L'année 1952 fut marquée, par l'arrivée le 13 janvier, d'un nouveau Résident Général, Jean De Haute Clocque, un sanguinaire envoyé à dessein pour mater les militants du Néo-Destour. La tendance des autorités coloniales était au durcissement et à la répression, surtout après le rejet du gouvernement français par une note du 15 décembre 1951, des revendications tunisiennes, présentées au cours des négociations entre celui-ci et le ministère M'hamed Chénik. Les militants destourines se mobilisèrent davantage. Le leader Bourguiba déclara que " la réponse du Gouvernement schuman, ouvre une ère de répression, de résistance , avec son cortège inévitable de larmes , de deuils et de rancunes. " Le nouveau résident arriva sur un bateau de guerre , et la date du 13 était prémonitoire, comme pour augurer d'un mauvais signe. Le 18 janvier, quelque 150 militants furent arrêtés, dont Habib Bourguiba. Les militants s'engagèrent alors dans une lutte sans merci contre le colonisateur. Au cours de l'une des manifestations un colonel français fut abattu. Ce qui incita l'armée coloniale d'agir, non seulement à la capitale mais également dans plusieurs villes à travers le pays. Aussi dans les jours qui suivirent, une fusillade éclata à Moknine au Sahel, et des gendarmes, faisant des morts et des blessés parmi les manifestants. L'armée procéda à un vrai ratissage, et provoquait des heurts sanglants là où elle passait. En fait, ce fut au mois de janvier 1952 que le Mouvement national avait atteint son apogée. Toute cette année sera marquée par des événements qui furent à jamais gravés dans la mémoire collective. Une association colonialiste, " la main " rouge était constituée, dans le but de riposter à l'action militante. Ce fut par le concours de cette organisation terroriste et sanguinaire qui perpétrait des actes criminels, que le leader politique et syndical Farhat Hached fut assassiné. Au sud tunisien, s'affrontèrent des tunisiens à des unités militaires. Ce fut la radicalisation de la résistance des militants, à travers tout le pays. Les arrestations arbitraires des militants, et leur emprisonnement, devinrent une pratique courante des autorités coloniales. Dans une étude du mouvement national, le professeur Khlifa Chater, parle même d'une armée de libération nationale, en faisant remarquer entre autres " Peut-on, pour autant parler d'une armée de libération nationale, dans le sens d'une structure centralisée, sous un commandement militaire unique. Certains chefs de groupes l'ont prétendu.Murad Boukhris, qui devait créer avec Ali Zlitni le camp d'entraînement de Tripolitaine, parle de l'armée de libération tunisienne, Sassi Lassoued se désigne comme chef de cette armée. " En réalité ce groupe armé forma ce qu'on appela les Fellaguas. Ceux-ci n'avaient d'uniformes ni de tenues particulières de combat. Mais ils s'étaient mobilisés surtout dans les montagnes, pour mener un combat acharné pour la libération du pays. Ce n'était pas à proprement parler, mais leur action ne fut qu'encourager davantage les militants qui leur prêtèrent main-forte. Il n'hésitèrent pas à leur fournir des armes par tous les moyens. Khlifa Chater précité, ajouta à ce propos. " La mobilisation populaire davait permettre d'assurer leur armement, par le don d'armes abandonnées par les forces de l'Axe et surtout des fusils de chasse. " Les Fellaguas, étaient appelés par Bourguiba lui-même en novembre 1954, à déposer les armes, lorsque les négociations en vue de l'autonomie interne allaient être engagées.