Le peuple tunisien s'est habitué à la médiocrité du rendement de ses élus, mais ce qui s'est passé, lors du vote de confiance aux nouveaux ministres dépasse tous les entendements, surtout que la séance, assez longue, a permis d'accentuer les divisions et d'étaler au grand jour une image d'un pays qui, il n'y a pas longtemps, était respecté par la communauté internationale. Les résultats, certes, ont été en faveur du chef du gouvernement, Hichem Méchichi, avec des résultats qui ont dépassé ses espoirs, même. Mais, peut-on considérer cela comme une victoire ? On en doute fort. Ce n'est qu'une manche de gagner, dans la guerre que se mènent les trois têtes du pouvoir, surtout que Méchichi doit faire face, maintenant, à la vindicte du président de la République, Kaïs Saïed, aux accusations de corruption et de conflits d'intérêt qui pèsent sur certains de ses ministres, mais, en particulier, à un ras-le-bol généralisé dans un pays exsangue et au bord du gouffre. D'abord, pour cette lutte intestine, entre le président de la République et le chef du gouvernement. On comptait sur eux pour régler les problèmes du pays, mais voilà qu'ils sont emportés par le tourbillon de la discorde et qu'ils ne cherchent, même pas à régler leurs problèmes, en toute sérénité. A cet effet, on se demande quel sort ils ont tous deux décidé, pour ce dialogue national proposé par la centrale syndicale et qui ne fait même plus partie des préoccupations des décideurs politiques, tellement les dissensions sont profonde, avec l'absence de volonté de résoudre les problèmes en douceur, pour pouvoir s'occuper d'autre chose ? Entretemps, la fronde populaire gonfle et la colère gronde, et ce n'est pas l'intervention musclée des forces sécuritaires, avec leur nouveau matériel, qui va la calmer. Entretemps, plus d'un millier de manifestants ont été arrêtés et plusieurs ont été condamnés d'une manière expéditive. Mais, cela ne fera qu'attiser le feu des contestations et de la rupture entre gouvernants et gouvernés. Et, là, il revient au chef du gouvernement de calmer les esprits, de présenter son programme, le plus rapidement possible, pour la création des emplois et pour le développement, sachant, quand même, qu'il n'a pas une grande marge de manoeuvre, avec le marasme économique et social. C'est le destin de ce pays, de naviguer à vue au gré des vents, dix ans après une révolution qu'on croyait être l'entrée d'une nouvelle ère de bonheur et de prospérité, mais qui est devenue une calamité. Même le petit quelque chose que le pays a gagné – celui de la liberté d'expression- est malmené par certains députés pour qui la presse entrave les sombres desseins.