens dans les pays arabes: voilà en somme l'ambition du trio qui voit le cinéma comme une industrie, dont la Tunisie devrait faire partie. Cela passe, selon Ahmed El Arnaouty, par une diversité des films proposés et un public nombreux. Afin d'y parvenir, Screen Box compte sur de grandes campagnes de communication, et des films récents pour que le public tunisien soit à jour avec les sorties internationales, au même titre que le public arabe. Dans ce sens, on compte s'aligner avec la saison cinématographique internationale. Celle-ci est liée aux fêtes et aux vacances, alors qu'en Tunisie, la saison culturelle commence en septembre et s'achève en juin. La sortie d'El Ott est un ballon d'essai pour le public. "Il est entre le film d'auteur et le cinéma grand public", argumente El Arnaouty. A l'occasion de sa sortie, les distributeurs ont invité des personnalités et des stars tunisiennes pour lesquelles le tapis rouge a été déroulé. Avant le lancement du film, une bande annonce et un message des acteurs pour le public tunisien ont été projetés, en plus de bandes annonces pour des films à venir, afin de nous mettre l'eau à la bouche. Personnalités comme grand public ne se sont pas bousculées pour cette avant-première qui a pris un air nouveau pour les habitués du CinéMadart, salle d'art et d'essai. Le trio ne compte pas s'arrêter là. "Il faut que les salles tunisiennes soient au niveau des standards internationaux et nous comptons bâtir un ciné-complexe où la famille tunisienne peut trouver du divertissement dans le cinéma", nous confie Ahmed El Arnaouty. Une vision qui renoue avec une époque où les salles de cinéma faisaient partie du quotidien de la famille tunisienne, en complément avec l'activité des ciné-clubs, fief des cinéphiles avertis. Le contexte n'est plus le même aujourd'hui, avec la place que prend la télé, le piratage des films et le parc cinématorgraphique qui se réduit de jour en jour. L'équipe de Screen Box a-t-elle raison de rêver aussi grand? C'est ce que les jours nous diront!