L'année scolaire tire déjà à sa fin. Le mois de mai rime généralement avec les examens décisifs couronnant les efforts et le labeur de toute une année. Si on admet que ceux (celles) ayant régulièrement et sérieusement travaillé sont en principe à l'abri, sauf un accident de parcours toujours possible quoique dans de très faibles proportions ; les autres, les tireurs au flanc ne désarment pas pour autant, et tentent par tous les moyens d'accéder aux places honorifiques. Ils se rabattent bien évidemment sur des stratagèmes aussi détournés que continuellement innovés, devançant toujours d'une courte tête la vigilance des superviseurs. Prétendre que nous n'avons jamais sollicité le « secours », l'assistance d'un(e) camarade lors de notre scolarité équivaudrait à du pédantisme, à de la fanfaronnade purs et simples. Qui de nous n'a pas été contraint à quêter une formule mathématique, un théorème en physique, une date précise en histoire voire une citation clé d'un auteur de renommée ; et ce suite à une absence, à un trou de mémoire véritables épées de Damoclès suspendues au-dessus de nos têtes pendant les stressantes épreuves. Oui, mais une fois l'obstacle levé, la machine se remet immédiatement en branle, carburant à plein régime. Même les superviseurs compréhensifs et magnanimes n'en faisaient pas une affaire et fermaient avec un zeste d'indulgence les yeux (ne sont ils pas passés eux aussi par pareilles situations ?) Depuis et en étroite relation avec la prolifération des chaînes satellitaires, de l'Internet et ayant comme corollaire inéluctable un manque patent, évident des plages horaires réservées naguère aux révisions ; les élèves se contentant du strict minimum, entendre les vagues notions retenues en classe quand il leur arrive de s'intéresser à ce que débitent les enseignants. Pour compenser cette carence préjudiciable le jour J, la tendance actuelle est à la fausse copie « la fouska ».
Aberrations de l'administration Une parenthèse cependant et qui ne serait sûrement pas appréciée par l'administration mais nous la soulevons quand même étant intimement persuadés de son immense impact sur la prolifération de la fraude : avant, chaque enseignant surveillait personnellement ses épreuves, ses élèves. Etant parfaitement au fait de tout ce qui se rapportait à son groupe, il « dispatchait », séparait les candidats selon sa connaissance de leurs qualités et faiblesses : le premier au bureau, les plus fainéants, devant, aux places d'honneur, donc facilement contrôlables. Le respect, conjugué à la peur d'encourir la colère de l'enseignant inhibait toutes ébauches de velléités malintentionnées de notre part.
Elèves intouchables Qu'en est-il au jour d'aujourd'hui ? L'instit délivre les sujets à l'administration qui prend en charge et supervise le déroulement des examens (semaine bloquée oblige). Sur les six classes en moyenne qu'il enseigne, le professeur ne peut en surveiller qu'une et ce n'est pas toujours le cas. Il est remplacé par un collègue d'une autre discipline le plus souvent, une surveillante, la bibliothécaire voire la préposée aux billets d'entrée. Dès l'ouverture des portes, la ruée vers les places stratégiques qu'on occupe en binômes selon un plan préétabli, bien défini à l'avance ; et le suspense de durer jusqu'à la désignation du superviseur. Les profs de sport, d'initiation technique, d'éducation civique étant les plus applaudis à leur arrivée en salle ; étant reconnus par leur légendaire souplesse... Certains, même surveillant leurs propres élèves, n'osent même pas demander à X ou Y de changer de places, sûrs qu'ils étaient de ne point être obéis et pour prévenir une réaction violente, hostile à titre de représailles...et avec comme toile de fond le laxisme légendaire du proviseur ne voulant point créer de vagues risquant tout simplement de provoquer sa mutation précipitée. D'où la parfaite similitude des copies avec les mêmes bêtises et erreurs que vous répertorieriez chez tous les candidats ! A la correction, on s'en rend fatalement compte, mais le plus clair des enseignants questionnés de se contenter de laisser courir ; le phénomène s'est quasi généralisé. Des échos nous parvenant des conseils mêmes des classes font état de dissensions, frictions voire reproches des uns à l'endroit de la complaisance criarde des autres accusés à demi mots d'avoir fermé les yeux.
