Depuis le 14 janvier, date historique de la Révolution tunisienne, le paysage artistique s'est métamorphosé petit à petit et a pris des proportions estimables. Il tente d'être à la hauteur de la Révolution et pour certains artistes, de profiter de la liberté pour exprimer à travers leurs créations, tout ce qu'il ne pouvaient dire sous le régime du président déchu. C'est à ce titre, que « Inside Out », projet d'art global, initié par le photographe français JR, a permis à une pléiade de jeunes photographes tunisiens, de réaliser des portraits sous forme de posters et de les exposer à travers le monde. C'est donc en Tunisie que l'aventure a démarré avec une équipe de photographes qui ont porté ce projet artistique à bras le corps. Cette équipe composée de Hela Ammar, Sophia Baraket, Wissal Dargueche, Rania Dourai, Hichem Driss et Aziz Tnani s'est déplacée à travers différentes régions de la Tunisie à la rencontre de visages anonymes mais expressifs pour la réalisation d'une centaine de portraits susceptibles de former une mosaïque tunisienne où les diverses catégories sociales et de différentes générations sont représentées. L'adhésion des Tunisiens pour se laisser prendre en photo, a surpris les photographes qui ne pensaient pas trouver autant de facilité à porter leur projet à terme. C'est l'identité et la spécificité de chaque personne qui sont mises en relief dans ces clichés. Les jeunes photographes se sont donnés à coeur joie pour donner sens à leur ouvrage et participer à leur manière, à l'après-révolution sans tomber dans le folklore et le populisme. L'exposition de ces photos, la plus grande jamais organisée à ce jour en Tunisie, a démarré le 17 mars dans les rues. Environ une douzaine d'installations ont été réalisées dans la ville de Tunis et ses environs, mais aussi dans certaines autres villes comme Sfax et Sidi Bouzid. Anciens bâtiments du RCD incendiés, postes de police, panneaux affichant le portrait du président déchu, zones de passage populaire sont autant de lieux emblématiques, qui ont servi comme supports pour l'affichage des portraits soumis aux regards et à l'appréciation des passants dont les commentaires passent de l'éloge pour certains au blasphème pour d'autres. L'idée de ce projet artistique participatif consiste justement à faire réagir le public en lui offrant la possibilité d'exprimer son point de vue. Mais parfois, les réactions sont violentes voire agressives. On se demande pourquoi l'art provoque-t-il en ce moment un tel rejet ? Une pareille attitude n'est pas envisageable dans une Tunisie nouvelle qui se veut ouverte et tolérante. Une société sans art et sans culture est vouée à la régression et ne peut avancer vers la modernité. Mais rien arrête l'art et les idées et ce projet Artocratie en Tunisie, se prolongera tout au long de l'année pour investir d'autres espace dans le pays et en faisant participer le plus grand nombre de personnes, des bénévoles, des jeunes artistes débutants ou confirmés et ce, dans le but de faire de la Tunisie où la culture, en général et l'art contemporain, en particulier s'épanouissent dans une totale liberté d'expression.