Hamdi Meddeb joue-t-il avec le feu ? Il prend des risques c'est sûr. Ses décisions et contre-décisions choquent sans doute. Et lorsqu'il confie l'équipe seniors au jeune Kanzari, il n'est pas dit qu'il ait fait cela sur un coup de tête. Revenons de près de vingt sept ans en arrière. Une tuile tombe sur la tête de Naceur Knani : le monumental Hassen Belkhodja décède. Qui pour le succéder ? On nomme justement celui qui n'était pas dans ses bonnes grâces. Hmid Dhib était entraîneur de l'équipe. Ce n'était pas du goût de Naceur Knani, qui n'avait pas digéré d'avoir été limogé quelques mois auparavant parce qu'il avait fait venir Makhloufi (contre l'assentiment de Hassen Belkhodja). A l'avènement de Naceur Knani, Hmid Dhib reste quand même en place. L'Espérance remporte le championnat. Knani n'en ruminait pas moins une revanche : en finir avec ce qu'il appelait « les mandarins ». Comment ? Il prend un risque fou. Il lance un illustre inconnu, diplômé en handball converti au foot et entraîneur des cadets : Mrad Mahjoub. L'histoire ne donnera pas raison à Naceur Knani. Mrad Mahjoub ne réussit pas à l'Espérance. Un morceau trop gros en fait. Mais il se fait un nom, jusqu'à devenir entraîneur national. L'Espérance dont rêvait Knani survint quelques années, plus tard, sous la présidence formelle d'un « prête-nom » : Abdelhamid Achour, mais avec aux commandes un magicien, un vrai : Amarildo. Ce fut alors la plus belle Espérance de tous les temps. Le titre enivrant de 85. Hamdi Meddeb s'est-il préparé à un cycle de hautes turbulences jusqu'à trouver l'homme idoine ? A l'évidence, oui. Bien sûr, lorsqu'il vire un entraîneur dont l'équipe est première, c'est que quelque chose ne tourne pas rond. On lui reproche « des influences occultes autour de lui ». On dit aussi qu'il « est mal conseillé ». On raconte qu'il est « lunatique » sur les bords. Griefs, quand même, exagérés. Il n'est guère de président dans l'histoire de l'Espérance qui ne fût lunatique sur les bords. Chacun a eu son staff de courtisans et de conseillers. Or, s'il prend autant de décisions dont quelques-unes impopulaires au goût des Espérantistes, c'est qu'il a ses raisons. Parfois, il faut arrêter l'hémorragie. Les pamphlets qu'on lui balance à la figure s'inscrivent dans l'ordre normal des choses. Les Espérantistes peuvent s'en prendre à n'importe qui. Chiboub a été sifflé et hué et pourtant il avait fait de l'Espérance le plus grand club professionnel de tous les temps. Et alors Hamdi Meddeb doit bien comprendre qu'il ne doit pas s'attendre à des effusions de gratitude. En revanche, verser dans la paranoïa serait suicidaire. Ses adversaires attendent ce moment justement. Sauf qu'en définitive, une bonne dose d'impopularité, de temps à autre, fait du bien.