• Bertrand Delanoë savoure sa revanche…Et c'est la première fois qu'il bouge à Tunis sans se sentir muselé - Une rencontre, plutôt, à la bonne franquette ! Bertrand Delanoë, le maire de Paris, Tunisien de souche et Bizertin dans le sang, n'a pas hésité un seul instant à rendre visite à ses amis tunisiens de la gauche… en répondant positivement à l'invitation de la Ligue tunisienne des droits de l'homme et celles de l'Association des femmes démocrates. " Maintenant je prends mon temps… Avant, mes conversations avec mon ami Mokhtar Trifi étaient coupées toutes les trois minutes. Et à chaque fois on recommençait. ", confie M. Delanoë en sirotant son café, bien installé dans le confort …de ses certitudes. " J'ai besoin de ce moment militant affectif et tunisien. " dit-il en émaillant son discours d'anecdotes se rapportant notamment au Président déchu. " La dernière fois où j'ai rencontré Ben Ali, c'était en 2001. Ben Sedrine a été brutalisée à l'époque et mise en prison. Je l'ai défendue auprès de ben Ali qui m'a dit : " mais cette femme est de l'extrême gauche et vous vous êtes socialiste. " Alors je lui ai répondu, mais l'un n'empêche pas l'autre. Rien ne justifie de condamner quelqu'un qui veut exprimer ses convictions surtout qu'il s'agit d'une femme qu'on a violentée. " Autre anecdote ? Elle a été racontée cette fois-ci par M. Mokhtar Trifi " Bertrand Delanoë n'a pas obtempéré aux injonctions de l'ancien régime de ne pas aider la LTDH ou les femmes démocrates. Il le faisait savoir dans la presse française et à travers des communiqués. En 2004 il était venu en Tunisie pour rencontrer la société civile. Alors on lui a dit que moi-même et feu M. Mohamed Charfi étions en voyage. Il nous a rencontrés, malgré tout. Ben Ali a annulé ainsi son entrevue avec Delanoë qui avait le choix entre M. Charfi et moi, et Ben Ali. Il a choisi le camp des militants des droits de l'homme. " a-t-il dit. Et la révolution du jasmin ? Et qu'en est-il aujourd'hui ? Comment le maire de Paris retrouve sa Tunisie natale après la chute de Ben Ali ? Et bien notre ami français anticipe sur cette question que la majorité des journalistes présents s'apprêtaient à lui poser " On a dit que la Révolution est importante pour le monde arabe. Certes. Mais je dis que cela est valable pour le monde entier. Cette population intelligente et éduquée qui a conquis sa liberté sans violence, de la manière la plus belle qui soit… Les ONG qui travaillent à Kasserine et à Sidi Bouzid sont soutenues par les Français… Il y aura aussi, à Paris le marché du jasmin où des produits tunisiens y seront vendus. Sans oublier le domaine des arts puisque notre coopération sera artistique, aussi " fait remarquer M. Delanoë qui a rappelé par là-même que la ville de Paris rend hommage à cette révolution en donnant le nom de Mohamed Bouazizi à une rue parisienne. Mais ce n'est pas tout, car le maire de Paris précise qu'on marquera dessus ‘'la Rue Place Bouazizi, en hommage au peuple tunisien'' en concluant " C'est la beauté du 14 janvier. La révolution du jasmin. Ce printemps ne peut qu'être tunisien. " La rencontre a fleuré bon l'odeur des fleurs qu'on s'est jeté entre Tunisiens et Français. C'est tant mieux. Encore est-il, qu'il faut passer aux choses les plus sérieuses quant à l'avenir de cette Révolution. Sihem Ben Sedrine qui était parmi l'assistance a commenté dans la foulée " Si la société civile ne reste pas vigilante la Révolution nous sera confisquée. Cela a été le cas en Roumanie lorsque d'anciens opposants et d'anciens partisans du parti au pouvoir ont fait une coalition. Le scénario se profile aujourd'hui. On a voulu montrer au monde entier que des Islamistes veulent détruire la synagogue. Ce n'est aucunement le cas. Le complot a été fomenté par la police politique tout comme l'émigration clandestine des jeunes tunisiens en Italie. Comme quoi le seul rempart contre les Islamistes et l'immigration clandestine c'est bien Ben Ali, alors on retourne à la case de départ. " a-t-elle signalé en ajoutant " Les ennemis de la Révolution sont nombreux. Il faut empêcher de tels dérapages. On a besoin de nos partenaires et amis français pour construire une Tunisie démocratique. ". Le chantier reste ouvert. Car on a, plutôt, besoin, comme l'a si bien dit M. Kamel Jendoubi, un ancien militant des droits de l'Homme, " non pas de la France de Sarkozy, mais la France des syndicalistes, des hommes libres. C'est la vieille France militante qu'on veut rencontrer. "