La banque et l'entreprise : complices et complémentaires mais qui doivent collaborer dans un monde économique ébranlé par la crise. Sauf que parfois, souvent même, ces deux entités ont des intérêts divergeants. En ces temps difficiles, par exemple, chacune fait prévaloir l'intérêt de son activité et par ricochet sa position sur le marché local. On cherche à se protéger contre les répercussions néfastes du choc financier et l'alliance banque-entreprise n'est plus aussi évidente. Elles doivent en découdre avec les dysfonctionnements liés à l'ensemble du système. L'entreprise pointe du doigt la banque et lui impute une part de la responsabilité dans le ralentissement de son activité. La banque, quant à elle, rejette la responsabilité prétextant la crise pour justifier sa position un peu trop « frileuse ». Dans ce cadre, l'UTICA (Union Tunisienne de l'Industrie, du commerce et de l'Artisanat) a organisé hier à son siège un colloque portant sur le thème : « les relations banques-entreprises à l'épreuve de la crise économique internationale». Deux panels ont meublé cet événement, à savoir, « Les banques-entreprises : intérêts convergents à l'épreuve de la crise » et « Pour une alliance banque-entreprise ». « Il faut que l'entreprise joue franc jeu et considère la banque comme son partenaire numéro un » affirme M. Taoufik Baccar, Gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie. Après un rappel détaillé des mesures prises pour contrer les effets de la crise, le Gouverneur a mis l'accent sur l'effort notable des banques tunisiennes pour soutenir l'entreprise dans ce contexte morose. Toutefois, les institutions financières ont tendance à négliger l'intérêt du financement de l'activité de l'entreprise en privilégiant la protection de la leur. A l'heure, où les unités de production éprouvent le besoin d'un appui financier pour sortir de la spirale infernale provoquée par la crise, la banque à son tour se montre plutôt sceptique. « Je souhaite que cette réunion soit pacifique et non pas une occasion pour ouvrir le feu sur la banque et l'entreprise...les banquiers font un effort colossal pour soutenir l'économie nationale» déclare M. Hédi Djilani, président de l'UTICA. Une réunion pacifique est-elle justement possible dans un cadre où une majorité écrasante des entreprises avait une opinion défavorable quant au rôle des banques dans le sauvetage de leur activité secouée par la crise ? Un effort colossal, mais qui ne réussit pourtant pas à abréger les délais de déblocage des fonds et à baisser les frais de crédits ne serait-ce de façon ponctuelle. Et ce n'est qu'une partie. Le Gouverneur de la BCT assure une nouvelle fois que les liquidités existent bel et bien sur le marché financier local. Qu'est-ce qui freine alors l'accès des entrepreneurs en difficultés aux fonds nécessaires pour le rebondissement de leur activité ainsi que l'investissement ? Pourquoi observe-t-on encore des refus de crédits à des entreprises ravagées par le tsunami financier alors que l'argent ne manque pas ? « 325.000 PME pour la grande majorité, sont nées grâce aux banques et la facilité de l'accès au crédit, et aussi à la confiance qui caractérise leurs relations, car ce sont elles qui contribuent à la prospérité de nos banques » affirme Mme Leila Khaiat, vice-présidente de l'UTICA. La facilitation de la création d'une PME par les institutions financières (en accordant les crédits) est-elle cependant à elle seule suffisante pour prouver le degré de son engagement? Les banquiers disent que nombreuses sont les lois qui stipulent la simplification des procédures pour bénéficier soit d'un financement soit d'un rééchelonnement des dettes etc. Sauf qu'elles demeurent inutilisables par les parties concernées. Le ton observé ne laisse pas entendre et conforter l'alliance prétendue entre la banque et l'entreprise. On s'accorde sur un point : la banque a besoin de l'entreprise et l'entreprise a besoin de la banque mais on ne s'accorde pas sur plusieurs points, surtout celui du partenariat dit « gagnant-gagnant ».