Vaste panoplie Les moyens utilisés pour contourner la « surveillance » sont constamment réactualisés, à l'avant-garde, en diapason avec l'intelligence et fourberie des postulants. Certains profs privilégiant et exigeant le cours intégral d'une seule traite « CHARBIT ME ou SABBA » les élèves préparent à l'avance une multitude de copies portant chacune sur une leçon, à la fin de l'épreuve, la double-feuille est concernée et remise à l'enseignant sans autre forme de procès. Les petits bouts de papiers à l'écriture microscopique (œuvre de certaines photocopies réduisant une page entière à minima) dissimulés dans les multiples poches, les formules transcrites sur les tables, les avants bras, les paumes, les cuisses, ne sont plus d'actualité, dépassés. Désormais, on laisse le cahier de cours du bûcheur de la classe derrière la chasse des toilettes, et à tour de rôle, toute la clique de faire un tour du côté des latrines se plaignant subitement de coliques abdominales, et présentant à l'unanimité une gastro-entérite aiguë.
La dernière Un épisode rocambolesque et véridique ayant eu lieu cette semaine donc « new-new » dans un lycée de la banlieue sud que nous ne citerons point (notre but n'étant pas de nuire à qui que soit mais de sensibiliser les différentes parties concernées) : lors d'une épreuve scientifique, deux élèves nullardes supplièrent leur prof de sortir à tour de rôle pour un problème urgent, au retour de la seconde, les deux résolurent miraculeusement la question et se permirent même le luxe de sortir avant l'heure. Interloquée, l'enseignante les rappela à la fin de l'épreuve, et les pria de réécrire tout bêtement ce qu'elles avaient comme par magie notifié 5minutes auparavant ; elles ne purent le faire. Pire, la solution leur a été donnée selon leurs aveux par un autre...enseignant qui interrogé par la prof jura ses grands Dieux ne pas être au fait de la supercherie et avoir agi de bonne foi ! Un autre procédé facilité par la non-connaissance des superviseurs de l'effectif à surveiller : en tout début de séance, le sujet est jeté au-dehors où des camarades « calés » appartenant généralement à un échelon supérieur résolvent et traitent l'épreuve en collégialité en un tour de main. A la sonnerie, et profitant de la confusion classique qui se crée immanquablement à chaque fin des épreuves, on se faufile à l'intérieur des salles et on remet le sujet traité soit au concerné(e) avec son nom dessus, soit on le dépose en toute quiétude sur le bureau du superviseur occupé qu'il était à ramasser les copies des autres candidats, et qu'il glissera, sa tournée terminée, dans le paquet des épreuves sans s'en rendre compte. L'instit n'ayant nullement le droit, ni le courage et l'audace de fouiller les candidats et de les soulager de leur portable, le sujet est envoyé par SMS à une tierce personne qui le solutionne en deux temps trois mouvements, le mode vibreur assurant la discrétion de la manœuvre !
Sévir au plus vite Le niveau d'instruction de nos enfants de baisser dangereusement, il serait salutaire, utile, pour remédier à cet état de fait de commencer par lutter de façon efficace et efficace contre ce fléau, de revoir le système de surveillance des examens, surtout de conférer plus d'autorité aux enseignants et ce en étroite collaboration avec une administration plus ferme, plus intransigeante et inflexible, imposant le respect et passant outre les considérations sordides, personnelles, dignes de certains marchands de tapis. Faut-il rappeler que ceux (celles) ayant pris le pli d'user perpétuellement de ces moyens détournés et illicites, finiront par piquer au jeu, par se prendre réellement pour des génies en la matière, et tenteront le coup de trop au bac, avec à la clé cette fois-ci 5 longues années de disette, de privation de participation à l'épreuve. Mohamed Sahbi RAMMAH Légende : Certains, même surveillant leurs propres élèves, n'osent même pas demander à X ou Y de changer de places