Architecte et sculpteur qui s'est surtout illustré dans le genre monumental, Frédéric-Auguste Bartholdi (Colmar, 1834 – Paris, 1904) demeure célèbre pour avoir réalisé La Liberté éclairant le monde, offerte par la France aux Etats-Unis le 4 juillet 1884, et le Lion de Belfort, un grès rouge de 22 m dont la reproduction en bronze se tient place Denfert-Rochereau à Paris. Les lumières de l'Orient Les rapports de Bartholdi avec l'orient sont assez peu connus : en 1855, équipé de matériel photographique, il accomplit la remontée du Nil en huit mois, en compagnie des orientalistes Auguste Belley, Narcisse Berchère et Léon Gèrôme. Celui-ci utilisera les clichés pour ses toiles. Il découvre la sculpture colossale de l'Egypte pharaonique et l'Egypte lui donne le sujet de son premier groupe en bronze La Lyre berbère (Lyon) exposé au Salon de 1857. Bartholdi accomplit un deuxième voyage en Egypte en 1869, lors de l'inauguration du Canal de Suez. Il apporte avec lui le projet d'un phare gigantesque La Liberté éclairant l'Orient qui doit témoigner de l'alliance du passé et du progrès. La maquette représente une femme, voilée ou non selon les versions, brandissant une lanterne. Placé à l'entrée du canal, le nouveau phare veut rendre hommage au merveilleux phare d'Alexandrie et saluer l'Egypte renaissante qui apporte la lumière à l'Asie. Ferdinand de Lesseps (1845 –1894) - dont le nom est durablement attaché au percement du Canal de Suez (1869) et au scandale de Panama-, ne voit pas ce que l'affaire ajouterait à sa gloire. L'œuvre est soumise au khédive Ismaïl pacha mais les finances égyptiennes ont souffert de la construction du canal et la statue ne sera jamais réalisée.
La Liberté sur le nouveau continent C'est Edouard Laboulaye (1811-1883), professeur de droit au Collège de France et républicain convaincu, qui est à l'initiative d'un cadeau solennel aux Etats-Unis d'Amérique pour célébrer l'amitié franco-américaine et le centenaire de l'indépendance (1874). Il suggère à F. Bartholdi de ressortir des cartons le projet égyptien. L'opération est considérable et va connaître des modifications successives et de grandes difficultés de financement. Comme beaucoup d'autres personnalités politiques et artistiques du moment, Laboulaye et Bartholdi sont francs-maçons et la statue exprime subtilement leurs idéaux maçonniques et libéraux : la lumière et le livre (c'est-à-dire la raison et la loi) feront triompher la liberté sur les sept continents (les sept branches de la couronne) ; la glorification de la démocratie américaine est une subtile invitation à abattre les régimes autoritaires de l'Europe de cette époque. Finalement, la réalisation de la Statue la plus colossale jamais construite (35 mètres de haut, 93 avec le piédestal, ses infrastructures ayant été réalisées par Gustave Eiffel, concepteur de la Tour éponyme) a été couverte par des souscriptions publiques, des dons individuels et municipaux et une loterie ou on a vendu 300 000 tickets. Le 28 octobre 1886, l'inauguration attire plusieurs dizaines de milliers de personnes et d'invités officiels. Pour l'événement, le Congrès américain a voté un crédit spécial dont pas un dollar ne devait être employé à acheter de l'alcool ou du tabac, prohibition oblige.
Sur le Socle de la Statue, figure sur une plaque de bronze gravée (qui n'est pas d'origine, elle a été rajoutée en1903) la fin du poème de la poétesse américaine, Emma Lazarus, intitulé « The New Colossus» (le nouveau colosse ) qui va longtemps nourrir les espérances de millions de candidats à l'immigration.]
Give me your tired, your poor, Your huddled masses yearning to breathe free, The wretched refuse of your teeming shore. Send these, the homeless, tempest-tost, to me, I lift my lamp beside the golden door ! Donne-moi tes personnes épuisées, tes pauvres, Tes foules entassées qui aspirent à respirer librement,