Dans la nuit du 12 décembre1949 mourut le militant Habib Thameur dans un accident d'avion. Il se rendait à Karachi en vue d'assister avec d'autres représentants du Maghreb arabe, au congrès économique islamique. Ce jeune médecin adhéra très tôt à la cause du pays, et devint membre du Néo Destour aux côtés de Bourguiba, Matri, Salah Ben Youssef et tous ceux qui entendaient donner un souffle nouveau à ce jeune parti, né en 1934 de la scission avec l'ancien Destour. C'est surtout au niveau de la stratégie du combat que les « archéo» et les « néo » avaient des points de divergences. L'ancien parti a été en effet taxé de laxisme, car il cherchait des solutions de facilités en n'osant pas s'affronter farouchement au colonisateur. Thâalbi,l'un des fondateurs du vieux Destour, avait pourtant été le premier à oser affronter l'occupant courant tous les risques, et affrontant tous les obstacles. Il connut les affres du bannissement et de la prison. Bourguiba et ses compagnons préconisaient la méthode du combat sans merci sur tous les fronts. En même temps, il fallait faire entendre la cause tunisienne au niveau international . Car à vrai dire , depuis le retour de Thâalbi de Paris personne n'avait pris la relève, que ce soit au sein de l'ancien ou du nouveau parti. Bourguiba y pensa sérieusement, et après l'occupation allemande et à la fin de la deuxième guerre mondiale, il se déplaça au Caire afin d'y rencontrer différentes personnalités politiques et s'entretenir avec eux du problème tunisien. De son côté Habib Thameur, qui fut exilé durant la deuxième guerre, à Marseille et en Italie, ainsi que d'autres militants préconisa depuis qu'il fut remis en liberté, de militer aussi bien pour la cause tunisienne que pour celle du Maghreb arabe. Avait-il dévié de la ligne tracée par le Néo-Destour, en prenant certaine liberté dans la stratégie qu'il entendit mener dans son combat, comme semble l'affirmer certains ? Sur le fond il n'y avait en tous les cas aucune déviation, son combat étant pour un idéal commun : la dénonciation de toute oppression quelle qu'elle fut. Avait-il voulu jouer la carte allemande durant la deuxième guerre mondiale ? Ce ne sont que des supputations avancées par certains en se fondant sur la lettre de mise en garde que lui avait adressée Bourguiba à ce sujet. D'ailleurs ce même prétexte permit aux autorités coloniales de destituer à tort, le martyr Moncef Bey, qui n'avait en réalité jamais collaboré avec les forces allemandes, et qui ne s'intéressait qu'à la cause tunisienne. Habib Thameur, avait eu peut-être une divergence de point vue avec Bourguiba sur la façon de mener le combat, à un moment donné et dans une conjoncture déterminée. Mais , cela n'affecta en rien son patriotisme et ne met aucunement en doute sa sincérité. En 1946, il se rendait à Karachi pour faire entendre la cause tunisienne, dans un congrès économique islamique. Il était accompagné de militants maghrébins. Il croyait à un idéal tant espéré: la libération de tout le Maghreb du joug du colonialisme. D'ailleurs cette stratégie à faire connaître la cause tunisienne à l'extérieur, a été préconisée par plusieurs militants, le fondateur du Destour, Abdelâaziz Thâalbi qui fut le premier à le faire en commençant par se rendre à Paris, puis au Caire, et même en Inde. Bourguiba se rendit également au Caire, à un moment donné, où Salah Ben Youssef était secrétaire général du Néo Destour. Un autre militant s'expatria en Syrie, après la rupture définitive entre les « néos » et les archéos » : Mohieddine Klibi, qui fut l'un des fondateurs de l'ancien Destour, et qui mourut au Moyen Orient, quelques années avant l'indépendance Habib Thameur est mort avec cet idéal en tête, en vrai martyr.