Le Temps-Agences - Le pouvoir iranien a annoncé une manifestation de "haine et de colère" demain contre les chefs de l'opposition Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi, alors que les appels se multipliaient hier pour leur "châtiment sévère" après les rassemblements anti-gouvernementaux de lundi. "La population de Téhéran, après la prière du vendredi, participera avec force à une manifestation pour exprimer sa haine, sa colère et son dégoût devant les crimes sauvages et répugnants des chefs de la sédition et leurs alliés hypocrites et monarchistes", a annoncé le Conseil pour la coordination de la propagande islamique, qui organise les grandes manifestations populaires du pouvoir. Le terme de "sédition", dans le discours officiel, désigne le mouvement d'opposition réformatrice dirigé par l'ancien Premier ministre Mir Hossein Moussavi et l'ancien président du Parlement Mehdi Karoubi, depuis la réélection contestée du président Mahmoud Ahmadinejad en juin 2009. Celui d'"hypocrites" (monafekine) renvoie, lui, aux Moudjahidine du peuple, principal mouvement de lutte armée contre le régime. Les conservateurs au pouvoir se sont déchaînés contre MM. Moussavi et Karoubi depuis les manifestations anti-gouvernementales qui ont rassemblé à leur appel lundi des milliers d'opposants pour la première fois depuis un an, alors que les autorités avaient interdit tout rassemblement et mobilisé massivement les forces de l'ordre. Deux personnes ont été tuées par balle et plusieurs autres blessées dans des conditions controversées durant ces manifestations, le pouvoir accusant l'opposition, qui elle-même accuse les forces de l'ordre. Ces dernières ont par ailleurs arrêté de nombreux manifestants. Hier, les funérailles d'une des victimes, Salee Jaleh, ont donné lieu à des incidents entre "un petit nombre de personnes apparemment liées" à l'opposition et des "milliers de partisans" du pouvoir, selon la télévision d'Etat. M. Jaleh a été présenté officiellement comme un "étudiant bassidji" (membre de la milice islamique du Bassidj), mais certains sites de l'opposition ont affirmé qu'il était "un activiste" du Mouvement vert (opposition). Les appels souvent violents à un procès et un "châtiment sévère" de MM. Moussavi et Karoubi se sont multipliés ces dernières heures, notamment au Parlement. Dans la ville sainte de Qom, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées hier lançant des slogans pour que MM. Karoubi et Moussavi "soient pendus", lors d'une manifestation diffusée en direct à la télévision. Le principal orateur de la cérémonie, l'ayatollah Ahmad Khatami, un conservateur influent, a une nouvelle fois qualifié les chefs de l'opposition de "mohareb" (ennemi de Dieu), crime passible de la peine de mort en Iran. Malgré les menaces, les deux leaders réformateurs, placés de facto en résidence surveillée depuis plusieurs jours, ont appelé hier le gouvernement à "écouter le peuple". "Je vous mets en garde, ouvrez vos oreilles avant qu'il ne soit trop tard et entendez la voix du peuple", a lancé Mehdi Karoubi sur son site internet Sahamnews.org. "Les actions violentes et l'hostilité face aux demandes de la population ne peuvent aider à maintenir la situation actuelle qu?un certain temps. Tirez la leçon du sort des pouvoirs qui se sont éloignés du peuple", a ajouté M. Karoubi, dans une allusion aux révolutions en Egypte et en Tunisie. "Je suis un soldat de la nation depuis près de cinquante ans et j'ai montré que je suis prêt à payer n'importe quel prix", a-t-il averti.