La chambre criminelle du tribunal de première instance de Tunis a examiné dernièrement une affaire de traversée des frontières avec un document administratif appartenant à autrui. L'accusé est un homme âgé de 44 ans, résident en France depuis 1993. Il y était entré d'une façon régulière pour poursuivre des études. Il a obtenu trois cartes de séjour en tant qu'étudiant. Depuis, sa scolarité a balancé dans l'anonymat et il est passé dans la semi clandestinité. Ses patrons savaient qu'il était entré régulièrement. Pourtant... Donc, il ne travaillait pas dans le noir. Il était déclaré et payait ses impôts. Il avait une immatriculation sociale. Pourtant, il n'avait pas de papiers réguliers. Là, c'est une question se rapportant à la situation des immigrés tunisiens en France et ce n'est pas notre ordre du jour. Bref, notre bonhomme a, aujourd'hui, la quarantaine passée et il a eu le mal du pays. Il n'a pas vu sa mère depuis bientôt quinze ans. Ses neveux ont grandi et quelques uns parmi eux se sont même mariés. Or, il ne pouvait pas rentrer régulièrement chez lui. Et, s'il se déclarait à la préfecture, sa situation en France serait foutue. Il risquerait l'expulsion. Alors, il a eu l'ingéniosité de demander à son frère, en mission en France, de lui prêter son passeport afin d'aller en Tunisie visiter la famille et de rentrer au bout d'une semaine. Comme ils se ressemblaient telles des sosies, le frère de l'immigré irrégulier a accepté la proposition en priant toutefois son frère de ne pas dépasser la période convenue. Le passage de l'émigré en Tunisie était passé sans bavure. Son retour allait se passer de la même façon n'eut été la question de l'agent de police des frontières qui lui a demandé les raisons de son deuxième retour en France. Le voyageur a marqué un temps d'hésitation suscitant la suspicion de l'agent qui vérifiait davantage le passeport et les mouvements de l'intéressé. Ce dernier était de plus en plus perplexe et n'arrivait même pas à répondre de ses déplacements de la dernière année. Le pot aux roses a alors été découvert. Le passager clandestin a été arrêté pour usage de faux papiers. Son frère resté en France a dû déclarer la perte de son passeport aux autorités consulaires tunisiennes et obtenir un laissez-passer pour rentrer en Tunisie. Il a été, lui-aussi, interpellé à son arrivée parce qu'il était soupçonné d'aider son frère dans ce passage irrégulier des frontières. Interrogé pendant l'instruction et devant le tribunal, il a nié être au courant des manigances de son frère. Il a affirmé que ce dernier ne lui a annoncé la nouvelle qu'à partir de la Tunisie. Il était, alors, devant le fait accompli. Il est vrai qu'il n'avait pas dénoncé son frère priant même le Bon Dieu pour que tout se passe sans encombre. Il savait qu'il ne serait pas épargné lors d'éventuelles complications. Et il était effectivement au milieu d'un imbroglio juridique, lui, le haut cadre. Heureusement pour lui, la cour a pris en considération sa version des faits qui a, d'ailleurs, été confirmé par son frère. Et vu l'absence d'antécédents judiciaires dans son casier judiciaire, le tribunal l'a condamné à une amende. Quant à l'émigré clandestin, il a été condamné à un an de prison. Les deux frères ont interjeté appel.