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Le message d'Elyès Jouini à Bouchamaoui, Abbassi, Ben Moussa et Ben Mahfoudh, faits Docteurs Honoris Causa à Paris Dauphine
Publié dans Leaders le 11 - 11 - 2017

Très belle cérémonie vendredi après-midi à Paris au cours de la quelle l'Université Paris-Dauphine a décerné au Quartet tunisien lauréat du Prix Nobel de la Paix 2016 son doctorat honoris causa. Elle s'est terminée par un arrangement de « Kelmti horra » avec saxo et piano. Toute la salle était debout alors que des images de la Tunisie défilaient sur 3 écrans. Au préalable, les discours des 4 lauréats, Ouided Bouchamaoui, Hassine Abbassi, Abdessettar Ben Moussa et Fadhel Mahfoudh, avaient été excellents et ils se sont prêtés avec brio à un jeu de question-réponse avec les étudiants du master PEACE Studies de Dauphine.
Le discours prononcé à cette occasion par Elyès Jouini, vice-président de Paris-Dauphine était de très haute facture. S'il n'a pas tari déloges à l'égard du Quartet, il n'a pas laissé passer l'occasion sans adresser aux heureux récipiendaires du doctorat honoris causa, et en fait, à l'ensemble des Tunisiens, des messages percutants. « Du courage, il en faudra, dira-t-il, pour ouvrir la page d'un dialogue national autour des questions de la redistribution, de la justice sociale, de la décentralisation, de la réduction des inégalités régionales et de la nécessaire réforme du système éducatif. » Et de passer à un appel direct : « La transition politique doit, en effet, encore être consolidée, la transition sociale et économique reste à mettre en place voire à penser, et vous aurez sûrement un rôle à jouer. » Le texte intégral est à lire.
Discours d'Elyès Jouini
Cette salle dans laquelle nous sommes réunis a été la salle du Conseil de l'Otan, c'est à dire un lieu de consultations et de délibérations collectives en vue de la paix et de la sécurité.
L'ensemble du bâtiment a été affecté, en 1968, à Paris-Dauphine. Elle a été baptisée salle Raymond Aron, du nom du grand philosophe, sociologue, politologue, historien, journaliste, normalien et, à ce titre, ancien élève de Paris Sciences et Lettres, notre université commune.
Et c'est en citant Raymond Aron que je voudrais commencer mon intervention :
« la vertu essentielle de la démocratie, le principe de la démocratie au sens de Montesquieu, ce n'est pas la vertu, c'est l'esprit de compromis ».
Le prix Nobel de la paix qui vous a été attribué est venu saluer et esprit de compromis, il est venu saluer les efforts conjoints de l'Union générale tunisienne du travail, de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat, de la Ligue tunisienne des droits de l'homme et de l'Ordre national des avocats tunisiens, pour trouver une sortie de crise après les assassinats politiques de 2013 et les tentatives du gouvernement d'alors d'accaparer le pouvoir et d'imposer une constitution jugée particulièrement rétrograde par la plupart des observateurs nationaux et internationaux.
Le peuple tunisien s'était exprimé en janvier 2011 et s'était exprimé à nouveau par une forte mobilisation de la société civile, qui a culminé le 13 août 2013, fête de la femme en Tunisie.
Mais il fallait également instaurer un dialogue et ce dialogue vous en avez été les initiateurs, vous l'avez porté, nourri, fait avancer, malgré une situation de crise sans précédent dans une Tunisie qui découvrait les bienfaits et parfois les excès de la liberté.
Face à cette situation de grande tension politique vous avez pris vos responsabilités et répondu à l'appel. Cet appel, je le reconnais. Je le connais et je le comprends et je salue cet engagement sans faille au service d'une aspiration collective portée par des valeurs universelles.
Vous avez travaillé ensemble à une feuille de route qui s'est imposée à l'ensemble de la classe politique.
La suite est connue : un gouvernement dit de technocrates a été mis en place, dont la mission première a été d'organiser des élections transparentes et équitables afin d'élire le premier Président et la première Assemblée de la seconde République.
Mission accomplie. Bravo !
