Au moment où l'humanité poursuit sa lutte contre la pandémie du COVID 19, les gouvernants s'ingénient à contenir l'impact ravageur de cette crise sanitaire sur l'économie mondiale. Une crise économique plus sévère que celle de 1929, prédisent les experts et les observateurs de part le monde. Une crise à durée indéterminée et à contrecoups démesurés. En Tunisie on pense déjà à l'étape de l'après confinement. En dehors des prédictions les plus pessimistes, la guerre lancée contre le COVID 19 ressuscite le rôle de l'Etat providence mettant sur la sellette les faiblesses du courant libéral voire le néolibéral et les carences des services publics partout dans le monde. Chez nous, tout le monde sollicite l'aide de l'Etat : secteur privé, secteur public, entreprises, salariés, chômeurs, citoyens…l'Etat est appelé à répondre aux besoins spécifiques de tout un chacun. Bref l'Etat est ramené à sa première mission, l'Etat protecteur, celle d'assurer la survie des personnes. Le ministre de la Santé Abdellatif Mekki a annoncé dimanche la possibilité de prolonger la période de confinement total en affirmant que selon les experts un confinement efficace pourrait durer 3 ou 4 mois voire sur la fin de l'année 2020 au pire des cas. Une déclaration qui vient jeter un pavé dans la mare. Une déclaration qui a suscité la panique et la détresse auprès des entreprises, notamment privées même si Mohamed Abbou, ministre de l'Etat auprès du chef du gouvernement chargé de la fonction publique et de la gouvernance a déclaré, hier que le prolongement du confinement jusqu'au 20 avril n'a pas encore été décidé. Sinon, fermer les sites de production pour une durée indéterminée est une déclaration succincte de la faillite pré-annoncée des entreprises, de la perte de centaines de milliers d'emplois et d'une subversion totale dans l'approvisionnement du marché en produits de première nécessité. Une calamité socio-économique s'annonce-t-elle à l'horizon ? Aujourd'hui la quasi-totalité de la production industrielle est à l'arrêt et l'Etat à l'instar de tous les pays du monde se trouve dans l'incapacité absolue de jouer son rôle de l'Etat protecteur et ce à tous les niveaux de la pyramide. Vers la révision de la Loi de Finances Le rééchelonnement des dettes et le report des échéances sociales et fiscales ne sont que des mesures exceptionnelles et limitées dans le temps mais surtout dans l'espace. Les caisses sont vides et il est difficile de mobiliser des fonds supplémentaires pour contrer cette crise planétaire. Il ne faut pas perdre de vue que selon la LF 2020 les recettes fiscales devraient représenter 74% du PIB. Donc en l'absence de ressources fiscales, principale ressource propre de l'Etat, l'endettement se présente comme la seule et unique échappatoire. D'ailleurs, une révision de la LF 2020 s'impose surtout que toutes les hypothèses tombent aujourd'hui à l'eau. Faute de création de richesse, l'heure est plutôt au financement multilatéral. Hakim Ben Hammouda et Mohamed Hédi Bchir, ont d'ailleurs relevé dans leur dernière étude que « la crise du Coronavirus va impacter les équilibres financiers de l'Etat suite à la baisse attendue de ses recettes fiscales. Ce qui engendrerait une hausse des besoins de financement pouvant aller de 6,2 jusqu'à 29,1% selon la gravité des scenarii. Cela aurait des conséquences importantes sur l'endettement de l'Etat estimés à 0,78% pour le scénario le moins grave et pouvant atteindre 3,64% pour le scénario catastrophique de non maitrise totale de l'évolution du virus dans le pays ». Une perte de 220 billions de dollars pour les PED Le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) a affirmé lundi dans un communiqué rendu public que les pertes de revenus économiques des pays en développement (PED) dont la Tunisie, pourraient atteindre 220 billions de dollars. « L'Afrique pourrait perdre environ la moitié du total des emplois actuels, estime le PNUD …. La crise engendrée par la pandémie du Covid-19 dans les pays en voie de développement, n'est pas seulement une crise sanitaire mais aussi sociale et économique. Ses impacts seront dévastateurs durant les mois et les années à venir», s'alarme-t-il. «Les système de santé fragile et les établissements hospitaliers qui manquent de ressources ne pourront pas faire face au tsunami de la demande prévue sur les services de soin», explique le PNUD, dans son communiqué. L'organisation onusienne a fait appel à la communauté internationale pour mobiliser des fonds et empêcher l'écroulement économique des pays en voie de développement. Pour sa part le Cercle considère que cette crise montre l'urgence d'une véritable politique publique intégrée (sanitaire, économique, sociale, éducative, culturelle, environnementale, …), encadrée dans une vision de court et moyen terme, dirigée et coordonnée à l'échelon le plus élevé de l'Etat. En effet cette crise sanitaire a montré qu'aucun système de production économique ne peut survivre en dehors d'un puissant service public. D'où le retour imminent de l'Etat providence même dans les économies les plus libérales.