Au cours de son discours prononcé à l'occasion de la clôture de la conférence annuelle des chefs de missions diplomatiques et des consulats, le président de la République, Béji Caïd Essebsi, a tenu à faire un nouveau clin d'œil politique adressé, vraisemblablement, à tous ses adversaires et au chef du gouvernement plus précisément. Le président de la République a, en effet, déclaré que «personne ne sait s'il sera au pouvoir ou un simple spectateur en 2020 et encore moins s'il sera en vie ou pas d'ici là». Et d'ajouter que «un politicien pense à la prochaine élection alors que l'homme d'Etat, à la prochaine génération». Une citation de l'auteur américain James Freeman Clarke, une citation pleine de bon sens, à première vue du mois... Si Béji Caïd Essebsi adore cette citation, pour l'avoir sortie à plusieurs occasions, le timing de sa déclaration survient à un moment critique où il mène, ouvertement, une guerre contre Youssef Chahed côte-à-côte avec son fils, Hafedh Caïd Essebsi. La présence du chef du gouvernement lors du discours du président ne peut que confirmer que la citation en question n'a pas été évoquée par hasard. En rappelant que l'homme d'Etat ne doit penser qu'aux générations futures et que personne ne sait de quoi sera fait 2020, Béji Caïd Essebsi a fait passer un message qu'il a voulu intense à Chahed qui fait face, depuis plusieurs mois, à une forte confrontation avec le directeur-exécutif du mouvement de Nidaa Tounes, Hafedh Caïd Essebsi. Le récent vote de confiance en faveur du ministre de l'Intérieur, Hichem Fourati, a fait empirer la scission entre les deux camps puisque le directeur exécutif du Nidaa a tout fait pour bloquer le vote de confiance en espérant, par des magouilles pareilles, pousser le gouvernement à présenter sa démission. Avec cette nouvelle déclaration, Béji Caïd Essebsi vient, de nouveau, se placer du côté de son fils après la fameuse interview qu'il a accordée, il y a quelques semaines de cela, à la chaîne télévisée Nessma où il a appelé Youssef Chahed à présenter sa démission ou à passer par l'Assemblée des représentants du peuple (ARP) pour y renouveler sa confiance. Toutefois, en donnant un conseil pareil au chef du gouvernement et à tous les politiciens qui aspirent à être propulsés à la magistrature suprême l'année prochaine, Béji Caïd Essebsi oublie qu'il est peut-être le premier à blâmer dans toute cette situation. En effet, si les Youssef Chahed, les Mohsen Marzouk ou encore les Mehdi Jomaa cherchent le moyen le plus facile pour occuper, pour les cinq années à venir, le palais de Carthage, Béji Caïd Essebsi qui en est actuellement l'unique locataire, a préféré décevoir ses électeurs en choisissant de se placer, contre vents et marrées, du côté d'un fils qui n'inpire ni confiance ni malice. S'il est du droit des politiciens d'avoir des ambitions et des aspirations grandes, il n'est pas de leur droit de favoriser les membres de leurs familles et de les soutenir en dépit d'un pays qui agonise.