C'est incontestablement le film de cette rentrée. Avec un succès public et un accueil critique remarquables, Wided Zoghlami réalise un beau parcours avec une oeuvre à la fois lisible et complexe. Wided Zoghlami peut déjà se réjouir de la sortie nationale de «Fathallah TV». Différé à cause de la pandémie, cette sortie a finalement eu lieu en septembre et brassé bien des publics dans plusieurs régions de Tunisie. Sanction positive du public Le film devrait poursuivre son parcours et aller maintenant dans des villes et quartiers où il n'existe pas de salles de cinéma. Zoghlami vient de projeter son oeuvre à Nabeul et ne compte pas s'arrêter en si bon chemin. Ils faut dire qu'avec un contexte sanitaire défavorable, les résultats parlent d'eux-mêmes et augurent d'une belle carrière pour un film des plus originaux. Intitulé «Fathallah TV, 10 ans et une révolution plus tard», ce film produit par Ulysson suit les pas de trois jeunes et d'un quartier. Réalisé à cheval entré deux époques différentes, ce film a été conçu sur une dizaine d'années de 2007 à 2017. Autrement dit, Wided Zoghlami a baladé sa caméra dans le temps de la main de fer puis dans celui libéré de la chape de plomb. Sur les pas des musiciens Tiga Black Na, Halim Yousfi et Pazaman, Zoghlami remonte aussi sa propre généalogie d'artiste. Elle parvient ainsi à une oeuvre à la fois introspective et ouverte sur un réel des plus mouvants. Dans un double déploiement, la réalisatrice témoigne du processus de création et du vécu d'un quartier populaire, celui de Djebel Djelloud à la périphérie sud de Tunis. Les voix des jeunes racontent les rêves et les carcans alors que la musique - matrice essentielle du film - transmet les espoirs et les désillusions de toute une génération. Ce caractère de documentaire musical doublé d'une réflexion sur le travail de création vaut désormais à ce film d'être plébiscité par plusieurs publics différents. Une oeuvre qui mobilise le jeunes On peut ainsi affirmer sans se tromper que ce film parle aux jeunes et atteint un public habituellement peu enclin à fréquenter les salles obscures. S'il mobilise les jeunes, ce documentaire touche aussi le public cinéphile qui y retrouve une démarche personnelle et un dispositif très moderne déployé sur une décennie entière. Enfin, la musique encore une fois, fait le reste et parfait un alliage où le spontané, l'impertinent et l'ambigu cohabitent dans des propos libres. Le film de Wided Zoghlami poursuit donc sa carrière pour les semaines à venir y compris à l'international. «Fathallah TV» s'est déjà distingué au Festival panafricain de Cannes, à Louxor et Amman. Le film a aussi été salué aux JCC, au Festival Gabes Cinema Fen et au Festival international du film de Tozeur où il a remporté le Scorpion d'or. Un parcours à suivre et qui devrait être confirmé dans d'autres espaces. H.B