C'est fin 2016 que l'on a commencé à entendre parler de ce nouveau Front de salut qui viendrait rééquilibrer la scène politique au profit des forces démocratiques progressistes. Mohsen Marzouk et son Machroû, Slim Riahi et son Union patriotique libre (UPL) et Ridha Belhadj et son comité de sauvetage au sein du mouvement de Nidaa Tounes devaient se retrouver autour d'un nouveau projet pour se préparer, entre autres, aux prochaines élections municipales. Une première date a été annoncée pour l'officialisation de ce Front ; le 14 janvier 2017, jour de la commémoration de la révolution. Mais il n'y a eu aucune annonce. Par la suite, nous avons entendu parler de la date du 17 janvier. Elle-même reportée au 2 mars. Depuis, et à cause de ces multiples reports, plusieurs rumeurs ont abondé dans le sens du report pur et simple du projet. Ce dernier aurait été abandonné, avancent certains à cause de quelques divergences profondes entre les concernés. Les récentes déclarations du secrétaire-général d'Al Machroû n'ont pas calmé les esprits ; et puis la position de Mohsen Marzouk quant au nom à donner au Front avait confirmé cette théorie. En effet, après des mois de négociations, ce dernier a commencé à revenir sur le mot salut expliquant que, d'une part, il s'agit d'une ancienne appellation (celle du Front qui a été formé après l'assassinat du martyr Mohamed Brahmi au cours de l'été de 2031) et, de l'autre, il a une connotation négative et donne l'impression que le pays est en train de glisser dangereusement nécessitant une intervention de sauvetage. Un changement de discours assez subtil de la part de celui qui avait, à maintes reprises, assuré que la situation générale du pays était à son comble. Pour Slim Riahi, on a plutôt l'impression qu'il campe sur ses positions : lors de la tenue de la conférence internationale sur l'investissement à Tunis, en novembre dernier, le président de l'UPL avait, suite à un problème de protocole, annoncé la fin du pacte de Carthage. Quelques semaines plus tard, l'UPL a officialisé son retrait du même pacte en rejoignant l'opposition. Par rapport au soutien du gouvernement de Youssef Chahed et à l'adhésion au pacte de Carthage, il existe déjà une grande divergence entre les deux parties majeures de ce nouveau Front. En effet après ses deux récentes rencontres avec le président de la République, Mohsen Marzouk a quelque peu modéré sa position, tandis que son vis-à-vis continue à afficher clairement son refus de toute collaboration avec le pouvoir en place. Une position nette, claire et précise qui va se confirmer davantage avec la toute récente adhésion de deux anciens de son parti, en l'occurrence Mohsen Hassan et Maher Ben Dhia au mouvement Nidaa Tounes On rappelle que la dernière fois que Nidaa Tounes a recruté des députés du bloc de l'UPL, une guerre médiatique avait éclaté entre les deux parties. Ces différences et ces divergences entre Marzouk et Riahi risquent de bloquer le projet d'autant plus que l'on sait que leur objectif personnel respectif risque, aussi, de poser problème puisque les deux intéressés voilent à peine leur projet de se présenter pour des postes importants et pourquoi pas la magistrature suprême. Pour les autres composantes de ce nouveau Front qui se fait tant attendre, il semblerait qu'elles aient été carrément mises de côté vu le déséquilibre du poids et des représentations.