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Makthar, le toit de la Tunisie
Redécouvertes
Publié dans Le Temps le 04 - 03 - 2007

Mactar construite à 950 mètres d'altitude et Thala bâtie à plus de 1000 mètres se disputent non seulement le record d'altitude mais aussi celui du froid.
Mais, vous verrez que, bientôt, avec le réchauffement du climat - dont on nous rebat les oreilles ... faute d'avoir quelque chose d'intelligent à dire !
- Thala et Mactar seront, peut-être, des « stations climatiques » recherchées !

LE CADRE
L'une et l'autre sont d'ailleurs situées dans la partie centrale montagneuse de la Tunisie qu'on peut appeler la Dorsale ou comme l'a fait Ch. Mouchicourt, il y a déjà un demi-siècle, le Haut Tell. Les plissements de l'ère tertiaire, peu violents d'ailleurs, prolongent la chaîne de l'Atlas et sont orientés, en général, du Sud-Ouest au Nord-Est. Ce mouvement a été contrebalancé par d'autres poussées perpendiculaires et des failles d'effondrement qui ont engendré une structure en voûtes et cuvettes. Ces reliefs, peu importants, ont été modifiés par une érosion brutale qui a formé une région compartimentée et variée où les chaînons et les plateaux s'opposent aux plaines qui communiquent assez facilement.
Le climat et la végétation accroissent encore cette diversité naturelle. Les sommets et les pentes plus arrosées que les plaines sont moins chauds et plus boisés que les cuvettes. La dégradation continentale engendre des hivers froids et souvent enneigés.
L'érosion a certainement été accentuée depuis l'Antiquité, par la déforestation. Les vallées de l'oued Ouzafa-Siliana, utilisées dans l'Antiquité, comme voies de communication, densément bordées d'agglomérations, sont devenues des gorges inhospitalières. Des travaux importants de régularisation des cours d'eau ont disparu : Mididi conserve des vestiges de « quais » - à l'instar de ceux d'Oum El Abouab / Seressi - destinés à contenir le torrent et non à la navigation.
Le cadre géographique de ce Haut Tell aurait pu être le siège d'une organisation politique avec ses riches plaines à blé, ses coteaux propices à l'arboriculture, ses sommets boisés et giboyeux, ses carrières de bonnes pierres à bâtir et ses nombreuses mines.
D'un point de vue militaire, c'est la seule région de Tunisie où puisse être organisée une résistance, contre les envahisseurs venus de la mer et contre les peuples venus des steppes du sud. On peut penser que si le pouvoir politique s'est toujours fixé dans la steppe kairouanaise ou au débouché de la vallée de la Medjerda, c'est probablement parce que ces pouvoirs ont toujours été établis par des envahisseurs puissants qui ont conquis les parties les plus riches et les plus faciles à soumettre : les plaines côtières et centrales mais ont négligé, en les tenant en respect, les régions montagneuses.
Une seule fois, au cours de l'histoire, un « état » véritablement autochtone s'est développé en partie, sur le Haut Tell, c'est le royaume numide, plus précisément Massyle, du roi Massinissa et de ses descendants, qui conquiert son indépendance vers le IIIème siècle avant J.C. et la conserve, malgré Rome, jusqu'au milieu du 1er siècle avant J.C.
Nous avions affirmé, dans un article publié en septembre 2005, qu'il était aussi facile de venir faire du tourisme à Mactar que d'aller à Tabarca même si les infrastructures hôtelières sont encore absentes. Mais El Kef, Kairouan ou Siliana et leurs hôtels très confortables ne sont qu'à une centaine de kilomètres, une heure d'auto dans des régions très pittoresques et parsemées de vestiges historiques.
Nous avions écrit aussi que Mactar nous semblait être assez importante pour mériter un article entier.

