Le Temps-agences - Dans un rapport publié hier à Strasbourg, Thomas Hammarberg s'en prend vivement à la politique de Nicolas Sarkozy. Il "entrevoit le risque que la détermination de chiffres annuels précis conduise à l'arbitraire et à la précipitation, notamment lorsque les autorités subordonnées redoutent de ne pas atteindre les objectifs fixés". "La politique de déterminer annuellement le nombre de personnes irrégulières sur le territoire à appréhender et à reconduire à la frontière semble créer une attitude de hâte, voire de déshumanisation de la part de certaines autorités en charge de la réalisation de ces objectifs", insiste-t-il. Il rappelle, en référence à des cas qui lui ont été signalés lors de sa visite en France au printemps 2008, que "plus aucune interpellation ne devrait être effectuée dans les écoles et préfectures". Près de 600 étrangers ont été interpellés aux guichets des préfectures en 2007 selon la Cimade, association habilitée à assister les personnes placées en centres de rétention. L'expulsion des étrangers en situation irrégulière, promesse de campagne de Nicolas Sarkozy, est l'une des priorités assignées au ministrede l'Immigration, Brice Hortefeux. Bien que l'objectif de 25.000 expulsions n'ait pas été atteint en 2007, la barre a été fixée à 26.000 pour l'année 2008. Thomas Hammarberg note que ces chiffres dépendent plus "de la capacité supposée de l'administration à les atteindre que de la volonté de faire disparaître un tel phénomène", les autorités reconnaissant que les expulsions n'y mettront pas un terme. On estime qu'il y a entre 400.000 et 600.000 étrangers en situation irrégulière sur le territoire français. Le commissaire aux droits de l'homme a notamment visité en janvier 2008 la zone d'attente de l'aéroport de Roissy et le centre de rétention administrative voisin du Mesnil-Amelot. Si la première était alors victime d'une surpopulation conjoncturelle, il note "les efforts matériels entrepris afin d'améliorer les conditions de vie" dans le second. "Nombre de personnes rencontrées ont été interpellées alors qu'elles étaient établies depuis plusieurs années en France, qu'elles travaillaient - souvent dans des sociétés industrielles réputées - et subvenaient à leurs besoins, ne se considérant pas comme une menace pour la société", note le commissaire. "La volonté de lutter contre l'immigration irrégulière ne doit pas empêcher les autorités françaises de prendre en compte l'histoire personnelle, le vécu et l'intégration de chaque personne au moment où est prise la décision de l'inviter ou non à quitter le territoire", ajoute-t-il.