A l'heure où le règlement intérieur de la Constituante exhume les vieilles recettes coercitives d'un parlementarisme (travesti en Constituante) ayant, décidément, la peau dure, le syndicalisme de l'UGTT, nombriliste et, même, absolutiste, se livre comme d'habitude, comme toujours, à la technique de l'entonnoir. En l'occurrence, l'UGTT, débarrassée de ce qui passait pour être l'extension de son bras durant 23 ans (où l'inverse) est-elle, aujourd'hui, maîtresse de son destin et définit-elle les règles et des pesanteurs de la vie sociale. De surcroît, elle exhibe les accents du défi serein : « nos divergences intestines conduiront au consensus », murmure-t-on, ce qui suppose que les urnes ne sont pas pour demain et que la Centrale syndicale – quoique pluraliste dans ses articulations et, paradoxalement, centraliste dans le processus décisionnel – ne lâchera pas du lest. Pour le bien des millions de travailleurs syndiqués, l'UGTT tient à paraître unie, propre et s'il le faut, elle sortira ses griffes. On en a eu l'illustration lorsqu'une décision de justice interdit durant 24 heures à Abdessalem Jerad de quitter le pays. Puis, face aux rugissements des syndicalistes « touchés dans leur honneur », les pouvoirs publics jugèrent qu'il valait mieux ne pas tenter le diable. On sait que Abbassi succèdera à Jerad. Mais, le plus important n'est pas là : aux yeux de la caste au pouvoir, au sein de l'UGTT, les personnes peuvent à la limite passer, mais les alliances restent en l'état. Surtout que d'autres syndicats marchent sur les plates-bandes de l'UGTT et que leur réformisme – à l'instar d'Ismaïl Sahbani – procède de réminiscences vengeresses. Raouf KHALSI