«Néjib Chebbi et Caïd Essebsi sont derrière notre exlusion de la fusion entre Ettajdid, le PTT et le PDM» «Quoi qu'on fasse, la bipolarité islamistes /modernistes continuera à marquer le paysage politique» Vous avez dénoncé récemment votre exclusion du processus de fusion entre le mouvement Ettajdid, le Parti du Travail Tunisien et les indépendants du Pôle Démocratique Moderniste. Quels sont les motifs de cette exclusion ? Le Parti Socialiste de Gauche qui a été l'un des fondateurs du Pôle Démocratique Moderniste (PDM) n'a été ni informé, ni consulté à propos du lancement du processus de fusion entre le Mouvement Ettajdid, le parti du Travail Tunisien (PTT) et PDM. Son exclusion paraît ainsi comme étant préméditée, voire recherchée. Note mise à l'écart a été, en fait, dictée par le leader du parti Démocrate Progressiste (PDP) Néjib Chebbi ainsi que par l'ancien Premier ministre Béji Caïd Essebsi. Ces deux initiateurs du projet de la création d'un grand parti centriste capable de faire contrepoids au mouvement islamiste Ennahdha s'opposent à la présence de partis qui se réclament ouvertement de gauche comme le nôtre ou encore comme le Parti Communiste Ouvrier de Tunisie (PCOT) dans le nouveau front regroupant les forces démocratiques et progressistes. Dans son communiqué, Caïd Essebsi a plaidé pour un front démocratique qui exclut ceux qu'il considère comme des extrémistes de droite et de gauche. L'alliance Ettajdid-PTT- PDM ne cache pas d'ailleurs son intention de devenir l'aile représentant le centre-gauche dans le nouveau parti centriste. L'aile représentant le centre-droit est, quant à elle, représentée par le PDP, Afek Tounes et le Parti Républicain. Néjib Chebbi, avec lequel nous avons de vieux différends (les fondateurs du PSG avaient rejoint le PDP avant de le quitter au début des années 2000 suite au rapprochement opéré par Néjib Chebbi avec Ennahdha, NDLR) a, de son côté, déclaré ouvertement que les formations de gauche n'ont pas de place dans le nouveau parti centriste. Il s'agit là d'une grave erreur d'appréciation qui rend le processus de rassemblement des forces progressistes tronqué. D'autant plus que le nombre des électeurs potentiels de la gauche est estimé à 300.000, soit une partie non négligeable du corps électoral. Les forces progressistes cherchent-elles ainsi à contourner la bipolarité islamistes / modernistes et la polémique autour de l'identité arabo-musulmane de la Tunisie qui ont bénéficié à Ennahdha lors des dernières élections ? Effectivement, l'objectif des initiateurs du projet est d'éviter cette bipolarité. Mais les forces progressistes se trompent, de nouveau, de combat. Aujourd'hui, on assiste à une confrontation entre deux projets de société. D'un côté, il y a les islamistes porteurs d'un projet de société totalitaire fondé sur l'instrumentalisation et l'exploitation de la religion qui semblent déterminés à construire un Etat théocratique et de l'autre des progressistes qui défendent la modernité et les valeurs de la République. C'est une réalité palpable. Il ne faut pas se voiler la face. Quoi qu'on fasse, la bipolarité islamistes /modernistes continuera à marquer le paysage politique durant les prochaines années, voire même durant les prochaines décennies. Le PSG fera-t-il cavalier seul lors des prochaines élections ? Nous allons tenter d'en finir avec l'émiettement des forces de gauche. Des négociations ont été déjà engagées avec plusieurs partis de gauche comme le Mouvement des patriotes démocrates (Al-Watad) de Chokri Belaïd et le Parti du travail patriotique et démocratique (PTPD) de Abderrazak Hammami pour la constitution d'un front de gauche. Seul le Parti Communiste Ouvrier de Tunisie (PCOT) nous a fait faux bond. Comment jugez-vous l'action de l'actuel gouvernement et de l'opposition? A l'heure où l'économie semble au bord du gouffre, le gouvernement n'a même pas mis en place programme économique et social. Pour faire diversion, les partis au pouvoir sont en train de chercher des boucs émissaires. Tantôt, ils accusent la gauche de fomenter des troubles sociaux, tantôt ils clouent au pilori les médias. Or, la contestation sociale est essentiellement motivée par la détérioration de la situation économique et sociale du pays. L'opposition a, quant à elle, réussi à faire barrage à plusieurs tentatives de dérives autocratiques. Elle n'a pas, toutefois, réussi à présenter des alternatives économiques et sociales capables de sauver le pays. Propos recueillis par Walid KHEFIFI