Lotfi OUENNICHE - Ce qui s'est passé dimanche à l'église Sayidat Al-Najat au cœur de Bagdad dépasse en cruauté et en horreur tous les attentats commis à ce jour. Les 120 fidèles chrétiens priant à la veille de la Toussaint, ignoraient qu'une mort affreuse les guettait. La prise d'otages dans ce paisible lieu de culte et l'assaut donné par des commandos irakiens aidés par les forces américaines allaient tourner au carnage : 46 morts parmi les fidèles, en majorité des femmes et des enfants, selon un bilan fourni par le ministère irakien de l'Intérieur. Ce n'est pas la première fois que la communauté chrétienne est la cible des attaques d'Al Qaïda, mais cet attentat est, dit-on, le plus meurtrier depuis l'invasion conduite par les Etats-Unis en 2003. Cette communauté, dont le nombre est en nette régression, devait regretter l'ère de Saddam où elle jouissait de la protection, de la sécurité et de la liberté du culte. Quels que soient les mobiles de cet acte criminel, les terroristes ont fait montre, cette fois, d'une extrême atrocité. Selon un rescapé, les assaillants étaient armés de kalachnikovs, de grenades et vestes d'explosifs. Ils ont immédiatement ouvert le feu, tuant deux prêtres et jetant une grenade sur sept fidèles qui tentaient d'échapper. Il n'y a pas de doute, c'est l'empreinte d'Al-Qaïda. Mais, ce qui intrigue c'est cette facilité d'opérer du groupe dans cette partie de Bagdad, proche de la zone verte, normalement sous haute surveillance. Ceci soulève, encore une fois, la question de l'aptitude des forces irakiennes à assurer la sécurité dans le pays et sur le degré de leurs infiltrations par les groupes terroristes. Car, il est clair que l'attaque était préparée de longue date. Les armes et les munitions retrouvées dans la cathédrale nécessitaient du temps pour les introduire et une complicité des forces de sécurité reste dans ce cas, une hypothèse plausible. Mais, dans l'Irak d'aujourd'hui, toutes les cartes sont brouillées. Le pays est sans gouvernement depuis de longs mois et les institutions de l'Etat sont vouées à un immobilisme affligeant. Il n'est pas étonnant dès lors que l'anarchie et le chaos s'installent et que les groupes terroristes trouvent le chemin balisé pour accentuer davantage le drame de l'Irak et des Irakiens.