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Mouna Kraïem Dridi: L'état d'exception ne se déduit pas, il se déclare et s'assume
Publié dans Leaders le 02 - 04 - 2020

Dans son allocution télévisée du 17 mars 2020, le Président de la République s'est adressé au peuple tunisien pour annoncer sa décision de décréter un couvre-feu applicable à partir du 18 mars 2020 de 18H à 06H. Cette décision a été prise en concertation avec le président de l'Assemblée des représentants du peuple et le Chef du gouvernement suite à l'avis de plusieurs spécialistes dans les domaines de la santé et de la sécurité nationale.
En conséquence un décret présidentiel, n°24/2020 du 18 mars 2020, instaurant un couvre-feu et organisant la circulation sur l'ensemble du territoire tunisien, a été promulgué. Dans un deuxième décret, n°28/2020, en date du 22 mars 2020, le Président de la République ordonna un confinement général limitant la circulation des personnes et les rassemblements hors horaires du couvre-feu.
Dans les visas des deux décrets présidentiels figure au tout début une référence à l'article 80 de la constitution et une mention de la consultation du président de l'Assemblée des représentants du peuple et du chef du gouvernement.
Une question est depuis revenue à plusieurs reprises : le Président de la République a-t-il proclamé l'état d'exception tel que prévu par l'article 80 de la constitution du 27 janvier 2014.
La référence à l'article 80 au début des deux décrets susvisés d'une part, et la manière avec laquelle les mesures arrêtées suite à la réunion du Conseil national de sécurité d'autre part, n'ont pas manqué de semer le doute relativement au cadre juridique dans lequel le chef de l'Etat a agi. D'aucuns y ont vu une annonce claire et nette de l'état d'exception mais cette position est loin de faire l'unanimité.
Pour comprendre la situation, revenons à la lettre de l'article 80. Ce dernier dispose dans son premier paragraphe, qu' « en cas de péril imminent menaçant l'intégrité nationale, la sécurité ou l'indépendance du pays et entravant le fonctionnement régulier des pouvoirs publics, le président de la République peut prendre des mesures qu'impose l'état d'exception, après consultation du Chef du gouvernement, du président de l'Assemblée des représentants du peuple et après en avoir informé le président de la Cour constitutionnelle. Il annonce ces mesures dans un message au peuple ».
Il est admis en doctrine et en jurisprudence que l'état d'exception a pour effet de suspendre l'application des règles de droit en vigueur dans les situations ordinaires, notamment en matière des libertés publiques. Il est qualifié par le Professeur Jean Gicquel de « dictature de salut public destinée à assurer l'existence de la nation ».
Les circonstances de fait à l'origine de la proclamation de l'état d'exception sont soumises au contrôle de la cour constitutionnelle après trente jours de leur entrée en vigueur et ce, à la demande du président de l'Assemblée ou de trente députés. Durant cette période, le parlement est considéré en état de session permanente. Il ne peut être dissout et ne peut présenter de motion de censure contre le gouvernement.
Il ressort du texte de l'article 80 que la proclamation de l'état d'exception obéit à deux séries de conditions : des conditions de forme et des conditions de fond.
Sans trop s'attarder sur les conditions de fond liées à la qualification du péril imminent et son impact sur le fonctionnement régulier des pouvoirs publics, les conditions de forme s'articulent autour de trois formalités substantielles:
• D'abord, la consultation par le président de la République du chef du gouvernement et du président de l'Assemblée des représentants du peuple.
• Ensuite, l'information du président de la cour de cassation par le président de la République.
• Enfin, le message adressé au peuple par le président de la République dans lequel il annonce l'ensemble des mesures prises (AL Bayan).
Il est évident que si le président de la République a procédé aux consultations imposées par l'article 80 de la constitution, il n'en est pas de même pour les deux autres conditions.
Si nous pouvons justifier l'absence d'information du président de la Cour constitutionnelle par la théorie de la formalité impossible, le discours prononcé par le Président de la République n'a pas pris la forme d'un message solennel dans lequel il a explicitement et clairement déclaré la proclamation de l'état d'exception. En la matière, la référence est le discours radiotélévisé prononcé par le Général De Gaulle, le 21 avril 1961, lorsqu'il informa le peuple, sans détours ni ambiguïtés, qu'il avait décidé de mettre en œuvre l'article 16 :« Conformément à la Constitution, j'ai, après avoir procédé aux consultations officielles qu'elle prévoit, notamment à celle de votre Président, décidé de faire application de l'article 16 et commencé à prendre les mesures nécessaires pour faire prévaloir l'autorité des pouvoirs constitutionnels. D'autre part, le Parlement se trouve réuni de plein droit.
« Dans les circonstances actuelles, je considère que la mise en œuvre de l'article 16 ne saurait modifier les activités du Parlement : exercice du pouvoir législatif et contrôle. De ce fait, les rapports du gouvernement et du Parlement doivent fonctionner dans les conditions normales pour autant qu'il ne s'agisse pas de mesures prises ou à prendre en vertu de l'article 16. Le Parlement, dont s'ouvre aujourd'hui la seconde session, est donc appelé à poursuivre sa tâche ».
Face à la crise du corona virus, le président Macron n'a pas fait appel à l'article 16 de la constitution. Le gouvernement a fait adopter la loi d'urgence sanitaire qui comporte elle-même une délégation du pouvoir législatif au gouvernement.
Dans son allocution, le Président de la République n'a à aucun moment prononcé le terme de « mesures exceptionnelles », ni fait référence à l'article 80 de la constitution. Il a tout simplement évoqué « des procédures », un mot générique sans portée.
Ainsi, la référence à l'article 80 dans les deux décrets ne signifie nullement que nous sommes dans le cadre de cet article car un état d'exception ne se déduit pas, il se déclare et s'assume.
Mouna Kraïem Dridi
Docteur en droit public.
Enseignante à la Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis -


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