Ville sinistrée sans que personne n'en parle. La population veut le rétablissement des ponts Casse-tête pour le gouvernement qui n'a pas de solutions immédiates Si le hasard ou la curiosités vous mènent du côté de Metline (près de Ras-Jebel), vous serez surpris et ahuris par l'énormité des dégâts, causés par les récents glissements de terrain. Le visiteur croirait plutôt à un séisme de très haut degré, à l'échelle Richter. Le spectacle extraordinaire est digne des grands films documentaires de sciences naturelles et de géologie. Des collines coupées en morceaux, telles de hyper pièces montées de gâteaux… Des routes en déroute, faisant perdre le nord des nordiques de céans, réduits en menus tranchées et fossés béants. Bref, tout le paysage pittoresque et féerique, de jadis et de naguère, est littéralement massacré et renversé, sens dessus-dessous, mettant à genoux piétons et utilisateurs de roues. Tous les chemins, ne mènent plus au patelin La déroute est générale. Le mécontentement, aussi. La population autochtone, depuis les fortes averses et les cyclones, ne sait plus à quel saint se vouer, ni sur quel chemin se rabattre, pour pouvoir « composer » avec le monde extérieur, étudier, travailler, etc… Tout le beau monde de céans est presque isolé dans un ghetto quasi-verrouillé. Presque tous les chemins ne mènent plus au patelin. La situation est invivable. D'autant plus que tout le monde du village est lié au monde économique extérieur, en l'absence d'activité économique à l'intérieur… Nul n'est épargné Un monde féminin fou se relaye du matin jusqu'au soir dans la confection à Ras Jebel, et a beaucoup de mal à regagner ses bases, ceci en raison de la complexité de la communication routière. Le monde collégien, lui aussi, est touché dans son équilibre coutumier et son assiduité. C'est les jeunes de dehors, des environs, qui, depuis les glissements, ont des difficultés inouïes, à être parmi les dedans, pour répondre au chef de classe : « présent ! ». Inclinaison… au Tout-Puissant Les agriculteurs, parmi les sédentaires, dirait-on, sont les seuls à échapper au calvaire. Non, les amoureux de la terre ont à vivre mal leur amour de toujours, en sillonnant leurs champs, eux aussi, chamboulés et chambardés par ce qui venait de se passer. Des arbres abattus et déracinés. D'autres, « courbant l'échine » et se recueillant devant la grandeur du Tout-Puissant. Comme cette bâtisse de deux niveaux qui, elle aussi, s'est humblement inclinée, chassant ses propriétaires sans pitié, leur imposant l'inconfortable statut de réfugiés. Pour une solution immédiate, d'abord De l'autre côté, les autorités sont harcelées et se disent pressées de remettre de l'ordre dans la cité. « Nous sommes mobilisés pour tout arranger, nous dit M. Lotfi Larguèche, le délégué. La solution doit être radicale, pour ne plus jamais revivre cette situation. L'étude y afférente est déjà lancée à grands frais. On ne doit pas brûler les étapes ». Du côté des grands bonnets, parmi les autochtones, la grogne est au top niveau. L'un d'eux, M. Habib Ben Atig, nous fait part de ses récriminations : « Il faut plus de six mois pour que la solution radicale envisagée, connaisse un début d'exécution sur le terrain. En attendant, une solution provisoire doit être trouvée, pour nous permettre de bouger, dans les plus brefs délais ». Se réveiller de bonne heure, pour être à la l'heure Nous sommes allés du côté du collège de la localité pour voir les choses de plus près, enquêter et écouter… Un établissement, comptant plus de huit cent élèves, entre filles et garçons. Beaucoup d'entre eux font la navette entre Metline et les bourgades d'à côté : El Garia, Cap Zebib, Béni Ata, Sidi Abdelaziz, etc.. Donc, plus de bus de navette pour de centaines de collégiens, appelés à compter sur leurs moyens personnels pour joindre les cours. En raison bien sûr de la coupure de la route principale, serpentant en hauteur, vers le village, perché là-haut, sur les collines et dominant splendidement la plage de Cap Zébib. Quant aux chemins et détours secondaires, ils