Raouf KHALSI - Ce n'est pas une crise sociale : mais l'émergence de la société réelle, celle que l'ancien régime n'a pas su – ou pu – écouter. Quelque part nous lisons, voyons et entendons dire que les élites se placent déjà « aux avant-postes confortables » de la Révolution. Les débats foisonnent, enrichissants, à travers des journaux, les ondes des radios privées, les chaînes privées même si la Télévision nationale a éliminé le logo du 7 Novembre, mais continue d'être regardante quant à certains tabous encore tenaces et qui font encore peur… Il n'empêche: les journalistes saisissent l'importance de ce moment historique. Celles qu'on appelle (élites) ne seraient pas inspirées de donner des leçons à des jeunes qui crient leur rage et leur détresse dans un pathétique sursaut de dignité. Mais elles ont le droit d'éclairer, d'expliquer de parler avenir, de s'auto-critiquer aussi, parce que les revendications matérielles des jeunes et les revendications intellectuelles des élites se rejoignent : pain et démocratie ; démocratie et pain… Rien à voir, mais alors rien avec la révolution française puisque l'Occident bien-pensant cherche à re-coloniser les hauts faits de notre histoire. Car hier, les syndicalistes sont sortis du gouvernement d'Union nationale avant-même d'y être entrés. Les ministres de l'opposition y réfléchissent… Le RCD, «Al Hizb» constitue la pomme de discorde… A cause de son diktat sur tout l'appareil étatique; diktat très fortement structuré par Ben Ali. Peut-être, a-t-on sous-estimé, toutes ces dernières années les ressorts, la capacité à régénérer du Syndicat, depuis qu'on a cherché à le vassaliser… Ce conflit historique doit, néanmoins, rester transversal, démocratique et institutionnel. Car, Mohamed Bouazizi ne s'est pas immolé par le feu pour que le parti et le syndicat rééditent janvier 78… La donne a changé, en effet, puisqu'aujourd'hui, les Islamistes sont là. Vigilance donc… même si le peuple tunisien n'est pas disposé à dérouler le tapis rouge au retour de M.Ghannouchi.