Le congrès du parti Ennahdha se tient depuis hier au Parc des Exposition au Kram. Ses travaux se prolongeront jusqu'au 15 juillet courant. Ils étaient près de 1200 congressistes venus des différentes régions du pays, ainsi que de nombreux invités étrangers de plusieurs pays arabes et occidentaux. Ce congrès, le 9ème depuis la création du parti il y a 40 ans et le 1er depuis sa légalisation, ambitionne de marquer une nouvelle étape dans la vie de ce parti, sous le signe de l'unité. Anciens et nouveaux militants des différentes générations étaient de la partie.
Dans une ambiance festive, Rached Ghannouchi, président du parti rappelle que son parti a été créé, il y a 40 ans. Les huit précédents congrès ont été tenus dans la clandestinité, moitié dans le pays et moitié à l'étranger. Il a promis fidélité aux martyrs de la Révolution et martyrs d'Ennahdha. Il a rendu hommage aux martyrs, blessés et prisonniers du mouvement youssefiste, du mouvement syndical, de la gauche et du mouvement islamiste. Un hommage particulier revenait aux femmes tunisiennes qui avaient stoïquement résisté aux côtés de leurs maris et parents sous la dictature. « Sans la Révolution, ce congrès n'aurait jamais pu se tenir, dans la légalité », dit-il. Il affirme qu'Ennahdha est « unie avec Abdelfattah Mourou et le savant en économie Salah Karkar ». Ce congrès devra être celui de l'unité. Il ajoute que le pays a besoin de consensus national pour être bien gouverné. « Nous appelons à la réconciliation nationale, sur des bases solides en rendant leur dû à tous ceux qui ont un droit bafoué ». Le président d'Ennahdha ajoute que ce congrès « lance un message d'unité et de consensus, le pays étant entre des mains sûres ». Il ajoute, en substance que la Tunisie qui a été un modèle de Révolution, doit être un modèle de développement. Le message d'unité s'adresse aussi aux pays maghrébins. La Tunisie est un pays où toutes les tendances peuvent coexister. Un message d'apaisement est lancé à l'adresse du peuple tunisien. « Les problèmes existants sont normaux pour un pays qui a connu une Révolution. Il faut aller vers l'avenir », ajoute-t-il en rappelant que le printemps arabe qui est parti de Tunisie a pour boussole la cause palestinienne.
Jebali : « les symboles de la résurgence de l'Islam »
Hamadi Jebali, secrétaire général du parti et chef du Gouvernement et qui avait présidé aux destinées du parti en 1988, s'est félicité « de la résurgence de l'islam au centre de la vie après la chute de la deuxième dictature ». Il considère que le 9ème congrès du parti est un évènement important en rapport avec le passé et le présent du pays. « Dans le passé le mouvement a participé aux luttes pour la liberté. Il a su allier modernité et authenticité. Le mouvement Ennahdha a réconcilié modernité et Islam. L'adhésion du mouvement au courant démocratique dans le pays a renforcé son positionnement dans le paysage politique. Ce n'est pas par hasard que la tenue de ses précédents congrès coïncidait avec la situation des libertés dans le pays. Durant 40 ans le mouvement a consolidé son identité politique, sa nature civile, son attachement aux droits de l'Homme et à ses références islamiques », ajoute le secrétaire général du mouvement tout en signalant que le mouvement a réussi à tenir tête au pouvoir dictatorial et à montrer de grandes capacités de mobilisation. Il ajoute que son parti a réussi à nouer des alliances importantes avec des forces démocratiques. Il rappelle que son parti a été solidaire avec l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) en 1985, a signé le Pacte National en 1988 et s'est engagé dans le Front de 18 octobre en 2005. Il a participé à l'affaiblissement du pouvoir. Dans l'étape actuelle, depuis le 14 janvier, « nous voulons tous que la démocratie naissante soit une démocratie durable, à travers le génie du peuple tunisien », dit-il. Il considère que la légitimité révolutionnaire nécessite de servir le pays et les citoyens. « La construction de la Tunisie post-révolutionnaire est complexe et nécessite un fort consensus entre les différentes volontés politiques. Il faut une base élargie pour le pouvoir avec la coalition gouvernementale et la participation des forces de la société civile », dit-il. Il ajoute qu'en dépit des difficultés, des engagements sont pris pour le renforcement de la liberté et le lien entre démocratie, sécurité et sentiment de citoyenneté. Le chef du Gouvernement ne manquera pas de parler des revendications excessives qui peuvent freiner la Révolution. Au moment où Hamadi Jebali développait ses idées, Me Abdelfattah Mourou a fait une entrée très applaudie à la salle.
Coalition gouvernementale : choix stratégique
Après 6 mois de Gouvernement, Hamadi Jébali, reconnait qu'il faut évaluer le travail de son Gouvernement pour dépasser les faiblesses. Il considère que l'exécution des projets pour réaliser les objectifs de la Révolution est une responsabilité morale du Gouvernement. « Pour être franc, il faut dire que les réalisations se font en fonction des moyens matériels et une année ou deux ne suffisent pas. Il faut y aller progressivement. L'action gouvernementale, seule ne suffira pas. Il faut associer le peuple », dit-il. Il prévient que l'avenir de la Démocratie est lié à la résistance aux forces-contre révolutionnaires. Il appelle à activer l'édification des institutions et à renforcer ses capacités techniques, à faire évoluer l'expérience de coalition gouvernementale comme choix stratégique et non conjoncturel, à accélérer le processus de la justice transitionnelle, à maîtriser l'endettement extérieur, à reprendre l'initiative par l'Etat pour l'amélioration des services de base comme la santé, le transport et l'enseignement, à s'intéresser davantage à la situation de la femme.
« A court terme, la première urgence est la réussite aux prochaines élections avec des résultats confortables », affirme le secrétaire général. Il précise que le mouvement doit être habilité à jouer le rôle qui lui incombe. Il doit réformer sa situation structurelle. Il a besoin, dit-il d'élargir davantage les consultations au sein de ses structures, de s'ouvrir plus aux jeunes. Il exhorte son parti à sauvegarder sa nature de force de changement, à consolider son positionnement comme force centriste, d'avant-garde et garante d'un bloc historique qui assume les responsabilités du pouvoir, à élargir le cercle de gouvernement, à renforcer sa position comme force qui attire toute la société, hommes d'affaires patriotes et intellectuels, compris. Les capacités de direction de ses jeunes doivent être améliorées. Le rajeunissement de ses structures dirigeantes doit être amélioré.