sont étroits, risqués et ne sont plus ou moins, carrossables que par les petites cylindrées. Le gros des effectifs concernés, doit compter sur la solidité de ses jambes et se réveiller très très tôt, pour espérer dire rebonjour au tableau… « Messieurs de la télé ! Venez et jugez » Les plus heureux sont ceux qui ont occasionnellement de quoi payer cher le taximan : « Oui, nous dit le petit Samir, un maigrichon qui n'a que la peau et les os, les traits tirés et les yeux cernés par manque de sommeil et par malnutrition, certains taxistes, profitent de notre jeune âge pour nous rouler. Ils font la pluie et le beau temps. Ils pratiquent des tarifs exceptionnellement exorbitants. Ils nous dépossèdent de tout notre argent de poche. Il m'arrivent souvent de m'absenter, parce que papa n'a pas d'argent à me donner pour me permettre de me déplacer. Où sont les messieurs qu'on voit chaque soir à la télé ? Ils ne font que parler… parler… on ne les voit pas ici, pour pouvoir leur parler… ». A midi, les jeunes lassés et épuisés, les godasses « torturées » et trouées », n'ont plus la possibilité de rentrer chez eux pour déjeuner. Ils se contentent d'un repas frugal et insignifiant, pour répondre présents à la sonnerie de l'établissement. Horaires réaménagés, pour les soulager M.Kamel Khsiba, directeur du collège en question, semble réjoui, d'avoir trouvé la bonne solution, en réaménageant, après aval de la hiérarchie, les horaires de fonctionnement des cours. Une heure seulement d'intervalle au lieu de deux heures, entre la séance matinale et celle de l'après-midi. La sortie est prévue pour 17 heures, au lieu de 18 heures. « Ce qui évite aux élèves les attentes inutiles d'inter-séances, dit l'interlocuteur, et aussi la rentrée tardive chez eux, en raison du manque de moyens de locomotion. J'ai réservé la cour couverte du collège aux filles et garçons, ne rentrent pas chez eux à midi, pour les préserver contre le froid et les intempéries ». En bon père de famille, le directeur dut couvrir les bancs construits en dur, longeant les murs de la cour, de « matelas » de fortune… du carton épais, pour protéger ses… protégés contre l'humidité. Directeur nostalgique aux les cours Le brave homme, fraîchement désigné aux commandes du lycée, au bout d'une longue carrière de professeur d'histoire-géo, a tenu, à chaque fois, à dévier du sujet nous ayant mis nez à nez, pour nous vider son sac et dire à distance aux nouveaux barons l'ayant affecté, les difficultés qui l'agaçaient : manque de surveillants, de femmes de ménages etc..., personnel qu'il s'est vu souvent obligé de suppléer. Ramené à l'ordre du jour, le directeur et professeur es-qualité se met à nous expliquer ce qui venait de se passer. Dans le lexique de la géologie, le phénomène en question s'appelle, précise-t-il, avec l'entrain d'un nostalgique à son « job » initial, bien aimé, « solifluxion » qui se produit en terrain argileux. C'est un glissement de terrain, consistant en un lent écoulement de boue. Vérifications faite après coup, l'ami Robert ne contredit pas l'ami de Metline. Notre source parallèle nous confirme bien, ainsi, que ça avait bel et bien coulé de source… Conjuguer les verbes au présent Après ce petit cours magistral, on est allé dehors écouter un responsable local. Qui expliquait à la foule inquiétée et ayant hâte de voir « déverrouiller » la cité, ce qui allait être fait pour la délivrer. Là aussi, la solution n'est pas pour demain. Il s'agit de faire déblayer et réaménager une autre route, pour ne pas laisser le village à la merci de la seule route principale sinistrée. On apprend ainsi que la route Metline-El Garia sera élargie, renforcée et bitumée à grandes frais. Huit cent mille dinars lui sont déjà allouées. Cela dit, et pour tout dire et tout résumer, quels que soient les verbes, au futur conjugués, rien ne semble rassurer. Pour les autochtones de Metline et des environs, l'on a hâte considérablement de voir conjuguer plutôt à l'indicatif présent, rétablir provisoirement les ponts, en attendant les grandes solutions.