Les gouvernorats du nord-ouest (Béja, Jendouba, le Kef, en plus de Siliana) avaient été toujours laissés pour compte dans l'effort de développement régional, comme ce fut le cas de nombreuses autres régions du sud et du centre du pays. Avec la Révolution, l'espoir renait : ces gouvernorats vont opérer le décollage économique escompté. Hélas, il semble que trop d'entraves empêchent la réalisation des rêves de populations qui n'aspirent qu'à l'emploi et aux conditions d'une vie digne, malgré les efforts consentis par différentes compétences de ces régions, en vue de mettre en place des projets à la hauteur des ambitions. Le gouvernorat de Béja a placé tous les espoirs dans la réalisation de deux mégaprojets, qui sont «Jinene Medjerda» et l'hôpital multidisciplinaire. Toutefois, entre l'espoir et la réalisation, il y a un long chemin à parcourir, et il suffit d'en juger et de voir l'importance des obstacles qui ont entravé et entravent la réalisation, surtout au niveau des méandres de procédures administratives. En juillet 2013, la délégation spéciale du conseil régional du gouvernorat a agréé, au cours d'une session ordinaire, l'adoption par la région du projet «Jinene Medjerda», un projet éco-touristique, agricole et universitaire cohérent devant générer à long terme 40 000 emplois dans la région d'Oued Zarga, à Testour (gouvernorat de Béja). Cette Smart city a pour nom « Jinene Medjerda» et devait être édifée à quelque 70 km de Tunis, sur les hauteurs du village d'Oued Zarga, sous forme d'une nouvelle ville de plus de 100.000 habitants autour d'une université (CollegeTown). Selon Belgacem Mezni, ingénieur à la retraite, l'idée est inspirée des expériences réussies de Louvain La Neuve (Belgique), Harvard et Massachusetts Institute of Technology (MIT aux Etats-Unis). Tous les atouts pour dynamiser la région Le but est de mettre en œuvre, sur la base du «Knowledge Management Economy», un nouveau modèle de développement socio-économique adapté à la région du nord-ouest. L'objectif stratégique est de créer les conditions de restructuration et de transformation profonde de l'économie du nord-ouest à travers l'amélioration des compétences technologiques et de gestion des exploitations agricoles et l'introduction de nouveaux produits à haute valeur ajoutée à l'export, avec en prime 40 000 emplois à terme. Jinene Medjerda doit avoir pour principales composantes une institution privée d'enseignement supérieur pour la formation et la diffusion du savoir pour 10.000 étudiants en 2020 (50% arabes et africains) et 20.000 étudiants à terme, un centre de recherche et développement, un centre de production agroalimentaire composé de clusters de haute technologie sur une ferme de 500 ha : fruits tardifs, Stevia, héliciculture, élevage ovin, produits aromatiques, des activités touristiques «agro-éco-sport-santé» (5 étoiles), y compris des facilités de loisirs lacustres propres sur les quatre îlots du barrage pour riches clients, et enfin une nouvelle ville du type «CollegeTown» conforme aux normes internationales et dédiée totalement à l'université. Malgré tous les obstacles et les bâtons dans les roues mis, principalement, par le ministère du Développement, de l'Investissement et de la Coopération internationale, dirigé, alors par Fadhel Abdelkéfi, un contrat pour la réalisation des études du projet «Jinene Medjerda» a été signé, vendredi 27 janvier 2017, au siège du gouvernorat de Béja entre la société JineneMedjerda et un bureau d'études. Un financement du FADES Le coût des études, qui seront financées par un don du Fonds arabe pour le développement économique et social (FADES), est évalué à 1,6 million de dinars (MD). Elles devaient être réalisées en 2017 pour entrer en exécution en 2018. Certaines composantes du projet devraient entrer en service dans cinq ans. Il s'agit notamment d'un Pôle agricole et de production d'énergie verte. Les autres composantes seront réalisées dans un délai de 10 à 20 ans (centre commercial et touristique, ville universitaire). Malheureusement, trop d'obstacles ont, encore une fois, vu le jour, avec certaines parties qui alléguaient que ce projet est polluant et qu'il fallait détourner les financements vers d'autres projets qui, de l'avis de tous, n'auraient fourni même pas le centième des postes d'emploi prévus par Jinene Medjerda. Lors de sa dernière visite à Béja, il y a deux semaines, le chef du gouvernement Youssef Chahed a promis, et c'est tout à son honneur, de débloquer ce dossier. Entretemps, les habitants de la région s'impatientent, surtout que, depuis l'année 2013, le projet progresse à pas de tortue, avec parfois l'impression que certaines parties, on ne sait pour quelle raison, ne veulent pas qu'il soit finalisé. Samedi dernier, la société civile avait organisé un rassemblement au centre-ville de Béja, pour réclamer le droit de la région au développement et pour exprimer leur ras-le-bol face aux hésitations et aux tergiversations. Pour un lot de terrain Le second mégaprojet est celui d'un hôpital pluridisciplinaire dont le feu vert avait été donné par le chef du gouvernement, le 8 juin 2017 lors de sa visite au gouvernorat. Saïd Aïdi, alors ministre de la Santé avait annoncé, en mai 2016, que les travaux de construction de l'hôpital, seront entamés au début de l'année 2017 pour un coût de 150 millions de dinars. Une enveloppe assurée par un financement anglais. Le nouvel hôpital s'étendra sur 15 ha, les services de soins seront répartis sur une superficie de 8394 m2. La superficie de l'administration et de logistiques s'étendra sur une surface de 4058 m2. Une pharmacie, un service de stérilisation central, une banque du sang, un département d'hygiène et une unité de médecine légale sont prévus. Cet établissement aura une capacité de 173 lits dans les services de différentes spécialités et 150 lits pour les services de chirurgie. L'hôpital renfermera des spécialités pluridisciplinaires, un département pour les services techniques et logistiques et contribuera à offrir des prestations sanitaires de qualité et de proximité pour les citoyens tout en renforçant les infrastructures de santé dans la région et ses environs. A trop tergiverser, on risque de perdre des financements offerts gracieusement à la Tunisie, avec toutes les conséquences, au niveau de la crédibilité du pays et de sa volonté d'opérer le décollage économique et social nécessaire. Espérons que ces retards ne seront en fin de compte que des accélérateurs efficaces permettant la relance de ces projets. Comme quoi « il faut reculer, pour mieux sauter».