Leader politique et figure de proue du mouvement national, Salah Ben Youssef a joué un rôle important dans la lutte pour l'indépendance. Secrétaire Général du Néo-Destour, il mena sa tâche avec le courage et la détermination d'un militant qui avait le nationalisme dans le sang, et qui n'avait d'autre intérêt que celui du pays. Il était dénommé, le grand combattant, à côté du leader Bourguiba, alors directeur du même parti, dénommé le combattant suprême. Il sut mener à bien sa tâche de militant au sein du parti et suppléer Bourguiba, alors exilé en 1948. En août 1950, un gouvernement du Bey, réunissant certains militants et membres du Néo-Destour, fut formé, en vue de mener des négociations avec la France, par le biais de son Résident général, pour introduire certaines réformes, tendant à faire recouvrir peu à peu à la Tunisie sa souveraineté. M'hamed Chénik, un militant confirmé, qui fut déjà Premier ministre sous Moncef Bey, choisi par Lamine Bey pour diriger ce nouveau gouvernement, déclara dans le discours d'investiture : « Le gouvernement que j'ai l'honneur de présenter à votre altesse est un ministère de négociation ayant essentiellement pour tâche, en même temps qu'il assurera l'administration, de conduire le pays vers une autonomie de plus en plus large, répondant aux aspirations unanimes de la Nation tunisienne vers la restauration de notre souveraineté dans la plénitude de ses droits et prérogatives. ». Salah Ben Youssef eut le portefeuille de la justice, à côté d'autres militants, tels que Mahmoud Matri, désigné à l'Intérieur, ou Mohamed Badra à l'Agriculture. Ces négociations devaient être menées avec le Résident Général, Périller, à l'époque, devant lequel Ben Youssef se montra intransigeant sur le principe d'une souveraineté totale et entière que devait recouvrir impérativement la Tunisie. Le Rassemblement Français, une association coloniale, mena une campagne hostile contre le principe de cette négociation, qui, à leurs yeux n'avait pas sa raison d'être, essayant par tous les moyens de saboter le gouvernement Chenik. Quant à Ben Youssef, il comprit à l'avance que ces négociations n'allaient pas aboutir, tant que le colonisateur continuait à diriger les rouages administratifs et politiques du pays, et avait la main mise sur tous les secteurs importants. Quittant le gouvernement, il continua la lutte se déplaçant à travers le monde pour faire écouter la cause tunisienne, que ce à l'ONU réunie à Paris, où il présenta une requête en ce sens en mars 1952, ou à travers certains pays , tels qu'Egypte, en rencontrant Nasser, ou en Inde en rencontrant Nehru. En 1955, c'est le début d'un différend entre lui et Bourguiba, qui finit par la discorde. Celle-ci est autant désolante, qu'elle se termine par un drame, celui de l'assassinat du leader Ben Youssef, en août 1961 à Frankfort, après qu'il s'était expatrié, en restant intraitable sur un problème stratégique, que Bourguiba ne voyait pas de la même façon. Il était pour la loi du tout ou rien, et considérait que l'autonomie interne était une demi-mesure, qui ne pouvait pas prospérer. Quoi qu'il en soit, Salah Ben Youssef restera à jamais dans la mémoire collective parmi ceux qui se sont sacrifiés pour la libération du pays, car ils y avaient cru dur comme fer, et ce fut la raison pour laquelle ils avaient tenu bon jusqu'au dernier souffle