Vous me permettrez cependant d'ajouter que par delà votre rôle décisif, le prix Nobel de la paix est venu également mettre en exergue une transition vers la démocratie et une construction politique uniques dans le monde arabe. Il est venu saluer la maturité et la capacité de dialogue des différents acteurs. Il est venu reconnaître le rôle joué par la société civile.
Car la révolution tunisienne a été source d'inspiration. Elle a donné naissance à la révolution égyptienne, a alimenté les aspirations de nombreux autres peuples arabes puis a inspiré les mouvements de la Puerta del Sol, de la place Syntagma ou d'Occupy Wall Street. En ce sens, elle n'est ni printemps arabe ni révolution de jasmin, elle est aspiration à la dignité et portée par les valeurs universelles de liberté, de justice sociale et de démocratie.
Mais revenons à vous et permettez-moi de dire quelques mots sur vos parcours respectifs car si le Prix Nobel de la Paix a été attribué au Quartet, c'est à titre personnel que vous recevez le Doctorat Honoris Causa de notre Université.
Et si ce sont bien les institutions que vous représentiez qui ont parrainé le dialogue national, c'est bien vous, chacun d'entre vous quatre qui a incarné son institution, chacun d'entre vous qui a fait preuve de courage, de détermination, d'écoute, de sens de la concertation et de la conciliation, de sens du compromis mais loin de toute compromission.
Commençons par vous, chère Ella Ouided, née à Gabès, vous avez réalisé des études de gestion à l'institut supérieur de gestion de Tunis, puis obtenu un DESS en droit et commerce international. Vous avez fait vos armes dans le groupe familial, exercé dans différentes entreprises avant de créer en 1994 la société Maille Fil. Votre engagement auprès de l'UTICA, la fédération patronale tunisienne, a commencé en 2006 lorsque vous en avez été nommée vice-présidente. En 2011, vous êtes élue à sa tête puis réélue en 2013 pour 5 ans.
Vous êtes également membre fondateur du Maghreb Economic Forum.
Parmi vos nombreuses distinctions vous avez été Désignée par le magazine Jeune Afrique parmi les 50 personnalités qui font la Tunisie ; vous avez reçu le Women Business Award, remis par le Partenariat de Deauville, vous avez été désignée par le magazine New African parmi les 100 personnalités les plus influentes d'Afrique ; vous avez reçu le Business for Peace Award et le Prix Jeane J. Kirkpatrick, remis par le Réseau des femmes pour la démocratie.
Cher Si Hassine, vous êtes né le 19 août 1947 à Sbikha et avez commencé votre carrière professionnelle en tant qu'instituteur, avant d'être promu au poste de conseiller pédagogique de l'enseignement secondaire en 1973.
Vous avez rejoint les rangs de l'UGTT cette même année et y avez occupé successivement plusieurs postes, tant à l'échelle régionale que nationale : de membre du syndicat général des surveillants en 1983 vous devenez Secrétaire général de l'Union régionale du travail à Kairouan en 2002 puis membre du bureau exécutif chargé de la législation et du département des études en
2006.
Vous avez enfin été nommé 13ème secrétaire général de la Centrale syndicale en 2011 et avez occupé cette fonction jusqu'en 2017. Vous êtes, d'autre part, membre permanent du bureau exécutif de la Confédération syndicale internationale et président de la Confédération syndicale arabe.
Parmi vos nombreuses distinctions, vous avez reçu le Prix de la fondation allemande pour l'Afrique des mains du président de la République fédérale d'Allemagne, vous avez reçu le Fairness Award de la Global Fairness Initiative à Washington et vous êtes Docteur honoris causa de l'université Dōshisha au Japon.
Cher Si Abdessattar, vous êtes né le 1er novembre 1951. Vous êtes titulaire d'une licence de droit public, d'un diplôme d'études supérieures dans la même discipline et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat. Vous avez occupé de nombreuses hautes responsabilités parmi lesquelles celles de président de la section des avocats de Tunis de 2001 à 2014, bâtonnier de l'Ordre national des avocats de 2004 à 2007 et président du Conseil national de l'Union internationale des avocats de 2005 à 2008.
En 2008-2009, vous avez été le coordinateur de la défense des détenus dans les affaires du bassin minier, c'est à dire des acteurs des prémices de la révolution de 2011.