L'HISTOIRE
Les preuves des premières installations des hommes sur le site de Makthar sont de superbes monuments mégalithiques. Mais, les très nombreux sites préhistoriques qui parsèment les alentours semblent attester que toute la région a été peuplée depuis le paléolithique le plus ancien. Des escargotières - appelées aussi R'madiya : de l'arabe « R'mad » : cendre - constituées d'un amoncellement de cendre, de coquilles d'escargots, de déchets de cuisine et de débris d'outils de pierre ou de tessons de poterie sont situés tout autour de la ville. Elles prouvent que le site a été occupé sans interruption jusqu'à l'époque de la protohistoire - voire de l'Histoire - où ont été édifiés les mégalithes - dont certains semblent avoir été utilisés jusqu'au 1er siècle après J.C. - dans un vaste royaume qui comprenait non seulement, en Tunisie, le Haut Tell et les steppes présahariennes qui entourent Capsa / Gafsa mais aussi une grande partie de l'Est algérien depuis les rivages méditerranéens - où se trouve Hippo regius : la « royale » - à Cirta / Constantine, voisine de la sépulture monumentale de la Souma du Kroub, peut-être de l'énorme tombeau du Médracen, jusqu'au massif des Aurès peuplé par des Maures voisins et alliés de Tacfarinas : le chef des Musulames installés de part et d'autre de la frontière algéro-tunisienne.
Makthar semble avoir été, avant tout, une forteresse numide qui contrôlait les voies reliant les steppes de Kairouan et de Sbeïtla à la Capitale Cirta-Sicca / El Kef. A l'époque, elle était certainement un centre administratif et militaire important : il y subsiste des vestiges d'une enceinte fortifiée.
Les monuments mégalithiques sont de deux types : le dolmen « simple » formé d'une grande dalle plate reposant « horizontalement » sur des blocs dressés ou des « monuments » complexes, formés de plusieurs salles séparées, utilisés durant des siècles pour de multiples inhumations. La présence des Numides à Makthar est aussi attestée par de nombreuses épigraphies en langue libyque et une bilingue libyco-punique.
L'influence de la civilisation punique a d'ailleurs été très profonde. En plus des inscriptions en langue néo-punique, il existe à Mactar un des plus important tophet de Tunisie, situé dans le ravin que surplombe l'arc de triomphe de Bal El Aïn.
A l'intérieur du site protégé, le temple d'Hathor Miskar est un sanctuaire typiquement punique avec son grand mur extérieur qui délimite un enclos sacré, dans lequel on pénétrait par un propylée et qui était beaucoup plus étendu que le petit temple qu'il contient. Sous le sanctuaire, se trouve une crypte appelée « Chambre des choses saintes ». Makthar, à l'instar de Medeina / Althiburos et Thala voisines, a longtemps été administrée, comme Carthage, par des suffètes élus ... jusqu'au moment où la ville fut élevée au rang de colonie, en 180 après J.C. sous le règne de l'empereur Marc-Aurèle. Le dieu romain Saturne masque, mal, la divinité carthaginoise : « Baal Hammon ».
L'influence carthaginoise, intégrée à l'identité numide, a manifestement été un élément de la résistance à la romanisation. Makthar semble avoir eu le statut de ville libre au moment de l'annexion du Royaume Numide en 46 avant J.C. par Jules César vainqueur des Pompéens alliés au Roi Juba.
La romanisation - comme à Bulla regia et à Thala - s'est faite très progressivement par une adhésion volontaire des élites à la civilisation romaine. La lente pénétration des institutions, des mœurs, des patronymes et des croyances romaines peut être suivie avec assez de précision. Vers le début du IIème siècle, l'empereur Trajan (97-177 après J.C.) accorde la citoyenneté romaine aux élites de la ville qui font construire l'arc de triomphe, dédié a cet empereur, sur le forum, pour commémorer solennellement cet évènement. Vers 180, après la construction du Capitole, Mactaris, consacrée à Apollon, devient colonie, avec les mêmes droits qu'une ville romaine. Elle s'appelle alors Colonia Aelia Aurelia Augusta. Mais, même alors, Bacchus - un des protecteurs de la ville - dont le temple domine le vieux forum, Cérès, Apollon - dieu protecteur de la cité - dont le temple est situé près de l'aqueduc et Mars - patron des « Juvenes » qui se réunissaient dans un immeuble situé près des monuments mégalithiques - ont de profondes ressemblances avec leurs homologues carthaginois.
Durant ces deux premiers siècles, Mactaris romaine, grand marché céréalier et oléicole ainsi que centre d'élevage important connaît une prospérité importante. Le travail de la laine enrichit les artisans. Les Grands Thermes peuvent être édifiés au sud du site. L'élite des magistrats de la ville fournit autant de hauts fonctionnaires à l'administration impériale que la Gaule toute entière, a écrit G. Ch. Picard qui a longuement étudié la ville.
Bien que le début du IIIème siècle ait vu se profiler un certain déclin, dû surtout au fait que les principaux exploitants fonciers étaient écrasés par une lourde fiscalité et que des troubles aient éclatés, à la fin de ce siècle, sous le règne de l'empereur Dioclétien, l'ordre est rétabli et les édifices restaurés. Le christianisme s'est bien implanté et les églises se sont multipliées. Mais bientôt la communauté chrétienne s'est déchirée. Les luttes entre catholiques et donatistes, engendrées par l'arrivée des Vandales à partir de 430, ont appauvri la cité. Un vandale Hildeguns, sans doute un seigneur de la région, est enterré dans une basilique proche de l'arc de Trajan.
La conquête du pays par les Byzantins ne parvient pas à rétablir l'ordre ni à endiguer le déclin. Les énormes révoltes des Berbères vont déferler, durant un siècle, sur tout le pays.
L'invasion arabe ne changera rien : Makthar, Berbère et montagnarde n'intéresse pas les nouveaux maîtres de l'Ifrikiya. Les invasions hilaliennes du XIème siècle entraînèrent l'abandon complet du site qui ne sera réoccupé que vers 1890 sous le Protectorat français.


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