Le 17 janvier 2011, le gouvernement d'union nationale constitué à la suite de la révolution annonce, lors de sa formation, la levée définitive de l'interdiction de l'ensemble des activités de la Ligue tunisienne des droits de l'homme sur le territoire. La même année vous en avez été élu Président. Depuis octobre 2016, vous en êtes Président honoraire. Depuis 2012, vous êtes également membre du Conseil de présidence de l'Organisation arabe des droits de l'homme et, depuis janvier dernier, Médiateur administratif de la République tunisienne.
Parmi vos nombreuses distinctions, vous avez été nommé ambassadeur de l'Union internationale des avocats (pour la Paix) en novembre 2016.
Cher Si Mohamed Fadhel, vous êtes né à Gafsa en 1965. Vous êtes titulaire d'une maîtrise en droit privé de l'Université de Picardie et du Certificat d'aptitude à la profession d'avocat.
Vous êtes avocat auprès de la Cour de cassation depuis 2001 et avez assuré la présidence de l'Ordre national des avocats de 2013 à 2016 après avoir été membre du Conseil Régional de Sfax de l'Ordre des avocats entre 1998 et 2004, et d'y être élu en tant que Secrétaire général en 2007 puis Président en 2010. Vous avez été, en 2011, membre de l'Instance Supérieure Indépendante pour les Elections, chargé des Tunisiens résidants à l'étranger.
En 2013-2014, vous avez été le Porte-parole du Dialogue National.
Parmi vos nombreuses distinctions, vous avez reçu un Hommage de l'Union des Avocats Arabes et un Hommage international de l'Union Internationale des Avocats.
Comme vos trois co-lauréats, vous êtes Commandeur de l'Ordre de la République Tunisienne et Commandeur de l'Ordre de la Légion d'Honneur.
C'est ensemble que vous avez reçu ces deux dernières distinctions des mains des Présidents de la République respectifs, car c'est ensemble que vous avez démontré qu'un dialogue national est possible.
Car ensemble, vous avez ouvert la porte à une démocratie plus participative dans laquelle le citoyen, le travailleur, l'entreprise, la région sont des acteurs de leur avenir.
Pour cela, il a fallu de la concertation et du courage.
La concertation et le courage, c'est ce que sont venus saluer vos multiples distinctions. De la concertation, il en faudra encore et encore, pas seulement entre les institutions, mais aussi avec les citoyens et avec la communauté internationale. Cette communauté qui a salué étape après étape, les progrès accomplis mais qui se doit également d'apporter un soutien plus déterminé à ce que mon collègue Mouhoub El Mouhoud que je salue, a été le premier à qualifier de bien public mondial.
Du courage, il en faudra pour ouvrir la page d'un dialogue national autour des questions de la redistribution, de la justice sociale, de la décentralisation, de la réduction des inégalités régionales et de la nécessaire réforme du système éducatif.
Notre Université, déjà très présente en Tunisie comme l'a rappelé notre Présidente, pourrait contribuer modestement et, pourquoi pas, sous votre parrainage conjoint en y délivrant notre master « négociations et relations sociales » afin d'œuvrer à permettre et à consolider un échange serein, constructif et porteur de perspectives entre les différentes parties prenantes du dialogue social et de mieux penser la nécessaire articulation entre le politique, l'économique et le social.
La transition politique doit, en effet, encore être consolidée, la transition sociale et économique reste à mettre en place voire à penser, et vous aurez sûrement un rôle à jouer.
Car il ne faut pas s'y tromper, les marges de manœuvre sont limitées et le Business as usual n'est plus une option. Et comme l'a dit, ici même, Federico Mayor, ancien Directeur général de l'UNESCO lors de la leçon inaugurale du master Peace Studies dont je salue les responsables et les étudiants, l'évolution est indispensable pour ne pas plonger dans une nouvelle révolution.
La différence entre les deux est dans le R, le R de responsabilité.
Cette responsabilité est le corollaire de la liberté politique car, vous me permettrez de conclure comme j'ai commencé, c'est à dire en citant à nouveau Raymond Aron :
« La liberté politique contribue à rendre les hommes dignes d'elle, à en faire des citoyens ni conformistes, ni rebelles, critiques et responsables. »
Cette phrase gravée dans le marbre a pendant longtemps orné un mur de cette salle."


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